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Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu envie de partir

Prendre la route, vivre en nomade, libre de toutes contraintes. Découvrir des pays, des cultures différentes. Rencontrer des gens. J’ai une soif énorme d’apprendre, une grande curiosité pour tout ce qui touche la vie, le monde. Le 2 avril, je vais définitivement tourner le dos à ma vie d’ici pour prendre un grand bain de curiosité.

Si beaucoup peinent à comprendre qu’on puisse ainsi tout laisser derrière soi, moi, je n’attends plus que ça. Plus je fais le tri, plus je vide mes armoires, plus je me sens légère. Prête à lâcher les amarres. Loin de cette prison sociale et économique dans laquelle je vis, il me semble, depuis trop longtemps déjà.

Non que j’aie été malheureuse jusqu’ici

J’ai eu une vie bien remplie avec mes quatre enfants âgés de 19 à 26 ans aujourd’hui, issus de deux mariages – et deux divorces –, des postes de travail variés… J’ai parfois l’impression d’avoir vécu à cent à l’heure. Mais entre les gosses, le boulot, les charges financières, il n’y avait plus beaucoup de place pour les rêves.

Les voyages que je me suis octroyés ces années-là étaient liés aux vacances. Des parenthèses touristiques pour souffler, se recharger les batteries, et repartir au front. J’aurais pu continuer à ce rythme, mais il y a trois ans, j’ai flanché. Faire toujours plus, toujours plus vite, c’était trop.

Je me détruisais

J’ai décidé de faire des choix. J’ai quitté mon travail stressant dans le domaine de la communication et me suis engagée dans un home spécialisé pour personnes handicapées. Sauf que j’ai vite réalisé que cela n’allait pas me convenir sur le long terme… C’est pendant cette période que j’ai rencontré Marco au hasard d’une petite annonce. Il recherchait une passagère pour des virées à moto. Comme je voulais en faire, et qu’il me manquait le véhicule, je l’ai contacté.

Notre histoire a démarré sur les routes, en tout bien tout honneur. Les mois se sont écoulés, et un jour nous nous sommes mis ensemble. C’est la première fois que j’entamais une relation ainsi, sans coup de foudre en amont. Lui aussi d’ailleurs. Et comment dire? C’est presque mieux. Plus le temps passe, plus nous apprenons à nous connaître, plus notre amour grandit.

Marco habitait à Rolle et moi au Locle

Nous nous voyions les week-ends. Nous avions bien des projets de voyage, mais plutôt sur le court terme. Et puis, 2010 est arrivée. Marco a fait un infarctus, et il a perdu un vieil ami, Steve Lee, le chanteur du groupe de hard rock Gotthard (ndlr: Marco a été le premier manager du groupe, ceci pendant vingt-trois ans).Ça a été un choc, suivi d’une prise de conscience.

A savoir que la vie est courte, beaucoup trop courte, et que nous avons les deux la cinquantaine. Il nous reste, si tout va bien, encore trente années devant nous. C’est le moment ou jamais de réaliser nos rêves, de vivre une vie qui nous ressemble.

Mais qu’allions-nous faire de nos vies?

C’était LA question. Le projet de partir s’est rapidement imposé. Restait un point de chute à définir. Grâce à Internet, nous avons fait la connaissance du responsable de l’ONG Avec (Aide volontaire aux enfants du Cambodge), un Neuchâtelois avec qui nous avons sympathisé. De fil en aiguille, la décision est tombée. Nous allions nous installer à Battambang, au Cambodge, et donner un coup de pouce à l’orphelinat de l’ONG.

Tout s’est très vite enchaîné. Marco ayant entretemps échangé son camping-car contre un camper tout terrain, l’idée de prendre la route a fait son chemin. Nous avions le moyen, le mobile, pourquoi ne pas commettre le crime? Mais en même temps 20 000 kilomètres, avec un camper, c’était un sacré défi. Sans compter que nous allions devoir traverser des pays pas faciles d’accès, comme le Pakistan. En guise de test, nous avons sillonné les Balkans durant trois mois l’année passée. J’ai eu un plaisir fou à m’immerger dans cette vie de nomade. A vivre au jour le jour, à découvrir des coins de pays non touristiques, rencontrer des personnes, partager avec elles un moment de vie. Nous avons réalisé que nous nous sentions mieux devant une fondue sur un feu de bois en pleine forêt que dans un resto chic. Que c’était le bon choix.

Mes enfants? J’ai un peu balisé avant de leur annoncer la nouvelle

Mais ils sont super. Ils me soutiennent. Ils se réjouissent déjà de venir nous rendre visite au Cambodge. Moi, je pars confiante: ils sont aujourd’hui adultes et autonomes, ont un travail, un appartement, des projets de vie et leurs pères à leur côté en cas de coups durs. Et puis, on restera en contact. Il y a Internet, Skype, tout ce qu’il faut pour continuer à se parler. Que je sois à 8 ou à 20 000 kilomètres d’eux, le lien est là et il va perdurer.

Dans notre entourage, si certains nous envient, beaucoup ne comprennent pas que l’on puisse ainsi tout lâcher. Les enfants, le travail, notre loft. Tout ce qui a été bâti pendant des années. Je ne sais pas, c’est peut-être à cause de mes deux divorces, le fait d’avoir dû tout quitter et tout recommencer à zéro à deux reprises, mais pour moi, le matérialisme, la nostalgie, ce sont des mots qui n’ont pas de place dans ma vie. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai réussi à aller de l’avant dans les moments difficiles.

Ce projet a grandi en nous un peu comme notre histoire d’amour, naturellement, tout en douceur. Si notre point de chute est le Cambodge, cela ne signifie pas que nous allons y rester. Tout est ouvert. Mais nous prenons bien un ticket aller simple. Nous avons commencé à vendre toutes nos affaires, histoire de ne rien laisser derrière nous. Cet argent ira à l’ONG Avec. Nous avons peu, mais assez pour mener la vie qui nous attend.

On me dit que j’ai du courage

Moi je me dis que j’ai de la chance. J’espère que je serai à la hauteur de ce rêve. Je n’oublie pas que j’ai derrière moi cinquante ans d’éducation occidentale. D’ailleurs, je n’idéalise rien. Je sais qu’il y aura des moments plus difficiles que d’autres. Mais je suis prête à vivre au jour le jour. C’est mon cadeau à moi, le plus beau: la liberté.»

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