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Thierry Marx: «La cloison entre gastronomie et cosmétique n’est pas étanche»

Thierry Marx Shiseido gastronomie et beaute

Fan de culture japonaise et soucieux du futur de la planète, le chef français Thierry Marx nous a parlé développement durable, beauté grecque, marxisme et mottainai, l'art de recycler les déchets.

© Miguel Medina / GettyImages

FEMINA On vous a vu dans de multiples collaborations parfois étonnantes, mais la beauté, on ne l’avait pas vu venir!
Thierry Marx: Vous dites cela parce que vous ne me trouvez pas beau, c’est ça? Je vais vous raconter la genèse du projet. Depuis 2006, je m’intéresse à la gastronomie moléculaire, non pas comme une tendance mais comme un outil de compréhension pour évoluer. Rejoints par un certain nombre de scientifiques, nous imaginons quelle sera l’alimentation de 2050. Au vu de l’état de la planète, pour avoir une bonne gastronomie, nous nous sommes penchés sur les problématiques de la terre et de l’agriculture.

Nos travaux pour l’espace et Thomas Pesquet nous ont aussi amenés à réfléchir au stress hydrique et à ses solutions. En travaillant sur la capacité à prélever des eaux végétales, notre univers a croisé celui de la cosmétique. Comme je l’explique souvent, la cloison entre la gastronomie et la cosmétique est non étanche.

Que vous preniez un produit, que vous transformiez en plat parce que vous êtes un chef, ou que vous preniez une lotion ou une crème à appliquer sur la peau, on reste dans un axe très simple, connu depuis l’Antiquité grecque, qui est plaisir-bien-être-santé.

Mon univers a ainsi croisé celui de Shiseido, non pas que Shiseido ait essayé de faire de moi une icône de la beauté grecque, ce qui aurait été beaucoup trop compliqué, mais plutôt dans une quête commune autour de notre impact social et environnemental.

A quel point vous êtes-vous impliqué dans le développement de la gamme Waso?
Dans toute collaboration, il y a ce que j’appelle la stratégie du tiroir. Dans le premier, on apprend à travailler ensemble, autour du sourcing du produit. Pour un chef de cuisine: qui me fournit mes agrumes, mon beurre, ma farine? Il est important car il a un impact social: mon fournisseur respecte-t-il bien un certain nombre de valeurs que j’entends faire porter à la marque. C’est ce que nous avons fait en premier avec Shiseido. Ensuite, on peut se demander ce que l’on peut éliminer, ce qui n’est pas nécessaire, dans les texturants par exemple. En cuisine, j’arrive à faire un gélifiant sans avoir recours à une protéine animale, avec une peau d’orange, habituellement jetée. La nature offre d’autres solutions intéressantes si on prend le temps de l’observer avec les moyens modernes. C’est toute cette démarche en commun que nous avons avec Shiseido sur le mottainai (ndlr.: la lutte contre le gaspillage par l’art de valoriser les déchets).

N’y a-t-il pas une contradiction à promouvoir le local quand on est un groupe mondial comme Shiseido?
L’envie de faire toujours petit n’est pas un critère de qualité. En France, on aime bien ce qui est petit. On aime bien dire: vous voulez un petit café? J’ai fait une viande avec un petit jus, et j’ai un petit producteur, vous voyez? Sauf que tout est petit et à force de voir petit, on est petit. Ce qui m’intéresse, c’est de dire qu’une entreprise mondiale peut diffuser de façon planétaire des choses extrêmement bienveillantes. Face à l’objectif de profit permanent des grandes entreprises du XIXe siècle, où on était dans la rémunération de l’actionnaire, je peux faire mon Marx de base, et dire «ça, c’était pas bien», mais je peux faire le Marx, Thierry, en disant «non, je crois à la croissance en conscience»!

L’engagement environnemental aujourd’hui n’est pas une option pour une entreprise, l’impact social non plus, c’est une nouvelle croissance qui doit se mettre en place, en conscience, si on veut arriver à 9,7 milliards d’individus en 2050. D’autant plus que nous avons une date historique, avec ce Covid, qui rebat les cartes et nous fait 500 000 morts par continent en un rien de temps. C’est ça la réalité d’une planète qui nous dit stop. PME et grandes entreprises sont sur un fil rouge commun: la planète avant tout, parce que la planète n’a pas besoin de nous mais nous, on a besoin d’elle.

Votre notoriété, cadeau ou fléau?
La notoriété est un cadeau si vous vous en servez pour les autres. Si c’est pour vous regarder le matin en vous demandant quelles chaussures ou quelle montre mettre et vous dire je suis le plus beau, je suis le plus fort…, ça, ça ne dure pas très longtemps.

La notoriété est une boîte à lumière, il faut s’en servir pour faire rayonner les valeurs auxquelles vous croyez. Rien ne me prédestinait à être chef de cuisine et chef d’entreprise, ça a été un cheminement plutôt compliqué, venant d’un milieu social modeste.

Il a fallu montrer et démontrer qu’on avait quelques compétences, grâce à un ingrédient secret, qu’on devrait tous garder en cachette, et qui s’appelle la persévérance. Personne n’est fait pour l’échec. Les gens ont des méthodes d’apprentissage différentes. Il y a ceux qui apprennent pour faire, qui vont à l’école, qui ont un parcours universitaire formidable, et puis il y a ceux qui ont besoin de faire pour apprendre. Ce ne sont pas deux mondes à opposer, au contraire, ce sont deux mondes à assembler, et c’est comme ça qu’on fait de belles et grandes entreprises.

La gamme Waso, késako?

© DR

La nouvelle ligne de soins Waso, de Shiseido, a été créée dans l’esprit du mottainai japonais: réduire les déchets, réutiliser, recycler. Une gamme courte (7 produits), avec des compositions clean, des ingrédients traçables issus d’exploitations familiales (citron yuzu, riz, sucre de canne), dans des packagings responsables. De 30 à 43 fr.

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