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Memory... et miaou

Notre avis (surprenant) sur le film «Cats»

Critique cinema film cats adaptation comedie musicale decembre 2019

Judy Dench, Ian McKellen, Rebel Wilson, James Corden et même Taylor Swift se retrouvent dans un scénario aux airs de de concours de chant pour chats, plus vulnérables que s'ils n'avaient pas endossé leurs manteaux de fourrure digitale.

© DR

Avant de présenter mes arguments, je dois vous faire un aveu: je connais la comédie musicale «Cats» par cœur. Ce n'est pas une blague. J'entonne passionnément les ballades de Gus et Macavity dans ma voiture, je larmoie encore en écoutant «Memory», je voue un culte aux vers de T.S. Eliot (l'auteur du texte original) et j'avais très, très peur en allant m'installer dans la salle obscure pour découvrir l'adaptation de ce bijou aux codes d'Hollywood.

J'avais lu quatre, cinq, six critiques anglaises ou américaines, toutes terriblement négatives. Selon leurs auteurs (qui n'ont pas tous vu le spectacle d'origine), le film ne méritait ni ronronnement, ni boule de poils. Une catastrophe incompréhensible, moche, impossible à suivre, trop bizarre, pas assez bizarre, et j'en passe. Je m'attendais à grimacer d'horreur en découvrant les étranges costumes qu'arborent les «chats», des espèces d'humanoïdes miniatures, dotés de fourrure digitale, d'un visage mi-félin, mi-humain et de dix doigts dépourvus de coussinets. Il arrive même que Jennyanydots, le chat campé par Rebel Wilson, se prenne pour une poupée russe et ôte tout simplement sa combinaison velue, révélant une tenue de scène parsemée de sequins (attendez, il y a combien de couches, là-dessous?!).

Donc oui, c'est vrai, les costumes sont bizarres. Oui, c'est vrai, l'histoire n'est pas aussi étoffée que celles d'autres blockbusters. Oui, c'est vrai, le film est constitué à 90% de chansons, signifiant que seuls les fans de comédies musicales pourront l'apprécier. Oui, c'est vrai, les chats ne sont pas vraiment des chats, malgré le titre de la production qui ne pourrait être plus direct. Tout ça, c'est vrai. Et pourtant, c'est un chef d'oeuvre.

L'étrangeté du film est un hommage

«Cats» est un monument. Un classique joué dès 1978 et composé par le brillant Andrew Lloyd Webber (père du «Phantom of the Opera»), porté par des acteurs maquillés, costumés, en sueur sur des planches de bois et dansant parmi des décors en carton. La magie de «Cats», c'est le texe de T.S Eliot («Old Possom's Book of Practical Cats», 1939) et les personnalités mi-félines, mi-humaines de ses personnages moustachus. Revoir ce genre de production, à l'ère du «tout-est-possible-avec-un-ordinateur», c'est se demander si les costumes velus ne devraient pas être remplacés par de véritables minois chats, en 3D, qui attendriront la planète entière. Le film aurait pu devenir crédible et usuel, adapté aux attentes du public moderne. Mais le spectacle en aurait perdu toute sa magie.

Tom Hooper a donc choisi de faire tout l'inverse, offrant au show classique un léger lifting. Seule la fourrure et les décors sont digitalisés. Le reste, c'est comme à Broadway, avec des visages humains, des voix quasiment dépourvues d'effets, des doigts qui dépassent des costumes, des pas de danse parfois maladroits, des chats dressés sur leurs pattes arrière et des allers-retours à quatre pattes complètement gênants (parce que la vue d'un humain qui rampe a quelque chose de foncièrement dérangeant).

Sage décision? À nos yeux, oui. Le respect du classique est touchant. Les visages de ces très grands acteurs (Judi Dench et Ian McKellan, entre autres) sont ainsi parfaitement reconnaissables. Et ainsi semi-déguisés, face à un jeu d'acteur qui ne leur est pas habituel, ces comédiens de talent se montrent plus vulnérables que s'ils n'avaient pas endossé leurs manteaux de fourrure. Ian McKellan est renversant, Judi Dench est royale. Certes, ils ne sont pas tous des chanteurs nés. Mais au fond de leurs yeux brille la joie de jeunes enfants qui s'amusent et prennent des risques dans ces rôles difficiles, si excentriques qu'ils en deviennent brutalement vrais, comme dans un rêve inexplicable, un dessin aux tracés grandiloquents, difficiles à rationaliser. Car au même titre qu'un tableau de Dali, «Cats» ne se rationalise pas.

Mais les avis divergeront certainement selon un point particulier: si vous avez vu (et aimé) la comédie musicale, ou non.

Pour ceux qui n'ont pas vu la comédie musicale originale

Quelques mots sur l'intrigue, afin que vous ne terminiez pas cet article avec l'impression de n'avoir rien compris: «Cats» met en scène le rassemblement d'une bande de félins surnommés les «Jellicle», à l'occasion de leur grand bal annuel. Cet événement très attendu consiste en une sorte de concours de chant, qui accueille même la très âgée et honorable cheffe du groupe (Judi Dench). Chaque candidat est appelé à se présenter en musique, dans l'espoir d'être choisi par la cheffe et envoyé au Paradis des chats, où l'attend une toute nouvelle vie. On ne comprendra jamais vraiment pourquoi ces chats rêvent de s'envoler vers les cieux ou si neuf renaissances de ce genre les attendent tous. Un peu macabre, on vous l'accorde. Mais quoi qu'il en soit, chaque personnage félin se prête à un spectacle musical personnalisé, dans lequel il raconte sa vie et présente son caractère. Une sorte de «The Voice» version féline, avec des textes si raffinés qu'on a envie de les apprendre par cœur.

Si vous êtes anglophone et/ou féru de littérature, écoutez-bien les paroles en version originale: elles constituent le clou du spectacle, tout autant que la musique. Mais sachez que l'univers de «Cats» est étrange, d'autant plus avec de tels costumes hybrides. Si vous n'aimez pas les comédies musicales, n'y allez pas. Et si vous décidez d'y aller, ayez l'esprit ouvert, pensez que vous vous apprêtez à visionner un spectacle à Broadway. Acceptez que les chats ne ressembleront pas à de vrais chats, mais faites plutôt la connaissance d'un nouveau type de félin: les «Jellicle Cats».

Pour ceux qui ont vu la comédie musicale originale

Si vous n'avez pas aimé le spectacle originale, n'y allez pas. Non, vraiment, croyez-moi. Et si vous l'avez aimé, sachez que le film vous plaira probablement moins que le spectacle.

Toutefois, si vous avez déjà «saisi» l'univers de «Cats» sur les planches, vous le saisirez à nouveau au cinéma. Vous serez certainement enchantés de retrouver les personnages sous un autre angle, ainsi que les quelques ajouts subtils, destinés à solidifier la trame de l'histoire pour l'adapter au cinéma. Fans de poésie, impossible de vous lasser de ces vers rebondissants!

À notre humble avis, des musiques aussi incroyables que celles-ci ne sauraient être gâchées par des costumes, même les plus affreux qui soient. Dans le cas de «Cats», elles sont ingâchables.

Et Taylor Swift, dans tout ça?

La célèbre chanteuse de 30 ans, complètement gaga de ses propres chats domestiques, campe ici le rôle de Bombalurina, une chatte sensuelle qui finit par berner tout le groupe. Son rôle est petit, mais elle assure deux chansons, dont une complètement inédite: intitulée «Beautiful Ghosts», celle-ci semble être la suite logique du phénoménal «Memory» et nous a donné des frissons.

Le film a évidemment fait de Taylor la star de sa campagne de publicité, bien que ses apparitions soient plutôt brèves. Elle fait son petit show, tout en fraîcheur et en prouesses vocales. Elle ne devrait être l'unique raison qui vous pousse à découvrir le film, mais y ajoute néanmoins une belle touche de talent pur.

Si vous avez lu jusqu'ici, n'hésitez plus: les Jellicle Cats vous attendent de patte ferme! Vous allez ronronner...

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