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Mode: Naomi Campbell défend son franc-parler
La Britannique d'origine afro et sino-jamaïcaine, qui règne depuis plus d'un quart de siècle sur la une des plus grands magazines et parfois encore sur les podiums, est revenue, au cours d'un entretien exclusif par téléphone, sur son exceptionnelle carrière. Mais aussi sur les responsabilités qui vont avec un tel succès.
«M. Mandela m'a toujours dit: Il faut que tu te serves de qui tu es pour parler haut et fort de certaines choses», révèle la top modèle. Proche depuis les années 1990 de l'icône de la réconciliation raciale, mort en décembre 2013, la star reste fortement marquée par l'héritage immense de celui qu'elle appelait son «grand-père».
«Tout n'est pas facile à dire et tout n'est pas aisément acceptable par tout le monde, et tout le monde ne va pas forcément aimer ce que tu dis», se souvient encore la star, presque aussi connue pour ses colères homériques, ses démêlés judiciaires avec d'anciens employés l'accusant de mauvais traitement, que pour sa beauté.
Seule sur les podiums
Et ce qu'elle dit, c'est qu'elle «n'aime pas être toujours toute seule sur les podiums» des défilés de mode, seule représentante des mannequins qui ne sont pas blanches. Une tendance de plus en plus marquée jusqu'à peu, selon elle.
Certes, dans ses traces et celles de Beverly Johnson, de la grande Iman puis plus tard de Liya Kebede, les modèles noires Jourdan Dunn, Joan Smalls, ou même Chanel Iman se sont trouvé une place de choix sous le feu des projecteurs. Certes, la chanteuse Rihanna et l'actrice oscarisée Lupita Nyong'o, sont sans conteste deux stars écrasantes de la mode cette année. Il n'empêche. «Quand j'ai commencé ma carrière, il y avait davantage de mannequins de couleur sur les podiums qu'aujourd'hui», estime-t-elle.
Pour la ravissante adolescente londonienne aux yeux amandes et aux pommettes hautes qu'elle était, tout s'est enchaîné à une vitesse étourdissante. Repérée à 15 ans, elle défile pour Gianni Versace à 16 ans et entre dans l'histoire en décrochant la première couverture d'une top noire du Vogue France à 18 ans. «J'ai toujours reçu le soutien extraordinaire» de créateurs comme «Yves Saint Laurent, Azzeddine Alaïa, Gianni Versace, Karl Lagerfeld. Ils m'ont tous énormément soutenue au début de ma carrière, j'ai eu beaucoup de chance», confie Mme Campbell.
L'une des trois grandes de la «Trinité» des supermodèles des années 1990, avec l'Américaine Christy Turlington et la Canadienne Linda Evangelista, Naomi Campbell réfute avoir souffert de discrimination raciale, même si elle s'est déjà ouverte à la presse à ce sujet. «Je ne peux pas vraiment dire ça, j'ai eu ce que j'ai voulu et j'ai pu réussir, grâce à l'aide des créateurs, et je fais toujours des unes de Vogue», affirme-t-elle, avant de se rendre à un shooting pour Vogue Italia cet été.
«C'est pourquoi je me dois de soutenir à mon tour les jeunes mannequins car leur relation avec les couturiers n'est plus la même», explique Mme Campbell. Entre-temps, les directeurs de casting ont appris à faire écran, et les mannequins de couleur ont vu leur carrière dépendre de l'air du temps.
«On ne se taira jamais»
«Quand on me disait 'non', je finissais toujours par trouver un autre moyen pour y arriver. Maintenant, c'est un peu différent, parce qu'elles ont peur de parler. Si elles se plaignent, elles ne seront pas bookées». «Il faut aider ces filles, qu'elles soient asiatiques, noires, ou multi-raciales», ajoute-t-elle.
Naomi Campbell s'est associée en septembre 2013 à une initiative mondiale, Balance Diversity, lancée par une figure de la mode new-yorkaise, Bethann Hardison, pour dénoncer le manque de mannequins de couleur au top du métier. «Ce n'est pas un mouvement politique, c'est simplement une conversation», insiste-t-elle.
Depuis, «certaines personnes ont pris conscience du problème et essayent d'améliorer les choses». Mais «espérons que ce n'est pas qu'une tendance et que les gens ne font pas cela pour que l'on se taise car on ne se taira jamais».