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Un ex-policier crée des accessoires féminins de self-défense

Gregory Santus ex policier defense accessoires feminins

L'esprit entrepreneurial et l'âme créative, Grégory Santus quitte la police pour se lancer en tant qu'indépendant. La fabrication artisanale d'accessoires féminins, qui peuvent être considérés comme moyen de défense improvisé, ne représente qu'une partie de ses activités professionnelles.

© Kalina Anguelova

Sortir le pic à cheveux de sa coiffure pour le planter une fois, deux fois, dix fois dans la cuisse de son agresseur… Pourquoi pas? «Je crois que tous les moyens sont bons pour s’en sortir face à un individu qui veut porter atteinte à notre vie ou intégrité physique. Il n’y a pas vraiment de limites au niveau de la défense.» Doué d’un sens vif de la justice, Grégory Santus, policier de profession aujourd’hui reconverti en entrepreneur, s’est lancé en 2020 dans la création artisanale d’accessoires féminins qui «dans une situation conflictuelle avec inégalité de puissance et de force peuvent faire la différence au niveau de l’auto-défense».

Des yeux doux, mais un regard direct, sévère, qui va rapidement vous évaluer comme pour s’assurer que vous n’êtes pas dangereux. Il étale sa gamme féminine: porte-clés, petits couteaux, pics à cheveux et Kanzashi sur la table de ce restaurant de Morges, sa ville - où, il y a deux ans encore, il occupait le poste d’adjudant-chef de brigade à police secours.

© SWconcepts

Objets détournés qui peuvent sauver

Le gaillard au physique imposant tient d’un poing ferme un pic à cheveux en carbone, à la pointe aiguisée, tout en décrivant les façons de planter ou de sectionner un groupe musculaire clé pour neutraliser un agresseur. Imperturbable face au désarroi du serveur qui ne sait plus où déposer cafés et verres d’eau au milieu de tous ces objets contondants, il empoigne une autre création, inspirée du très protocolé univers japonais. «Les kanzashi ornaient les coiffures des Geisha. Ces dames de compagnie raffinées détournaient ces accessoires de beauté en moyens de self-défense dans une situation conflictuelle.» Ses kanzashi et petits couteaux, aux bouts tranchants, sont fabriqués en polymère avec des alliages de résine et de fibres de verre.

«Je n’utilise pas de métaux, mais des polymères qui sont plus agréables et chauds au contact de la peau. Ils sont aussi très pratiques à transporter dans un sac à main.»

S’il s’est lancé dans cette gamme de produits ce n’est pas pour faire l’apologie du combat, mais avant tout pour le plaisir de proposer de beaux objets. «Après, si on peut allier le beau à l’utile, ce n’est jamais de trop. Ces accessoires peuvent être considérés comme moyen de défense improvisé au même titre qu'un journal roulé ou une bouteille.» Lorsqu’il parle d’injustice, son visage s’assombrit. «J’ai malheureusement beaucoup trop de femmes dans mon entourage qui ont été victimes de harcèlement sexuel ou de viols. Il n’y a pas de raison que par sadisme une personne attaque notre intégrité physique. C’est intolérable. Avoir un objet qu’on peut détourner en moyen de défense improvisé, ça peut sauver.»

Anticiper les réactions

L’ex-policier de 35 ans tient à souligner «l’importance d’appréhender une situation. Parce qu’au final, l’évitement reste la meilleure des options.» Cela passe par «l’entrainement de sa perception, le développement d’une conscience de ce que nous entoure. Evidemment, il ne faut pas tomber dans la paranoïa, mais simplement apprendre à anticiper les réactions des gens.» Comment? Il liste quelques situations fréquentes où la bonne attitude peut sauver. «Quand on est de sortie, la nuit, lever les yeux de son smartphone, ranger ses AirPods. Détecter ce qui est habituel à voir ou pas dans l’environnement des gens. Estimer si l’attitude d’une personne est bienveillante ou non. Sonder le positionnement d’un individu à la sortie d’bar, d’une boîte de nuit. S’il attend, pied au mur, à 2h du matin, ce n’est pas tout à fait normal. Alors, il faut prendre la ruelle d’à côté.» Il donne l’impression d’être toujours plus fort que l’incident. De quoi l’envier.

Il insiste sur l’importance de la différence entre perception et réalité.

«En Suisse, c’est très compliqué de justifier l’usage d’un couteau en self-défense. Au moment des procès, la grande difficulté réside dans le jugement de l’intention de l’agresseur au moment des faits et la perception qu’en a l’agressé.

Dans le cadre de nos formations, on apprend aux gens à utiliser le dommage moindre vis-à-vis d’un potentiel agresseur afin de ne pas se retrouver en porte-à-faux par rapport au niveau de menace perçu et le niveau de menace réel.»

Si Grégory Santus a quitté la profession de policier, il n’abandonnera jamais le monde sécuritaire. Son esprit entrepreneurial et son âme artistique, longtemps emprisonnée sous l’uniforme bleu/noir, le poussent à lancer sa société SWconcepts, en pleine crise sanitaire. La coutellerie et la fabrication d’accessoires féminins ne représentent qu’une partie de ses activités d’indépendant. «Cette partie très créative et manuelle, qui me manquait tant dans ma fonction précédente, est devenue très importante dans ma vie. C’est libératoire, c’est un vide-tête.»

Via sa société, il réalise aussi des audits de sûreté et de sécurité dans des entreprises, des administrations ou des ONG, en collaboration avec un ami, ex-agent de la police fédérale belge. A l’issue, il propose des formations adaptées aux problèmes de sûreté détectés. «L’idée principale est de développer un état de conscience sur ce qui peut arriver autour se soi.» Il continue son histoire, en décortiquant chaque étape: préparation technique de premiers secours traumatiques, management de personnes, préparation situationnelle pour organiser une mission en zone de conflit…

Grégory Santus avec son fidèle compagnon Chase qui ne le quitte jamais. © Kalina Anguelova

Le besoin de se reconvertir

Comment passe-t-on de policier à entrepreneur? «J’aime le changement. J’aime me nourrir de nouvelles expériences. Après 15 ans dans la police, on grandit. On atteint un plafond et on passe à autre chose.» Du temps qu’il obéissait aux ordres, il changeait de fonction tous les trois ou quatre ans. Il a débuté à police secours, puis s’est spécialisé dans les stupéfiants, avant de rejoindre des groupes d’intervention dans des unités spécialisées et devenir responsable de formation et gestion de projets.

Au fil du récit, il met ce qu’il faut de touches personnelles pour faire comprendre qu’il n’a jamais considéré le métier de policier «comme une voie en soi, où on entre à 20 ans et on sort à 65 ans». Rencontrer à plusieurs reprises l’horrible, jusqu’au fond de la détresse humaine, ça marque.

«Lorsqu’une porte s’ouvre sur une femme abimée, un bras dans le plâtre, une minerve au cou, un nez cassé, des hématomes au visage et le mari, auteur de ces maux, à deux pas d’elle, le sentiment est indescriptible.»

Etre témoin de l’horreur et se sentir impuissant fait réfléchir. «J’ai vu un père poignarder son enfant. Je n’ai pas eu le temps d’intervenir. On est capable d’encaisser une certaine charge psychologique et physique par rapport au travail. Mais, il y a un moment où on doit se reconvertir.» On devine le mental d’acier, une autre forme d’arme.

Pour aller plus loin, n'hésitez pas à adopter les bons réflexes qui peuvent sauver. A lire ci-dessous.

Les bons réflexes

Pour Grégory Santus, «le spray au poivre (OC) est sûrement l’objet de self-défense par excellence. Il neutralise le potentiel agresseur et permet à l’agressé de fuir pour appeler la police. A condition de savoir s’en servir correctement. L'ex-policier conseille aux acheteurs d’en tester un obligatoirement. «Il suffit de coller une feuille A4 contre un arbre et de sprayer à différentes distances. 1m, puis 2m, et ainsi de suite, histoire d’évaluer la distance à partir de laquelle il devient inutile.»

En cas de contact avec l’agresseur, il faut prendre en compte trois aspects: «brouiller la vision (en plantant les ongles dans les yeux ou en utilisant un spray au poivre), bloquer la respiration (avec un spray) ou empêcher la mobilité (viser l’entre jambe d’un homme est d’une efficacité redoutable. Les autres points faibles sont les genoux ou les chevilles).»

Utiliser une petite lampe de poche pour éblouir une personne.

Prévenir une personne de confiance par SMS, avant le déplacement vers un lieu pas sécuritaire et à l’arrivée.

Avec les moyens de défenses improvisés de type kanzashi et pic à cheveux, «il faut viser prioritairement les cuisses, les bras, les chevilles. Sectionner, planter le nombre de fois nécessaire jusqu’à ce que l’agresseur cède».

L'ancien agent de l'ordre rappelle «que le témoin d’une scène conflictuelle a le droit d’intervenir avec la même proportionnalité que l’agressé envers l’agresseur».

Adresses utiles

Urgence médicale? Appeler le 144.
Victime?
En cas d’urgence, appeler la police au 117. Vous êtes victimes de violences (domestiques), consulter violencequefaire.ch pour dénoncer des maltraitances, s’informer ou bénéficier de conseils.
Témoin?
Vous êtes témoin d’une situation conflictuelle où vous avez l’impression qu’un individu veut porter atteinte à la vie ou à l’intégrité physique d’un autre individu, appeler la police au 117. Ne pas hésiter à contacter (de manière confidentielle et anonyme) le centre d’aide aux victimes LAVI le plus proche où des professionnels vous soutiendront et répondront à vos questions. Pour les jeunes de 11 à 20 ans, consulter le Ciao.ch.
Droit?
Consulter la Loi fédérale sur l’aide aux victimes.


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