témoignages
«Les habits de marque m’ont aidée à vivre»
J’ai toujours aimé les belles choses
Quand j’étais jeune, j’étais moins attachée aux marques, mais j’aimais déjà les vêtements d’un certain prix. Ce qui n’était pas toujours très bien vu par mon entourage familial, plutôt modeste. A l’époque, les habits étaient liés à l’image que je voulais donner. Je manquais d’assurance et posséder de jolis vêtements m’aidait à me sentir plus sûre de moi.
J’avais 21 ans quand j’ai vraiment commencé à m’intéresser à l’univers de la mode. Je venais de finir l’école d’infirmières. A l’hôpital où je travaillais, on discutait fringues entre collègues, on faisait parfois les magasins ensemble à Lausanne. J’achetais beaucoup de magazines féminins pour me donner des idées. A l’époque, je n’allais pas que dans des magasins haut de gamme. Quand je me suis orientée vers les marques, je me suis habillée en Marella, Max Mara ou Cacharel.
En 1979, à 28 ans, je suis tombée malade
J’ai arrêté de travailler pendant plus d’une année et ensuite j’ai repris à des taux divers, avec de temps à autre des absences. En 1996, j’ai dû quitter mon emploi définitivement. Depuis, je reçois une rente de l’AI et une autre de la caisse de pension. Mon revenu me permet de vivre, mais sans plus. Pour autant, je ne veux pas paraître misérable.
J’ai toujours voulu conserver une image de femme soignée, qu’on me voie comme quelqu’un de normale entre guillemets. Lorsqu’on est jeune et qu’on ne peut plus travailler, qu’on n’est plus inséré dans un contexte professionnel, on perd tout, y compris une part de son identité. Alors, il faut redonner un sens à sa vie, trouver des intérêts, des motivations et se recréer une structure, surtout quand on n’a pas, comme moi, de famille à soi. Il faut aussi reconstruire une image positive de soi.
Je ne suis pas méprisante envers les magasins bon marché
On peut y trouver de très jolies choses, mais il faut reconnaître que c’est souvent un peu le foutoir. Tout est entassé et il y a même des clientes qui font du shopping en mangeant des kebabs. J’aime quand l’environnement est soigné. Je pense que je suis un peu snob. Cela me fait plaisir d’être dans un bel endroit où je suis bien reçue.
Au fil des années, j’ai établi des relations avec les vendeuses et ça joue aussi un rôle. On discute, elles me conseillent. Pour satisfaire mes besoins de luxe, je pourrais acheter des vêtements de seconde main. Mais je n’y arrive pas. C’est un peu une phobie: je ne peux pas acheter des habits déjà portés, même s’ils sont propres, comme je ne peux pas lire des livres qui viennent d’une bibliothèque.
Si je suis objective, je dois reconnaître que je vis au-dessus de mes moyens
Mais je ne m’endette pas, parce que j’ai trouvé des arrangements avec les magasins dans lesquels je vais régulièrement, qui acceptent que je paie en plusieurs fois. Si je m’achète quelque chose de cher, je suis prête à attendre trois mois pour l’avoir.
J’ai commencé ce système quand je travaillais encore et aujourd’hui, à part quelques vendeuses qui me connaissent bien, personne n’est au courant de ma situation. Je n’ai pas de carte de crédit, juste deux cartes de cliente qui sont plafonnées. Cela me permet d’étaler les paiements sur plusieurs mois. Je n’en prendrais pas plus, parce que je ne veux pas courir de risques.
Je suis quand même quelqu’un qui est vite tenté!
Je ne porte que des pantalons. Mon style d’habillement est plutôt sport classique. L’été, je n’aime plus trop montrer mes jambes et en hiver avec une jupe, il faut un manteau de la bonne longueur. C’est compliqué!
Ce que j’ai plaisir à porter ce sont des vêtements simples, assez passe-partout, mais avec de belles coupes et dans de belles matières. Si je vois un pull qui me plaît, je débourserai facilement 300 ou 350 francs et je paierai en deux fois. Pour un manteau, comme mon Burberry ou ma doudoune Moncler, j’ai mis trois acomptes. Un pantalon me coûte entre 120 et 280 francs.
J’aime bien les sacs aussi, mais en quantité limitée
J’ai deux Darel, un Sequoia et deux Vuitton. J’entretiens quand même une certaine ambiguïté avec les marques. Il y a celles qui ne se voient pas et celles qui sont très visibles. Par exemple, un sac Vuitton, cela se remarque. Parfois, j’ai envie qu’on reconnaisse ce que je porte.
C’est mon côté provocatrice. Mais je n’ai pas envie de la panoplie complète: manteau Burberry, sac Vuitton et foulard Hermès. Je suis tout à fait consciente que je n’ai pas un statut de femme riche et je ne veux pas faire croire que je le suis. J’hésite même à porter certaines choses. J’avais un chemisier Burberry, il faisait tellement trop que je ne l’ai jamais mis.
Une touche, c’est ce qui me plaît!
Deux fois par année, je fais le tri dans mes armoires. Ce que je n’ai pas porté depuis deux ans, je l’écarte, car je sais que je ne le porterai plus. Je ne conserve plus des piles de trucs. Par exemple, j’ai 9 pantalons, moitié pour l’été et moitié pour l’hiver. J’ai 4 paires de chaussures d’été et 10 à 12 paires pour le reste de l’année. Les chaussures, ça ne sert à rien d’en avoir beaucoup, ça se démode très vite.
Depuis quelques années, je revends mes vêtements. Chez moi, les choses circulent. Avant j’usais mes habits puis je les jetais. Depuis que j’ai découvert les magasins de seconde main, j’apporte à chaque saison une dizaine de pièces. J’en retire parfois jusqu’à 500 francs.
Aujourd’hui, j’ai élargi l’idée d’apparence à mon appartement!
C’est un projet pour lequel je vais consacrer une bonne partie de mon budget. Je suis donc entrée dans une démarche d’économie totale. Je contrôle toutes mes dépenses y compris alimentaires. D’ailleurs, je fais moi-même mon pain et mes yaourts. Ce mois, j’ai économisé 200 francs de cette manière.
Mon projet consiste à meubler à neuf mon intérieur. Avec la décoratrice qui me vend – par acomptes – le mobilier, j’ai revu toute la déco de mon appartement. Chez moi, ce sera très dépouillé avec quelques touches design. J’ai toujours pensé que de m’occuper de mon apparence en m’achetant des vêtements, ça m’aidait à vivre. Maintenant, je réalise que cette nouvelle démarche m’aide beaucoup plus sur le plan social. J’ai du plaisir à accueillir les gens chez moi, je suis fière de leur montrer mes nouvelles acquisitions. Avant, malgré mes beaux vêtements, je ne recevais personne. Maintenant je m’ouvre.
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