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Dans son dernier roman, L’envie, Sophie Fontanel en parle comme de la «pire insubordination de notre époque». Et pour cause: ne pas avoir de vie sexuelle dans notre société hyperérotisée, où le sexe n’est plus un acte naturel mais un baromètre de bonheur et de santé, c’est louche. Encore plus si l’on vit bien cette situation. Maryse a vécu neuf ans d’abstinence, entre 21  ans et 30  ans. Hasard de la vie. Une rupture, un travail prenant, et pas de rencontres. Pas de frustration non plus. «Le sexe ne me manquait pas, confie la quadragénaire. J’étais sous pilule et ça mettait ma libido en berne. Mais je sentais qu’autour de moi, on pensait que j’avais un problème. Au bout de quelques années, j’ai donc arrêté de dire que je ne faisais plus l’amour. Pas parce que j’en avais honte, mais parce qu’on posait sur moi un regard apitoyé et suspicieux qui ne me plaisait pas. J’ai même fini par m’inventer des amants de passage, pour rassurer les autres. Pour entrer dans le moule.»

Ne pas être actif sexuellement serait-il tabou? Oui, en particulier chez les hommes, confirme la sexologue Patrizia Anex, à Orbe (VD). Selon la spécialiste, 40% des abstinents –  volontaires ou non  – sont des hommes. Soit près de la moitié. «Mais eux ne peuvent absolument pas le dire. Pourtant, il n’y a pas de normalité, en la matière. Certaines personnes vivent très bien sans sexe. C’est le cas de bien plus de couples qu’on l’imagine, même si les deux partenaires s’aiment et n’ont pas forcément de relation extraconjugale. Chacun sait ce qui est bon pour lui.» Encore faut-il résister aux diktats sociaux. Et ils ne manquent pas. Il faut faire l’amour deux à trois fois par semaine, car c’est la moyenne. Il faut avoir une vie sexuelle active, car ça allonge l’espérance de vie. Il faut être épanoui sexuellement, car c’est un droit. A en croire les innombrables études scientifiques sur le sujet, si l’on n’a pas de vie sexuelle, on a donc toutes les chances de mourir jeune, malade, déprimé. Voire, selon ce bon papa Freud, de finir complètement fou.

Vivre ou survivre?

«Il n’y a jamais eu autant de diktats à propos du sexe ­ – comment bien faire l’amour, combien de fois – et on n’a jamais autant étalé la misère sexuelle des couples qu’aujourd’hui, poursuit Patrizia Anex. Les sexologues se battent contre ces idées imposées qui font qu’au final, certaines personnes ne savent même plus faire l’amour. Dans ces conditions, si l’on fait le choix de ne plus avoir de vie sexuelle, il s’agit clairement d’un acte de révolution. Mais encore faut-il s’entendre sur ce qu’on appelle «sexualité». Beaucoup de personnes seules n’ont plus de rapports mais ont recours à la masturbation ou regardent des films pornos.» Certes, il est possible de survivre sans sexe, confirme la sexologue, mais cela n’a rien de simple. «Le sexe correspond à un instinct de vie et à une réalité physiologique. Chez les personnes abstinentes, il n’est pas rare que ce besoin se manifeste par des rêves érotiques, indépendants de leur volonté. Le laisser s’éteindre peut faire souffrir car on risque d’éteindre aussi d’autres aspects de la personnalité tels que la créativité et la sociabilité. Or, le sexe se nourrit de lui-même: moins ou l’utilise, moins on en a envie.»

La théorie de la pistache

En matière de sexe aussi, l’appétit viendrait en mangeant. Cécile, célibataire de 30  ans, appelle cela la «théorie de la pistache». «Tant qu’on n’a pas entamé le bol de pistaches, on ne ressent pas le besoin d’en manger. Mais si on en prend une, on en veut une autre, puis une autre. Quand il n’y en a plus, on a encore envie et il faut attendre un moment jusqu’à revenir à l’état de départ où l’on n’avait pas besoin de pistaches. Le sexe, c’est pareil. Durant les deux mois qui suivent un rapport, ça me manque. Surtout les deux premières semaines. Puis ça passe graduellement. Je pense que ça me manquerait plus si je me masturbais.» Côté plaisirs solitaires, elle a aussi choisi d’adopter la politique du «tout ou rien». «La masturbation ne m’intéresse pas, car elle réactiverait l’envie de faire l’amour. Je préfère ne rien avoir que de me contenter d’un substitut.»

Depuis quatre ans, la jeune femme n’a pas de relation fixe mais en moyenne une aventure d’un soir par an. Elle s’en satisfait, malgré elle. «Non, ce n’est pas l’idéal. Ni le sexe, ni l’amour ne me manquent tant que ça, car j’ai trop de boulot et que je n’ai pas le temps d’y penser, mais dans l’absolu, je ne pense pas qu’on soit fait pour être tout seul. Par moments, je me dis que je ne devrais pas me satisfaire de ma situation. Je ne suis pas triste, je n’ai pas de regrets, mais je suis tiraillée entre le fait que je vais bien comme ça, que je peux m’occuper de mille autres façons, et le fait qu’il faudrait que je me case car c’est ce que la société attend de moi. Ce qui me manque, c’est d’être en couple, mais d’avoir des coups d’un soir. Je crois que j’ai surtout besoin de bras.»

Le chiffre

18% C’est le pourcentage de Français qui n’ont jamais eu de rapports sexuels, selon une enquête Sofres réalisée en 2009 pour Le Nouvel Obs. Les femmes sont les plus nombreuses à ne pas connaître les plaisirs charnels: 22%, contre 13% d’hommes.

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