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Pourquoi l'engouement de la couture déferle

Tendance couture machine coudre

«A cause de la polyesterisation de notre société, on a dés-appris à raccommoder les vêtements ou à recoudre un bouton. Avec la couture, on redécouvre la tendance du moins mais mieux.» analyse Vincent Grégoire, chasseur de tendances à l’agence parisienne Nelly Rodi.

© Getty Images

Démodée, la couture? Oubliez vos a priori. Durant la période de confinement, beaucoup de gens se sont réinventés en pâtissier, en jardinier, mais également en couturier.

«On s’est rêvé en artisan dans cette poésie du désespoir», résume Vincent Grégoire, chasseur de tendances à l’agence parisienne Nelly Rodi.

Ainsi remarque-t-il une envie générale de faire davantage de choses soi-même, façon bridouilleur (pour bidouilleur et bricoleur). «On a repris le pouvoir en étant créatif. Il a fallu occuper son temps, mais on s’est vite rendu compte que les écrans n’étaient pas autant présents que ça, on a plutôt assisté à un boom des loisirs créatifs et à un besoin de partage d’expériences, décrypte-t-il. Certains ont ainsi ressorti la machine à coudre du placard, d’autres le fil et les aiguilles.»

Pour l’expert, cet engouement en faveur de la couture traduit également un besoin de revenir aux sources et un ras-le-bol de porter des habits confectionnés à l’autre bout de la planète. Il constate «qu’à cause de la polyesterisation de notre société, on a dés-appris à raccommoder les vêtements ou à recoudre un bouton. Avec la couture, on redécouvre la tendance du moins mais mieux, le plaisir des tissus, en déco comme en mode, analyse-t-il, comme le lin par exemple, idéal en nappe de repas dominicaux façon Jacquemus, ou encore la popeline, utilisée dans la confection des masques maison.» Pour lui, dans le monde d’après, on s’intéresse davantage au travail du retoucheur du bas de la rue, de sa voisine styliste ou encore aux formes de nos habits. Par ailleurs, le tendanceur note un essor de l’apprentissage de la couture, via YouTube bien sûr, mais aussi grâce à l’aide des aînés, quand cela est possible, «on a ainsi plaisir à recréer du lien intergénérationnel».

De Paris à la Suisse romande

Même son de cloche chez Sylvie Thonney, prof de couture à Yverdon, qui observe que les 20-30 ans reviennent effectivement beaucoup à la couture via les tutos. Très suivie sur les réseaux sociaux, on citera l’initiative de La Redoute, qui s’est associée en mai à l’instagrameuse Sarah Perez (@soozperez) pour proposer un pas à pas de masque en coton bio. D’ailleurs, l’ex-enseignante constate une démarche zéro déchet.

«Beaucoup de jeunes femmes, soucieuses d’écologie, me demandent des conseils pour confectionner des lingettes de maquillage lavables.»

Aussi, cette habituée du Repair Café yverdonnois, où elle partage notamment ses tuyaux pour faire des ourlets, remarque: «Les femmes de 40-50 ans sont davantage friandes de cours. Elles possèdent déjà des bases, mais veulent se faire plaisir en créant des vêtements.»

A Lausanne, Fabienne Coderey, responsable de la boutique Passion Tissus, relève que l’engouement général pour la couture, mais aussi pour le tricot, est nettement en hausse depuis plus d’une année. «Nous avons les étudiants de l’ECAL ou de l’ERACOM comme clients, bien sûr, beaucoup de fans de cosplay, mais aussi de plus en plus de jeunes femmes et de mamans qui viennent chercher tissus, élastiques, viseline [une toile thermocollante] pour coudre des masques, des accessoires ou des vêtements.» Face à une demande toujours plus grande, la courtepointière a eu l’idée de lancer des cours de couture dans le magasin: «On avait tout prévu en mars… puis tout s’est arrêté. On va les programmer le plus vite possible», raconte-t-elle. En attendant, si on n’a pas de machine à coudre, on peut y louer une place de travail pour 10 fr. de l’heure et lever la main si on a besoin d’un conseil. Si jamais, le pli de la couture, on le repasse…

© Alina Hvostikova / Unsplash

Tweed and cie

Et s’il fallait trouver un accroc à la couture? Ce serait peut-être son prix, car les tissus et le matériel ne sont pas réputés bon marché. Ainsi, faire un jean soi-même revient bien plus cher que d’en acheter un chez le géant suédois. Bien qu’on soit encore loin des coûts d’un abonnement annuel dans un club de golf, on vous l’accorde, les cours sont également assez chers. «Je ressens ce souci financier depuis un an, analyse Sylvie Thonney, c’est multifactoriel et c’est clairement le prix des cours qui dissuade. Ainsi, les ateliers Maniclette, gratuits et organisés par la ville d’Yverdon sont toujours complets.» En Suisse romande, il faut compter en moyenne 25 fr. de l’heure pour un cours tous niveaux et une dizaine d’heures pour apprendre à confectionner, par exemple, une robe estivale, calcule la prof.

Toutefois, pour les adeptes confirmés, la machine à coudre est un bon moyen d’accéder à un dressing proche du luxe à moindre prix.

«Je fais des vêtements que je ne peux pas me payer», confie ainsi Eva, la trentaine, passionnée de couture.

Avec sa maman couturière, c’est un vrai rituel, elles chinent tous les six mois des tissus invendus de grandes maisons de mode comme des tweeds griffés Chanel ou des soies Dolce & Gabbana. D’ailleurs, depuis deux ans, la graphiste polygraphe observe également autour d’elle un regain d’intérêt pour la couture, mais plus particulièrement dans l’approvisionnement des magasins dédiés. «Les merceries offrent davantage de diversité dans les boutons ou les fermetures», considère-t-elle, avant de conseiller l’Atelier Casquin, à Lausanne, idéal pour dégoter des pièces uniques. Son vêtement réalisé pendant le confinement? «Une robe cache-cœur vichy, répond la fan de broderies et de Gucci. En ce moment, je suis sur une combi pantalon». Vous aussi, vous songez sérieusement à devenir un(e) futur(e) Isabel Marant? Comptez entre 400 et 1000 fr. pour une machine à coudre. Pour les tissus à la mode cet été, même s’il paraît qu’il n’y a plus de saisons, on vous suggère quand même le Liberty, le pastel ou le vichy… à vos aiguilles!

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