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Premier roman

Karin Suini, les promesses d’une modeste

Premier roman karin suini les promesses dune modeste

«Les souvenirs de mon héroïne sont les miens. J’ai beaucoup voyagé, je suis partie seule, j’ai fait des rencontres insolites, j’avais envie de retourner sur mes pas. Et je voulais aussi raconter la trace des petites choses.» - Karin Suini

© Sebastien Agnetti / Mise en beauté Sandrine Thomas

Elle arrive au bureau et on dirait une danseuse, échappée d’un corps de ballet. La foulée décidée, le port de tête haut et le sourire juvénile, Karin Suini, 42 ans, sort un premier roman prometteur. Vous ne la connaissez pas encore? Normal, elle a passé sa vie à mettre des mots sur la parole des autres.

Journaliste dans une première vie, elle commence à Radio Lac, y apprend l’écriture de radio, un apprentissage exigeant. Puis migre à la RTS, même vue sur les eaux argentées du Léman, mais du plateau de la Sallaz et des studios de Couleur 3. Elle y présente le journal du matin avec une bande de drilles (Yann Zitouni, Vincent Kucholl, Valérie Paccaud). «Une période magnifique, dit-elle. On finissait à 11 h et on partait skier.»

Entre les levers aux aurores et les après-midi qui s’étirent, elle se met à écrire sur un petit cahier rose sorti tout droit de l’enfance. Elle a vingt-neuf ans, les mots lui servent à se dire ce qu’elle est. Elle y reviendra, nous aussi. Mais avant ça, Karin rêve à des horizons plus lointains, vise la diplomatie. «Je faisais partie de la dernière volée qui a eu un entretien avec Micheline Calmy-Rey, le jour où elle a été élue présidente de la Confédération.» Reçue, elle part à Berlin, y passe une année dont elle garde un souvenir un peu douloureux et une bonne maîtrise de l’allemand.

Quand Ueli Maurer, en charge du département militaire, cherche une porte-parole, elle présente sa candidature. «Il n’y avait aucun Romand dans son équipe. Jeune, femme, urbaine, je n’avais pas vraiment le profil. Mais je me suis bien entendue avec lui. Il nous faisait confiance, nous demandait notre avis.» Pendant ce temps, les mots qu’elle a griffonnés sur son cahier d’enfant sommeillent quelque part, dans un tiroir. Ueli Maurer part s’occuper des finances fédérales, Karin Suini travaille pour Guy Parmelin qui lui succède. Elle y reste trois ans, près de six à travailler pour des UDC. «J’assume d’être passée par là. J’ai toujours aimé sortir des sentiers battus».

© Sebastien Agnetti / Mise en beauté Sandrine Thomas

Héroïne qui perd la mémoire

À ce moment-là, Karin a oublié jusqu’à l’existence de ce roman esquissé à vingt-neuf ans, elle est happée par une nouvelle fonction, cheffe d’état-major du secrétaire d’État aux affaires européennes Roberto Balzaretti. Il s’agit de présenter l’accord-cadre au monde politique et à tous ces gens qui slaloment entre «Il faut que» et «il n’y a qu’à». Aujourd’hui, la direction des affaires européennes a disparu, l’accord-cadre aussi, et Karin Suini travaille pour Présence suisse, aux côtés de Nicolas Bideau, autre «figure inspirante».

Dans le train qui l’amène de Lausanne à Berne, elle couche des mots, suit des ateliers d’écriture, et reprend le carnet qui abritait les germes d’un roman, il y a douze ans de ça. Elle retravaille son texte, lui donne une nouvelle amplitude romanesque. La promesse de l’Ogre (Ed. Mon Village) se passe à Payerne, ville de son enfance, son héroïne perd la mémoire, et tente de retenir des souvenirs qui lui échappent jour après jour. Raconté comme ça – une ville vaudoise souvent pétrifiée par le brouillard, une femme atteinte de l’alzheimer – on croirait entrer dans une histoire triste.

«Je m’intéresse à tout, aux odeurs, aux lumières, aux gens.»

Karin Suini

autrice

Au contraire, le roman pétille de vie, de gaîté et de la détermination de l’écrivaine à prendre des risques, à partir à l’aventure, à oser arpenter des chemins inconnus. «Les souvenirs de mon héroïne sont les miens. J’ai beaucoup voyagé, je suis partie seule, j’ai fait des rencontres insolites, j’avais envie de retourner sur mes pas. Et je voulais aussi raconter la trace des petites choses. Je m’intéresse à tout, aux odeurs, aux lumières, aux gens. La matière première du roman vient de moi.»

Karin Suini est d’une nature réservée, son rire est une armure. Et là, elle publie un livre qui l’expose. «Oui, écrire est aussi un processus égocentrique. Mais je suis fière d’y être arrivée. Je n’ai pas renoncé. Maintenant je m’autorise à écrire. Faire paraître ce roman m’a libérée du besoin de reconnaissance.» Remplie de mots qui courent dans sa tête, Karin Suini sème les cailloux de son joyeux destin, nous raconte en se racontant. On a envie de la suivre et de marcher dans ses pas.

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