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Asia Argento, la bad girl talentueuse du cinéma

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Asia Argento.

© Thomas Laisne/Corbis Outline

Elle dit qu’elle a été «une enfant difficile». «Ma grand-mère, qui vit à Lausanne, affirme qu’il était compliqué de m’aimer car j’étais très renfermée. Tellement timide que je ne pouvais pas parler avec quelqu’un en le regardant dans les yeux. Devenir actrice m’a aidée à sortir de ma coquille. Peut-être un peu trop.» A entendre Asia Argento se retourner sur son passé, si sage et sereine, on a presque du mal à croire qu’il s’agit de la même femme qui, il y a encore deux ans, montait les marches du Festival de Cannes en faisant un doigt d’honneur aux photographes. Ou de celle qui, au fil des ans, a multiplié les photos dénudées et les déclarations chocs telles que «les actrices sont toutes des prostituées». Pourtant, le parfum de soufre qu’elle a longtemps laissé dans son sillage semble s’être évanoui. Asia a grandi. Mûri.

En ce vendredi 13 novembre 2015, l’ex-comédienne, aujourd’hui réalisatrice, disc-jockey et chanteuse, est à Genève où elle doit donner un «DJ set» à l’invitation du Festival Tous Ecrans. La soirée débute à peine. Au même moment, au Bataclan, les portes de l’enfer viennent de s’ouvrir. Ni la star italienne ni moi-même n’avons conscience des attentats qui frappent Paris, ville où Asia Argento a vécu et qu’elle adore. Ignorant tout de la tragédie, Asia continue d’égrainer ses souvenirs comme on le lui a déjà si souvent demandé, sans manifester ni impatience ni agacement. Sa voix grave emplit le silence feutré de sa suite d’hôtel et seuls de timides sourires trahissent de temps à autre la petite fille qu’elle a été – et qu’elle est sans doute encore.

Pour se sentir aimée

Née en 1975 à Rome, elle a grandi dans l’ombre de deux icônes du cinéma italien: le cinéaste Dario Argento, roi du film d’horreur, et Daria Nicolodi, actrice et héroïne – notamment – des films de son compagnon. Son père et sa mère avaient chacun une fille lorsqu’ils se sont connus. Asia est donc la cadette de la famille. Entre la carrière de ses parents et ses deux demi-sœurs, la petite dernière a le sentiment de ne pas trouver sa place. Elle passe son temps dehors, à arpenter les rues sur son vélo en compagnie de sa meilleure amie. «La ville, c’était mon royaume, se souvient-elle. J’en connaissais chaque coin. Je m’y sentais libre. Mais à la maison, je jouais les incomprises, les victimes. Et je trouvais ça agréable, je m’en rends compte aujourd’hui. Dans mon narcissisme, je voulais être la plus importante, la plus aimée.»

Pour se sentir exister aux yeux de ses parents, Asia se passionne pour la lecture. Elle se sert dans la vaste bibliothèque de sa mère en espérant attirer l’attention de cette dernière. «Je voulais lui montrer que j’avais tout compris, que j’étais mieux que mes sœurs et qu’elles n’avaient pas un goût de l’art aussi affirmé que le mien.» A l’exception de la copine qui l’accompagne dans ses virées à bicyclette, la jeune Asia n’a pas d’amis. Aux autres enfants, elle préfère les adultes. Il n’est pas rare qu’elle mente sur son âge, se faisant passer pour plus vieille qu’elle ne l’est en réalité. «Quelqu’un m’a raconté qu’un jour je lui ai longuement parlé de la Seconde Guerre mondiale et des Juifs. Je n’avais que 5 ans! Cette personne a cru que j’étais une enfant prodige. Je voulais justement qu’on pense cela de moi.»

Difficile de la voir autrement. Elle avait 8 ans seulement lorsqu’elle a publié son premier recueil de poèmes. Un an plus tard, elle faisait ses premiers pas devant la caméra, dans un téléfilm de Sergio Citti. Dès lors, l’enfance d’Asia se partage entre les plateaux de cinéma et les bancs d’école, entre le monde des adultes et celui des enfants qui la regardent avec fascination et curiosité, comme si elle était un membre de «La famille Addams». «Je me méfiais des gens, car lorsqu’ils m’abordaient c’était pour me parler de mon père. Quant à ma mère, lorsque je marchais à ses côtés dans la rue, les voitures s’arrêtaient pour nous regarder, tellement elle était magnifique et mystérieuse. A l’école, tous les enfants prétendaient que leur maman était la plus belle. Moi, je ne disais rien car je savais que la mienne était vraiment la plus belle du monde. Mais le plus intéressant, chez elle, c’était son intelligence.»

Quand tout est pardonné

Les yeux d’Asia Argento brillent de fierté. Pourtant, elle confie avoir souffert de la jalousie de ses camarades à l’adolescence. C’était avant qu’elle ne se forge un personnage public de «bad girl» qui la suivra tout au long de sa carrière, de son premier film sous la direction de son père, «Trauma», alors qu’elle avait 18 ans, jusqu’à l’aube de ses 40 ans (qu’elle a fêtés le 20 septembre 2015). Plus de quarante longs-métrages en tant qu’interprète («Last Days» de Gus Van Sant, «La reine Margot» de Patrice Chéreau et «Marie-Antoinette» de Sofia Coppola, entre autres) et trois comme réalisatrice – dont deux inspirés de sa vie personnelle. Un parcours brillant, souvent occulté par la rancœur d’Asia envers son père Dario. La jeune femme s’en est drapée durant des années. «J’ai travaillé avec mon père pour qu’il m’aime», se plaisait-elle à répéter non sans une pointe de cruauté. «Pour survivre, je me suis créé un faux moi, reconnaît-elle. Je m’aimais beaucoup, du moins c’est ce que je croyais. Je ne pensais pas du tout aux autres. Mais je ne me faisais pas du bien. Sortir de mon égoïsme et redécouvrir qui j’étais vraiment m’a pris beaucoup de temps.»

Depuis, elle a enterré la hache de guerre. «Désormais, quand on me fait des compliments sur mon père, je suis flattée. J’ai réalisé que mes parents sont des artistes exceptionnels.» Elle-même mère d’une fille de 14 ans et d’un fils de 7 ans, Asia Argento a compris une vérité au sujet de ses illustres géniteurs: «Etre un parent parfait, ce n’est pas possible. Mon père et ma mère ont fait de leur mieux. Quelqu’un m’a demandé l’autre jour ce que j’aimerais comme épitaphe sur ma pierre tombale, et cette phrase m’est venue à l’esprit: elle a fait de son mieux. Si les gens pensent cela de moi, c’est que j’aurai été un être humain accompli. Comme maman, artiste, femme et fille.»

Questions d’enfance

Une odeur d’enfance Le parfum de ma mère, Bluebell, de la marque anglaise Penhaligon’s. Ce qui évoque mon enfance, c’est aussi l’odeur des rues de Rome après la pluie. J’adore.

Mon premier amour Il s’appelait Adriano, avait les cheveux blonds, bouclés. Je devais avoir 8 ans. Je lui ai demandé: «Tu veux être mon copain?» Il m’a dit oui, mais m’a quittée deux jours plus tard. J’ai beaucoup souffert.

Mon jouet préféré Moi, mes jouets, c’était mon vélo et la rue.

Le dessert qui m’enchantait Le Mont-Blanc, vous savez, avec la meringue et les vermicelles? Pour mes anniversaires, je demandais toujours ça. Enfant, j’étais une petite mangeuse. Mon fils est pareil. Et lui aussi, il adore le Mont-Blanc. C’est le seul gâteau qu’il mange. C’est bizarre, non?

La phrase qu’on me répétait et qui m’agaçait «Vous êtes la fille de…»

Mes premières vacances J’avais 4 ou 5 ans. C’était à Forte dei Marmi, une ville balnéaire italienne.

Le vêtement dont j’étais fière J’avais un énorme sweat-shirt noir Ferrucci. Il était trop grand pour moi, mais je l’ai acheté quand même… Et je le mettais tous les jours, comme une robe.

Avec son père, Dario Argento, Asia a longtemps eu une relation d’amour-haine.
A 14 ans, elle tourne sous la direction de Nanni Moretti.
Asia, au premier plan, entourée de ses parents et de ses demi-sœurs.
En 2003, avec sa fille Anna Lou aujourd’hui adolescente.

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