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Pourquoi la basket éco-responsable cartonne autant

En août 2020, la marque zurichoise On s’associait à Roger Federer pour lancer une toute nouvelle basket. Un modèle au design sobre, fait de cuir au tannage végétal. Le stock de la Roger – c’est son nom – s’est écoulé en quelques clics. Oui, la chaussure éco-responsable est en vogue, même quand elle n’est pas vendue par une star du tennis. PET recyclé, textiles bios ou bio-polymères, les fabricants s’efforcent de proposer des alternatives aux matières polluantes.

D’ailleurs, le marché s’agrandit. Comme le souligne un rapport publié par Tagwalk, un moteur de recherche spécialisé dans la mode, les collections automne-hiver 2020-21 comptaient 335 silhouettes entièrement éco-responsables, soit une augmentation de 111% par rapport à l’an dernier. Et le consommateur ne demande que ça, puisque 64% des Européens souhaiteraient acheter des articles fabriqués à partir de matériaux écoresponsables, tandis que 30% seraient même prêts à dépenser plus pour ça. C’est ce que montre une étude conjointe de l’IFM, qui forme les futures têtes pensantes de la mode, et de Première Vision, spécialisé dans l’organisation de salons professionnels. Le rayon baskets n’échappe pas à un phénomène qui promet de prendre encore de l’ampleur.

Journaliste et consultant spécialisé dans la mode, Stéphane Bonvin estime ainsi qu’«au fond, la vogue de la basket eco-friendly obéit au mécanisme de toute mode: la tendance naît dans les marges, devient un signe de ralliement identitaire auprès d’une petite minorité. Petit à petit, elle touche plus de monde, jusqu’à devenir mainstream; mais, en même temps, elle se vide de son sens.»

Certains clients, estime-t-il, s’achètent désormais une bonne conscience en s’appropriant un produit durable. «On pourrait très bien imaginer des gens qui brûlent un max de carbone pour aller faire la fête au bout du monde, mais exhibent en même temps des baskets véganes», ajoute Stéphane Bonvin.

On joue sur les mots

Effet de mode ou tendance plus durable, l’écologie est en tout cas au cœur des préoccupations du consommateur et de l’industrie textile. Entre matières recyclées, bios ou végétales, les marques définissent désormais leurs créations comme étant éco-responsables ou véganes. Mais au fond, quelle est la différence entre ces deux termes?

«Eco-responsable veut dire que la marque a mis en place des démarches pour réduire son impact environnemental. Ça peut passer par les modes de fabrication de l’entreprise, comme réduire sa consommation d’eau ou d’électricité», précise Carine Montarras, cheffe de produit mode chez Première Vision.

Le choix des matières, leur origine et leur traçabilité s’inscrivent également dans cette démarche responsable. «Il y a toute une nouvelle génération de matériaux fabriqués avec des matières bio-sourcées, c’est-à-dire issues de déchets végétaux. C’est le cas par exemple du Piñatex, issu de fibres d’ananas compactées», poursuit Carine Montarras. La notion d’éco-responsabilité inclut donc le terme végane, le mot faisant référence à un produit dépourvu de matière animale et de substances dérivées du pétrole.

Encore faut-il se méfier des abus d’utilisation de cette expression en vogue, estime Igor Robinet-Slansky, responsable presse chez Première Vision: «Lorsqu’on parle de matériaux véganes, la signification du terme peut être très variable selon les entreprises. Certaines disent faire des produits véganes, alors qu’il s’agit de PVC, une matière à 100% issue de la pétrochimie.» Difficile de parler d’éco-responsabilité dans ce cas, même si l’origine n’est pas animale. Carine Montarras met en aussi garde sur l’utilisation du terme cuir végétal, qui s’affiche sur certaines étiquettes:

«C’est un non-sens. Soit on parle de cuir au tannage végétal, donc traité avec des tanins d’origine végétale, soit il est question de matières alternatives au cuir.»

Enfin, elle rappelle opportunément que le cuir animal est une des plus anciennes formes de recyclage.

Le prix de l’engagement

Reste que si certains labels indépendants excellent dans la création de produits durables, chez les géants de la distribution l’offre est plus timide. «Créer une seule basket éco-responsable demande déjà beaucoup de recherche et développement, répond Igor Robinet-Slansky. Mais changer l’entier d’un processus de production exige un investissement énorme.» Par ailleurs, à leur fondation, les géants de la grande distribution n’ont pas intégré de business model durable, contrairement à des labels indépendants arrivés récemment sur le marché, comme Veja par exemple.

«L’argent que ces marques gagnent est réinvesti dans la recherche et le développement, dans le salaire des ouvriers», précise Marie N’Guyen, co-fondatrice du site de vente en ligne We Dress Fair. «Elles préfèrent miser sur du concret plutôt que dans la communication et le marketing.»

Pour l’instant, seule l’industrie du luxe peut jouer sur les deux tableaux.

«Pour les marques de très haut de gamme, comme Stella McCartney, les coûts induits ne sont pas importants. Leurs clients sont prêts à payer le prix, même si l’innovation coûte cher à la marque», ajoute Igor Robinet-Slansky.

Dans le prêt-à-porter, les modèles de baskets vertes prolifèrent néanmoins, lentement mais sûrement. En attendant que l’industrie devienne majoritairement durable, voici quelques marques à suivre pour leur engagement éthique et durable.

5 marques engagées à suivre de près

VEJA, la pionnière de la chaussure écologique

En brésilien, Veja, signifie regarde. La marque est fondée en 2004 par Sébastien Kopp et François-Ghislain Morillion, deux amis diplômés en management et sensibles à l’écologie. La particularité de la marque? «Le label travaille avec un caoutchouc naturel sauvage. Il collabore avec des coopératives au Brésil, qui payent des ethnies locales pour ramasser le caoutchouc au sein même de l’Amazonie, sans pour autant détruire la forêt», explique Marie N’Guyen, co-fondatrice de la plateforme We Dress Fair. Pour aller plus loin dans sa démarche circulaire, Veja a ouvert une boutique à l’espace Darwin, à Bordeaux. Ce lieu d’expérimentation est dédié à la réparation des modèles achetés par les clients car, comme l’indique leur slogan, «les baskets les plus écologiques sont celles que vous portez déjà».

Baskets blanches avec empiècements kaki, semelle beige et texte doré.
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Modèle Campo, env. 150 fr. sur wedressfair.fr et sur veja-store.com

© DR

Baabuk, l’ami des animaux

Basée en Suisse, Baabuk est une entreprise familiale, spécialisée dans la création de chaussures en laine bio-dégradable. La matière provient du nord du Portugal où une usine textile récupère la laine des moutons vivant dans un parc protégé. Parce que le bien-être des animaux est respecté et pour qu’ils ne souffrent pas de mutilations, la matière employée est certifiée anti-mulesing (une mutilation brutale exclusivement pratiquée en Australie et en Nouvelle-Zélande, destinée à empêcher l’apparition de la myiase dans les plis de la peau du mouton). Enfin, cette collaboration permet de faire revivre l’économie et le savoir-faire de la région. La start-up emploie aussi une qualité de laine provenant d’une race de moutons valaisanne, le nez noir. Dotés de propriétés hydrofuges, thermorégulatrices et respirantes, les baskets Baabuk peuvent être portées toute l’année. Aux collections s’ajoutent une série d’accessoires, comme des patches thermocollants permettant de réparer les chaussures et de les faire durer plus longtemps.

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Modèle Sky Wooler, 125 fr. sur baabuk.ch

© DR

Yatay, l’alternative à la pétrochimie

Un tissu en bio-polymères obtenu à partir de céréales comme le maïs; une doublure respirante issue de pulpe d’arbre; une semelle en polyuréthane bio et des lacets en chanvre, tels sont les ingrédients qui composent les modèles signés Yatay, un jeune label fondé par Umberto De Marco en 2018. Cet ancien spécialiste du cuir synthétique s’est donné pour mission de fusionner la meilleure qualité Made in Italy avec la technologie de mode verte la plus avancée. A l’issue de deux ans de recherches, il développe des sneakers au style intemporel, unisexes, confortables et véganes à 100%. Approuvée par PETA, la marque s’engage à planter un arbre pour chaque paire vendue.

Basket montante noire en matière végétale avec lacets en corde beige.
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Modèle Neven High, env. 310 fr. sur yatayatay.com

© DR

UMÒJA, le naturel lié au savoir-faire ancestral

Valoriser l’artisanat africain, respecter l’humain et son environnement. Ce sont les défis que s’est lancés la marque, qui signifie unité en swahili. Depuis 2017, les deux créateurs de ce label, Lancine Koulibaly et Dieuveil Ngoubou, proposent des modèles alternatifs qui allient style et éco-responsabilité. Pour leurs produits, l’utilisation du cuir animal et de la teinture artificielle est bannie. Seuls des matériaux naturels sont acceptés: coton bio, raphia, textile d’écorce d’arbre, liège, mais aussi teinture à base de minéraux et de végétaux. Ainsi, Umòja s’inscrit parmi les premières marques de chaussures utilisant des matières naturelles brutes et bio-sourcées.

Basket en textile indigo avec motifs bleu clairs, semelle en liège beige et caoutchouc noir et blanc.
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Modèle Lepi, env. 110 fr. sur umoja-shoes.com et chez WUA LABoutique, rue des Grottes 32, 1201 Genève.

© DR

Oth et sa semelle inusable

«L’idée du projet OTH m’est venue en voyant une énième photo d’enfant africain portant des sandales découpées dans un pneu et tenant avec une ficelle», explique Arnaud Barboteau, fondateur de ce jeune label français lancé en 2018. Ce déclic amène l’entrepreneur à concevoir des chaussures à partir de matériaux recyclés, comme le caoutchouc et des chutes de cuir provenant de gants de jardin. La marque se fournit également en cuir italien, mais opte pour des usines suivant la réglementation européenne REACH, interdisant l’utilisation de produits toxiques comme le chrome hexavalent. Enfin, le label produit ses modèles en Europe pour le marché européen. Avec leur design minimal, ces sneakers sont faites pour durer.

Basket blanches avec empiècements beiges et marine.
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Modèle Glencoe, env. 180 fr. sur wedressfair.fr et sur oth-paris.com

© DR

Le Coq Sportif, le virage écologique

Le Coq Sportif a lancé une nouvelle gamme de chaussures créées à partir de fibres de raisin. Leurs noms? Nérée et Gaïa. Leurs tiges sont obtenues à partir des résidus non utilisés des grappes. L’innovation a été réalisée en collaboration avec l’entreprise italienne Vegea, spécialisée dans les bio-polymères. Pour une production plus respectueuse de l’environnement et dans le but de réduire son empreinte carbone, l’équipementier français revoit sa façon de produire depuis plusieurs années. La marque source ses matières premières en Italie et fait fabriquer ses modèles au Portugal et en France. Enfin, la marque s’engage à ne plus utiliser de dérivés du pétrole dans ses collections.

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Modèle Gaïa, 139 fr. sur lecoqsportif.com

© DR

Quelques certifications à connaître

Tendance et engagé, le site de vente en ligne We Dress Fair est spécialisé dans la mise en avant de labels durables.

«On veut des marques qui soient réellement engagées dans cette démarche et qui soient impliquées sur la totalité de leur production. Par conséquent, nous demandons qu’au minimum 70% des produits présentés soient faits de manière éco-responsables», explique Marie N’Guyen, co-fondatrice de la plateforme.

Pour les néophytes en matière d’éthique et d’écologie, le site regorge d’une grande quantité d’informations utiles. En témoigne une rubrique qui décortique les différents labels de mode. Ceux-ci garantissent l’engagement réel des marques et usines produisant les vêtements. Quelques exemples.

GOTS: Global Organic Textile Standard est un label qui certifie non seulement des conditions de travail dignes, mais également le respect de l’environnement, et garantit qu’un produit n’atteint pas la santé de ceux qui le portent.

BLUESIGN: Interdiction des substances toxiques pour les hommes et l’environnement, optimisation des ressources, gestion des déchets: le label bluesign propose une approche globale afin de garantir transparence et traçabilité.

GRS: Le Global Recycled Standard certifie non seulement le contenu recyclé d’un produit, mais vérifie aussi le respect de critères environnementaux et sociaux.

FAIRTRADE: Le système Fairtrade permet d’offrir aux coopératives de petits producteurs l’assurance d’un prix juste et stable pour leurs produits, ainsi que des relations commerciales plus durables par le biais de plusieurs labels. Il vérifie aussi la structure de l’organisation, ainsi que les mesures mises en place pour la protection de l’environnement et la sécurité des employés.

PETA: People for the Ethical Treatment of Animal est une association internationale à but non lucratif qui œuvre à protéger le droit et la dignité des animaux. La certification PETA garantit que les produits ne contiennent aucune matière animale.

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