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Ana Ford: La voix et la plume de la rappeuse genevoise

Ana ford la voix et la plume de la rappeuse genevoise

«Je me retrouve parfois face à des hommes arrogants qui veulent m’apprendre mon métier, du pur mansplaining», partage la rappeuse genevoise, Ana Ford.

© Pascal Greco

Quand on appelle Ana Ford pour préparer cet article, on lui donne l’option de se téléphoner ou de réaliser l’interview par vidéo. La rappeuse nous dit franchement qu’elle a besoin de voir les gens pour leur parler. Comme on la comprend, après cette année si particulière. A l’écran, la Genevoise, 30 ans tout rond, n’arbore pas le même look que dans ses deux premiers clips, Ni mariés ni refrés et Baghdad, comme en photo ci-contre.

En tenue de yoga, coiffée de boucles blondes, un brin façon Flashdance, Ana Ford nous raconte que son nom de scène évoque l’époque où on la surnommait Ananas à cause de son chignon XXL, mais aussi son pseudo dans un jeu d’échecs en ligne. Le Ford n’a pas vraiment d’anecdotes, «juste parce que ce nom claquait».

Ana Ford, c’est l’histoire d’une jeune femme qui a toujours côtoyé la scène. «Je fais du théâtre depuis toute petite», confie-t-elle. Cours d’improvisation, d’interprétation au conservatoire, leçons de solfège et de violon (à seulement 6 ans!), apprentissage du piano de façon autodidacte… Ana tombe dans l’art dramatique et dans la musique très jeune, à l’âge où la plupart des autres enfants apprennent tout juste à faire du vélo. A bonne école avec sa maman qui écrit et met en scène des pièces de théâtre, elle joue même dans l’opéra Les Enfants du Levant.

Inspiration MC

Vers 17-18 ans, Ana Ford sort, croise une multitude de gens. «C’est à cette époque que j’ai commencé à côtoyer beaucoup de MC (maîtres de cérémonie). Je voyais beaucoup de personnes rapper. Je trouvais cela génial et j’avais envie de faire pareil.» Elle enchaîne les soirées hip-hop et, un soir en rentrant chez elle, l’adolescente commence à créer des instrus sur YouTube. «Ça me venait de façon très naturelle», partage-t-elle. Puis la fan de Fugees et d’Eminem – éduquée musicalement par sa maman, également fidèle au rap US – commence à écrire des chansons, en solo dans sa chambre.

Avance rapide sur aujourd’hui. Ana Ford a sorti deux titres de rap. Dans ses productions soignées – de vraies petites pièces de théâtre – on sent la passion créative qui l’anime. «Quand j’écris une chanson, je ne vois pas seulement la musique, je suis tout de suite dans la réjouissance de penser au scénario du clip et de tout ce qui va autour.» Dans la vidéo graphique et très étudiée de Ni mariés ni refrés, elle confie avoir eu envie de montrer son «côté badass», en totale opposition avec son costume qui mêle talons aiguilles et string «à la Borat». «Je trouve les femmes fascinantes, enchaîne-t-elle. Je trouve très intéressant notre côté très doux mais aussi notre autre côté patronne. Je voulais montrer cette dualité dans ce clip.» Un peu étonnée de ne pas encore avoir reçu de commentaires haineux sur les réseaux sociaux, elle rappelle que «cette chanson dénonce la masculinité toxique, la culture du viol et le sexisme à tous les niveaux».

Femme et rappeuse

Quand on lui demande à quoi cela ressemble d’être une femme dans le milieu du rap, Ana Ford répond que ça ne change pas tant que de l’être dans un autre domaine. Pour elle, «les femmes sont toujours relayées au second plan, en étant moins payées notamment».

Si le rap, hélas, revendique encore la misogynie et le sexisme, elle se félicite de pouvoir y mettre son «coup de peinture», même si ce n’est pas facile tous les jours.

«Je me retrouve parfois face à des hommes arrogants qui veulent m’apprendre mon métier, du pur mansplaining.»

Outre le sexisme, la musicienne aime traiter d’autres thèmes plus personnels, comme les blessures de l’amour. Dans Baghdad, elle chante, «J’ai une mère qui me console quand j’ai le cafard», et reconnaît que cette parole «vient du cœur». «J’ai vraiment de la chance d’avoir la maman que j’ai. Elle me soutient dans tout ce que je fais, elle croit en moi, elle vient aux concerts, elle like mes vidéos sur les réseaux sociaux», énumère-t-elle, le sourire aux lèvres. Sur un ton plus dur, Ana Ford aime traiter également certains travers ou addictions (drogue, nourriture, relations) qu’elle observe dans son entourage. «Des sujets qui me touchent car je me sens concernée», concède-t-elle.

Grand corps sensible

Hypersensible, «une force mais aussi une vulnérabilité», Ana Ford confie qu’elle a toujours trouvé plus facile d’écrire ou de chanter ses mauvais jours, plutôt que d’en parler ou de demander de l’aide. «L’art me permet de canaliser cette hypersensibilité et de la retranscrire de façon positive, cela m’aide également à ne pas rester enfermée dans un flot de pensées.»

En dehors de la scène rap, Ana Ford est Nasma Moutaouakil, comédienne, reconnue notamment pour son interprétation dans la pièce Les Séparables, mise en scène par Dominique Catton et Christiane Suter au théâtre genevois Am Stram Gram, en 2018. Côté théâtre, on pourra la voir au festival des Francophonies, à Limoges. Dans la pièce Chaos, elle joue une femme broyée par le conflit israélo-palestinien qui doit quitter son pays pour tout recommencer à zéro, loin des siens. La pièce, une production quasi entièrement féminine, sera visible en novembre au théâtre genevois Pitoëff. Côté rap, l’artiste souhaite faire connaître davantage son univers musical et rêve à d’autres chansons. En préparation d’un EP? «Rien n’est sûr, rien n’est écrit», conclut-elle.

Plus d'infos sur son compte Instagram Ana Ford.

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