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Club mythique: Macumba, le rêve américain

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Ringard, le Macumba? Chaque week-end, plus de 5000 noctambules venaient en tout cas y faire la fête, attirés par le phare lumineux et l’enseigne scintillante.

© Lucien Fortunati

«Oh Macumba, Macumba, elle danse tous les soirs pour les dockers du port, qui ne pensent qu’à boire…» Le single du chanteur toulousain Jean-Pierre Mader caracole en tête du Top 50. Nous sommes en 1985. Signe des grands classiques, le refrain ne tarde pas à être détourné à toutes les sauces dans les cours de récréation. Surtout, c’est par le biais de cette chanson que de nombreuses personnes apprennent l’existence de la discothèque portant le même nom, le Macumba. Situé à Saint-Julien-en-Genevois, en France voisine, le Macumba est la Mecque des discothèques multiplex telles qu’elles sont conçues durant la décennie aux couleurs du Rubik’s Cube (oui, les fameuses années 80). Jamais oubliées, souvent imitées, jamais égalées. Flash-back.

Celles et ceux qui ont vécu leur jeunesse pendant cette période se souviennent des défis contre la loi de la gravitation comme si c’était hier: les mèches tenant en l’air grâce à Elnett, la laque des stars; les blazers aux manches retroussées et leurs larges épaulettes esquissant des silhouettes graphiques; l’esthétique de Jean-Paul Goude, le réalisateur de pub super-star qui fait reprendre à l’accordéon La Vie en Rose à son amoureuse Grace Jones avant de la faire cracher puis avaler une Citroën CX dans le légendaire spot TV en 1984. Les années 80, c’est avant tout la décennie de la variété française.

© Lucien Fortunati

Compil’ sur cassette

Pendant que les ados se partagent leurs mixtapes sur cassettes des tubes qui passent sur Radio Thollon, Stéphanie de Monaco, Indochine, Niagara, Jeanne Mas et Axel Bauer squattent les premières places des hit-parades. Leurs 45 tours partent comme des petits pains et atteignent des records de ventes inégalés depuis. Entre Goldorak et Fame, Star Wars et La Boum, c’est dans ce contexte insouciant en surface que la génération X – à laquelle Mylène Farmer rend hommage dans son hymne au spleen Désenchantée – découvre le night-clubbing, ses codes vestimentaires, ses techniques de drague et… les slows, évidemment!

Durant cette décennie, le slogan du Macumba est «le plus grand ensemble de discothèques d’Europe». Et c’est vrai.

La saga du Macumba est digne d’un scénario de Hollywood-sur-Annecy. Fasciné par la chaîne de restaurants de fast-food McDonald’s qu’il a découverte aux Etats-Unis, Roger Crochet décide de décliner le concept à des discothèques. Fort du succès de son premier Macumba ouvert à Lille en 1975, le natif de Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie) remet ça deux ans plus tard en construisant le complexe qui restera le plus grand de toute la chaîne. Lorsqu’il se lance dans l’aventure de la nuit, le coiffeur de formation n’en est pas à sa première expérience. Avant cela, il se fait la main avec la création des «Coifferies», sa chaîne de cinquante-trois salons parisiens, et il ouvre dans la foulée le premier fast-food en France en 1966.

Moins d'une année après la fermeture définitive du Macumba le 28 mars 2015, son fondateur Roger Crochet sortait ses mémoires, «Mes Macumbas - Comment j'ai magnifié la nuit» (Ed. Favre). Le livre revient sur sa vie incroyable, faite de rencontres providentielles et de passions. Il est décédé dans sa 88e année, le 24 juin 2016.© DR

Rencontre avec le crooner

Ebloui par son rêve américain, sa passion lui fait pousser des ailes. Dans cette philosophie de vie glorifiant l’ambition, tout devient possible. C’est son propre père, agriculteur reconverti en ingénieur des ponts et chaussées, qui lui transmet l’amour des Etats-Unis. Lors de son premier voyage avec lui, il visite Los Angeles, New York et Las Vegas. Le jeune homme est ensorcelé par tant d’immensité. C’est un géant du showbiz qui va changer sa vie: Frank Sinatra, le crooner des crooners, qu’il rencontre via un ami commun dans un bar à Beverly Hills.

A travers ses échanges avec la star, Roger Crochet ressent la puissance de la culture américaine et flaire le potentiel encore inexploité en Europe.

«J’avais contacté McDonald’s pour lancer la chaîne en France. Ils m’ont répondu: «On ne fera pas boire du Coca aux Français, c’est trop tôt. On ira dans dix ans», se remémore l’entrepreneur dans les colonnes du magazine «Society» à la fermeture du Macumba, en 2015. Son empire, ça sera donc les discothèques.

Durant près de quatre décennies, 5000 amoureux de la nuit se retrouvent inlassablement chaque week-end au Macumba, tous âges confondus et fans de tous styles de musique. Lieu populaire revendiqué, l’enseigne se fout pas mal de son image ringarde qui fait ricaner le snobisme ambiant. Racheté par le groupe Migros à sa fermeture pour en faire un centre commercial, le terrain semble aujourd’hui à l’abandon. Toujours au front, Roger Crochet tiendra boutique jusqu’à la dernière soirée en 2015, âgé alors de 87 ans.

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