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«Gender Data Gap»: conçu par et pour les hommes, le monde met en danger les femmes

«Gender Data Gap»: conçu par et pour les hommes, le monde met en danger les femmes

«On sait que le nombre des accidents du travail graves est en augmentation chez les femmes, alors qu’ils diminuent chez les hommes, relève Caroline Criado Perez. Mais on ignore pour quelles raisons: la recherche sur les professions est traditionnellement centrée sur les industries à prédominance masculine.»

© Getty

On connaissait déjà le «Gender Pay Gap», ces inégalités salariales entre les hommes et les femmes. La journaliste et militante féministe Caroline Criado Perez nous familiarise avec un nouveau concept, le «Gender Data Gap». Dans son ouvrage à paraître le 7 mars 2019, «Invisible Women: Exposing Data Bias In A World Designed For Men», elle démontre de quelle façon les hommes ont été désignés «étalon principal de mesure» à travers l’histoire.

Voilà pourquoi on grelotte au bureau...

Les produits et les services créés en se basant sur les attributs du sexe masculin sont innombrables. La température de la climatisation et du chauffage, par exemple, a été calculée sur le métabolisme des hommes dans les années 1960. Mais une récente étude néerlandaise a prouvé que les femmes ont un métabolisme moyen plus bas que celui de leurs collègues. Conséquence: les open space devraient être réglés 5 degrés au-dessus pour que l’on puisse travailler dans de bonnes conditions. Vous aussi, vous avez déjà tapé sur votre ordinateur en étant emmitouflée dans un plaid, à côté d’un collègue vêtu en short et t-shirt? Vous savez désormais pourquoi…

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Le «Gender Data Gap» impacte la vie des femmes au quotidien, sans qu’on en prenne forcément conscience. Elle découle d’un «manque de donnés sexospécifiques qui conçoit l’humanité comme exclusivement masculine», note Caroline Criado Perez dans un article du «Guardian». L’homme de référence est blanc, âgé entre 25 et 30 ans, pesant 70 kilos.

La chercheuse dénonce le manque de données concernant la santé des employées. «On sait que le nombre des accidents du travail graves est en augmentation chez les femmes, alors qu’ils diminuent chez les hommes, écrit-elle. Mais on ignore pour quelles raisons: la recherche sur les professions est traditionnellement centrée sur les industries à prédominance masculine.» On ne sait pas, par exemple, comment les corps des femmes réagissent face aux expositions physiques ou chimiques, ainsi que la façon dont les cellules se muent en cancer suite à cela.

Car le seuil de tolérance n’est pas le même pour une femme que pour un homme: les travailleuses ont la peau plus fine, sont généralement plus petites, cela peut donc considérablement réduire le niveau de toxines auquel elles peuvent être exposées en toute sécurité.

Dans la construction, le matériel à disposition n’est absolument pas pensé pour les femmes. Des sacs de ciment à la taille des briques en passant par les équipements de protection, rien n’est adéquat pour elles. La police subit également les mêmes critiques: en 1997, une policière a été poignardée et a perdu la vie, car elle pénétrait dans un appartement à l’aide d’un bélier. Impossible pour elle de s’en servir avec son gilet pare-balles, elle avait donc ôté ce dernier pour réaliser la manœuvre. Et en 1999, une agente a révélé avoir dû subir une réduction mammaire à cause des effets du port de son gilet. Suite à cette affaire, 700 autres policières se sont également plaintes. Pourtant, l’équipement n’a guère évolué depuis.

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... et que l'on meure davantage lors d'accidents de voiture

Dans le domaine des accidents de voiture, la vie des femmes semble, une fois de plus, ne pas être au même niveau que celles des conducteurs. Car lorsqu’une femme est impliquée dans un accident, elle a 47% de risques d’être plus sérieusement blessée qu’un homme et est 17% plus susceptible de mourir. Les femmes sont des pilotes qui ne répondent pas à la «position standard». Étant plus petites, elles sont souvent obligées d’avancer leur siège et de le surélever. Cette déviation par rapport à la norme les rend bien plus vulnérables lors de collisions frontales. Elles sont également plus souvent victimes du coup du lapin (la faut à nos muscles, moins présents dans le cou et le haut du torse). Une étude suédoise a démontré que les sièges actuels sont trop fermes pour protéger correctement le corps des femmes.

Pourquoi autorise-t-on un équipement aussi dangereux pour la moitié de l’humanité? La réponse est simple: les crashtests sont effectués à l’aide de mannequins moulés sur des corps masculins. Et aucun test n’exige que des mannequins femmes soient utilisés à la place du conducteur avant de pouvoir mettre une voiture sur le marché…

Toilettes, tailles des smartphones et des claviers de piano, reconnaissance vocale (le logiciel de Google est plus performant de 70% avec les voix masculines), applications de santé ne tenant compte que des corps masculins… La liste des inégalités de traitement est infinie. Pour Caroline Criado Perez, il est urgent de mettre un terme au «Gender Data Gap» et de concevoir (enfin!) des produits et des services prenant en compte les deux sexes:

Les designers pensent peut-être qu’ils fabriquent des objets pour tout le monde, mais en réalité, ils les conçoivent avant tout pour les hommes. Il est temps de prendre en compte les femmes dans la conception.

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