Femina Logo

Love & Psycho

Interview: Ces fausses croyances qui entravent notre bonheur en couple

Interview vos croyances vous empechent elles detre heureux se en amour

«Aujourd'hui, on veut vibrer constamment, ne jamais être frustré-e-s. On se dit que si la passion se dissipe un peu, qu’une forme de routine s’installe dans le quotidien, c’est un signe que la relation ne fonctionne pas. Mais ce n’est pas forcément le cas, on ne peut risquer toutes nos relations juste à cause de ce genre de diktat émotionnel.» - Camille Rochet, psychologue et thérapeute de couple.

© Getty Images

FEMINA Pourquoi avoir choisi de consacrer un ouvrage à la thématique des croyances?
Camille Rochet: Dans mon cabinet, je constate qu’il existe beaucoup de fausses croyances autour du couple. Parfois, je reçois des personnes qui étaient très heureuses ensemble et qui estiment qu’elles ne le sont plus, sans comprendre d’où vient ce mal-être ou cette déception. Et lorsqu’on creuse un peu, on se rend compte que ces personnes doivent, chacune de leur côté, faire le deuil de croyances qui, au lieu de les motiver ou de les aider, les enfoncent et les font douter sur l’intérêt de leur couple.

Elles attendent du couple une fonction thérapeutique, alors que le travail à accomplir doit être réalisé seul-e. J’ai donc voulu mettre en évidence les 5 fausses croyances que je vois le plus souvent, afin de rassurer les personnes concernées, les empêcher de désespérer et leur montrer que, souvent, il s’agit juste d’un cap à passer, une croyance à déraciner. [Les croyances abordées en profondeur dans le livre sont: «Un jour mon prince viendra», «Les opposés s'attirent», «La passion à tout prix», «Avec moi, il/elle va changer», «La vie est un long fleuve tranquille», ndlr]

Cela ne signifie pas que leur couple a échoué, mais qu’ils ou elles se sont peut-être trompé-e-s dans leurs attentes et définition même du couple.

Peut-on réellement démanteler une croyance, même lorsqu’elle est très ancrée et qu’elle constitue un point de repère via lequel nous construisons notre réalité?
Oui, c’est possible, et c’est tout l’intérêt. Or, de nombreuses croyances peuvent bien sûr être préservées, si elles nous permettent de vivre de manière positive et nous aident à avancer! Elles représentent notre socle et c’est uniquement lorsqu’elles nous mettent à mal qu’elles deviennent dangereuses, ou lorsqu’elles nous imposent un conflit entre ce que nous croyons et ce que nous vivons dans la réalité. À ce moment-là, ces croyances doivent être réinterrogées: il convient de se demander si nous les entretenons par liberté ou pour de mauvaises raisons, par loyauté envers nos parents, vis-à-vis du regard des autres ou par comparaison avec autrui… Nous avons la possibilité de les remettre en question et de les modifier, mais pour cela il est nécessaire de reconnaître une absence de liberté dans ces croyances.

De quoi peuvent-elles nous persuader, au niveau du couple?
Face à la déception ou la frustration que suscite une croyance contrariée, on peut penser, par exemple, qu’on n’était pas encore assez mature lorsqu’on a choisi notre partenaire, ou qu’on s’est trompé-e de conjoint. Mais c’est une utopie de se dire qu’il faut être complètement abouti-e personnellement avant de se mettre en couple: si c’était le cas, on n’oserait jamais entamer une relation amoureuse! Il s’agit donc de transformer cette croyance et d’évoluer en tant qu’individu, tout en préservant le couple.

Mais alors comment savoir quand il est vraiment temps de partir, quand une relation ne nous convient plus, indépendamment de nos croyances?
C’est une grande question que l’on me pose très régulièrement. Il est temps de partir lorsque mon conjoint piétine ma dignité et ne cherche pas à faire évoluer cela (type infidélités à plusieurs reprises ou qui ne s’arrêtent pas, addictions qui mettent de la violence dans la relation, disputes qui dégénèrent très souvent, mensonges répétitifs…). Ce sont là des critères évidents. Pour les autres situations, lorsqu'on se sent à bout de souffle dans un couple, il faut absolument se faire aider et je recommande souvent de recevoir de l’aide ensemble. Car nous nous forgeons notre propre réalité du couple et le thérapeute bénéficie d'une meilleure vision lorsqu’il peut avoir toutes les pièces du puzzle, en connaissant la réalité aussi de l’autre. Tant que ce travail n’est pas fait, je trouve dommage de rompre, car on n’aura pas tout essayé.

Certaines des croyances que vous énumérez, telles qu’«Un jour mon prince viendra», «Les opposés s’attirent» ou «Il/elle va changer pour moi» rappellent ce qu’on peut voir dans les films romantiques, non?
Oui, on les aperçoit effectivement dans les films, mais c’est aussi ce qu’on projette sur les couples qu’on rencontre dans la vraie vie. On a tendance à idéaliser les autres, car on se focalise sur les points qu’elles et ils semblent avoir réussis et qu’on ne retrouve pas forcément dans notre propre relation. Il s’agit d’un schéma de pensée dangereux, car je suis bien placée pour vous dire qu’entre ce qu’on voit de l’extérieur et ce qui se passe dans la réalité d’une vie de couple, il y a une grande différence. Il faut justement réussir à reconquérir notre liberté par rapport aux images idéales véhiculées dans les films: la vie nous présente tant d’ambivalences, tant de déceptions comme de magnifiques surprises! Un tel idéal va nous donner un faux sentiment d’inadéquation, plutôt que de nous aider à aller de l’avant.

Mais ces schémas idéaux ne peuvent-ils donc pas exister pour de vrai?
Je ne suis pas du tout contre les idéaux! L’amour d’un couple peut durer toute la vie si on en prend soin, c’est clair. Il faut toutefois veiller aux modèles auxquels on choisit de se comparer: ceux-ci doivent nous faire rêver, mais il convient de rester ancré dans la réalité, sans se concentrer sur un seul et unique repère. Il est important d’y intégrer de la souplesse, d’éviter de penser que si on ne retrouve pas ces idéaux dans notre quotidien, la relation est ratée. On ne peut vivre selon ce genre de diktat, la vie fluctue trop pour cela.

Quels indices peuvent nous suggérer qu’on se laisse trop guider par une fausse croyance?
C’est très personnel à chacun-e, mais je pense par exemple aux personnes vivant des crises de milieu de vie et n’acceptant plus la moindre contrainte. La première idée qui leur vient en tête est que leur partenaire les empêche de vivre ce qu’ils veulent vivre. Il s’agit d’un mouvement intérieur remettant en cause les décisions prises jusqu’à présent, mais en réalité, c’est un diktat inverse: on ne peut passer d’un schéma à un autre de manière si brusque, refuser subitement toute contrainte alors qu’on acceptait d’en faire auparavant. On reproche ce mal-être au conjoint, au risque de détruire la relation, alors que le problème ne se situe pas forcément dans le couple.

Un autre cas fréquent est lorsqu’une personne tombe soudainement amoureuse de quelqu’un d’autre, alors que tout se passait bien dans sa relation. Cela est dû à l’idée qu’un couple doit toujours être passionnel: c’est l’une des grandes problématiques de notre société moderne. On veut vibrer constamment, ne jamais être frustrés. On se dit que si la passion se dissipe un peu, qu’une forme de routine s’installe dans le quotidien, c’est un signe que la relation ne fonctionne pas. Mais ce n’est pas le cas, on ne peut risquer toutes nos relations juste à cause de ce genre de diktat émotionnel.

La première croyance que vous abordez («Trouver la bonne personne») me semble très intéressante à l’ère de Tinder. Ce phénomène peut-il être exacerbé par l’abondance de choix que nous proposent ces applications?
Oui, c’est typique sur ce genre de plateforme. On dresse une liste de critères bien précis, mais ceux-ci sont souvent dictés par nos fausses croyances. Entre le partenaire idéal qu’on imagine et la personne dont on tombe amoureux-se, il y a de grandes différences. Je vois des célibataires qui rencontrent de grandes difficultés car ils/elles n’ont pas le profil mannequin et sont vite éliminé-e-s sur Tinder, alors qu’ils/elles pourraient rendre quelqu’un très heureux!

Nous sommes tellement aveuglés par nos croyances, persuadés de savoir exactement ce qui ferait notre bonheur, que nous n’allons même plus à la rencontre de la personne.

Est-ce, selon vous, la croyance qui porte le plus préjudice aux personnes célibataires?
Oui, certainement. Plus on est célibataire longtemps, plus on risque de vivre de mauvaises expériences et plus on sera sévère dans nos critères de sélection. Mais je pense qu’une autre croyance très contre-productive pour les célibataires est celle de la passion à tout prix, qui s’étend d’ailleurs à tous les domaines de la vie.

Et quelle est la croyance la plus dangereuse pour les personnes en couple?
Sans doute l’idée qu’«avec moi, il/elle va changer»: il peut arriver qu’après avoir passé des années à demander certains effort à l’autre, on se persuade que notre partenaire ne nous aime pas suffisamment pour les fournir. C’est dommage, car s’il y a bien des choses qu’on fait par amour, personne n’est irréprochable et l’amour de l’autre ne peut nous rendre parfait-e. On peut s’améliorer pour notre partenaire, mais nos grands idéaux ne changeront probablement pas, malgré notre bonne volonté. Il existe bien sûr des cas extrêmes à ne surtout pas tolérer, comme les contextes de manipulation, de violence, d’infidélité... Mais dans les situations concernant un simple petit défaut, l’impossibilité de faire exactement ce que l’autre souhaite ne signifie pas qu’une personne est moins amoureuse!

Les contraintes nous rendent-elles plus forts?
Les personnes que je rencontre représentent de beaux exemples: elles ont envie de se battre, parlent de leur difficultés et en ressortent plus fortes. Parfois nous sommes surpris quand une crise de couple apparaît après 15 ans de relation idyllique. J’observe que cela signifie souvent que l’un des conjoints n’a pas suffisamment fait entendre ses besoins, désirs et opinions. Il ou elle cherchait l’absence de conflit pour donner l’illusion d’un couple parfait mais au bout d’un moment il ou elle a eu besoin d’exister pleinement au sein de son couple et de pouvoir évoluer.

Quel est le conseil le plus important qu’on vous ait donné en matière de relations amoureuses?
Le fait de toujours disposer de petites bulles à deux, dans lesquelles on peut se libérer des contraintes et réexpérimenter une vraie relation hors du quotidien, avec un vrai lâcher prise. C’est essentiel à mes yeux, surtout pour les duos ayant des enfants. J’ai tendance à dire que les couples qui arrivent à s’octroyer cela régulièrement se retrouvent plus facilement lorsque la vie les fragilise.


Vous avez aimé ce contenu? Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir tous nos nouveaux articles!

Ellen vous suggère de lire aussi:

Notre Mission

Un esprit sain dans un corps sain! Ici, on booste sa forme physique et mentale grâce à des articles bien-être, santé et cuisine! Be happy!

Icon Newsletter

Newsletter

Vous êtes à un clic de recevoir nos sélections d'articles Femina

Merci de votre inscription

Ups, l'inscription n'a pas fonctionné