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Aveugle sur le chemin de Compostelle, chemin de l'espérance

Cet "ambassadeur bénévole de la cécité" était parti le 3 juillet du Puy-en-Velay (Haute-Loire). Il est arrivé, fourbu, mercredi, devant la cathédrale romane de Saint-Jacques de Compostelle, après 1500 km sur les chemins de France et d'Espagne. "Ce ne fut pas un chemin de croix, mais un chemin de vie, de bonheur, de rencontres et d'espoir", souligne-t-il.

S'il n'est pas le premier non voyant à accomplir le célèbre pèlerinage, il est le seul à ce jour à l'avoir fait -pour moitié dans sa partie française- à l'aide d'un prototype révolutionnaire de guidage électronique pour aveugles, qui pourrait assurer une nouvelle autonomie à ses millions de compagnons d'infortune.

Atteint de rétinite pigmentaire (40 000 cas en France), une maladie génétique qui s'est déclarée lors de ses 20 ans, Gérard Muller a perdu inéluctablement la vue au fil des années. Mais son handicap s'est transformé en sacerdoce. "Seuls 5% des quelque 2 millions de mal voyants français osent sortir de chez eux, avoir des activités. Là est le drame, la réclusion, l'enfermement dans le handicap", estime-t-il.

GPS, logiciel, boussole et indicateur vocal

L'appareil de guidage électronique utilisé par le marcheur entre Le Puy et Saint-Jean-Pied-de-Port a été conçu par l'équipe du professeur René Farcy (CNRS-Orsay). Il n'est pas encore commercialisé. Le système consiste en un boîtier GPS fixé sur le pommeau d'un bâton de randonnée téléscopique, couplé à un logiciel et à une boussole, avec indicateur vocal. Sur la partie française des 740 km du "camino", des milliers de points GPS (chaque 20 à 30 mètres) avaient été entrés dans le logiciel.

Au fur et à mesure de sa progression sur les chemins, Gérard Muller, canne de randonnée dans une main et canne blanche dans l'autre, recevait les indications concernant la distance et la direction à suivre, selon les codes de l'aviation. Par exemple: "point suivant 12H (tout droit)", ou bien "9H (à gauche) à 50 m". Mais évidemment, ce système n'indique pas la qualité du terrain emprunté ou les embûches inattendues.

"Je devais être très concentré, lire la route à la fois avec ce guide électronique, mais aussi avec la semelle de mes chaussures", raconte le pèlerin, pour qui "une bonne utilisation de cet outil révolutionnaire implique une solide habitude de la marche sur tous les terrains. Mais pour ceux qui voudront s'y mettre, cela s'apprend très bien", insiste-t-il. "Changer la relation avec la canne blanche"

Sur la portion espagnole du chemin de Compostelle, Gérard a marché sans l'aide de ce précieux guide électronique (les relevés GPS n'avaient pu être effectués outre-Pyrénées), mais avec celle de pèlerins de rencontre. "J'ai eu un immense et long moment de plaisir, comme en 1999, à Nîmes, quand j'ai quitté le stage d'éducation à l'autonomie et que j'ai pu de nouveau, comme lorsque j'étais voyant, prendre seul le bus et m'assoir seul à une terrasse de bistro. J'étais redevenu moi-même", dit-il.

Pour Gérard Muller, les aveugles doivent "changer leur relation avec la canne blanche, qui ne rend pas moins beau, moins intelligent, moins vivant". "Les appareils révolutionnaires peuvent faire beaucoup, ajoute-t-il, mais peu sans un déclic personnel". Il faut "en finir avec l'image déformée de l'handicapé", assène-t-il.

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