Artifice
Maquillage: l'ère du fake
Il fut un temps où les maquilleuses de stars signaient des contrats de confidentialité pour ne pas dévoiler lesquelles de leurs clientes portaient des rajouts. Depuis, lesdites stars ont pris l’habitude d’exposer leurs faits et gestes sur les réseaux sociaux et de taguer les magiciennes capables de faire doubler leur masse capillaire en deux heures. Suivies par des millions d’abonnées, elles n’usurpent pas leur statut d’influenceuses et ce qui devait arriver est arrivé: les Kardashian sont devenus des modèles, modifiant petit à petit, mais durablement, les codes de la beauté auprès de la génération Z, essentiellement.
Selon une enquête du fabricant d’injectables Allergan, 43% des moins de 30 ans veulent ressembler à une star. Noelia De Jesus, maquilleuse à Neuchâtel, confirme le rôle des people dans ces nouveaux critères esthétiques: «Kim Kardashian a popularisé le contouring, qui consiste à affiner les traits du visage avec du maquillage, une technique utilisée par les drag-queens depuis des lustres. Les Américaines ont ensuite décrété qu’un contouring n’allait pas sans faux cils, eye-liner, etc. Pour arborer de manière permanente ces effets, des techniques sont apparues, tatouage de faux poils (microblading), extensions de cils et d’ongles. Et toutes les femmes ont fini par se ressembler.»
Œil-de-chat
Eva Bàtòczki pratique le stylisme ongulaire et l’extension de cils dans son Boudoir lausannois. Elle reconnaît une forte hausse de la demande depuis un an pour les franges de cils surdimensionnées, ce qu’on appelle le volume russe (141 000 occurrences du hashtag sur Instagram).
Car il n’y a pas que des expériences heureuses avec cette explosion des faux cils qui a vu n’importe qui pratiquer à domicile avec des produits vus sur Wish ou Alibaba. Les règles d’or pour éviter les problèmes: bien se renseigner avant de prendre rendez-vous, poser des questions sur la formation de la praticienne, ses règles d’hygiène et se méfier des photos sur les réseaux sociaux, facilement falsifiables.
Ongles de sorcière
Côté nailart, l’extravagance est aussi devenue courante dans la vie de tous les jours. Les ongles longs et pointus, hyper-colorés, parfois avec des ajouts en 3D, séduisent les très jeunes femmes, imitant des chanteuses comme Iggy Azalea ou Nicki Minaj. Les actrices de la série Euphoria en sont également adeptes, comme Alexia Demie, qui explique dans un tuto maquillage de Vogue porter cette forme d’ongle depuis le collège (tout en se transformant dans cette vidéo en poupée Bratz des années 2000).
La tendance n’a pas échappé à Florence Stumpe, entrepreneuse à la tête de The Nail Bar (19 enseignes en Suisse):
Fake, mais pas trop
Miranda Kerr, dévoilant sa routine beauté de femme enceinte de 9 mois, avoue sans honte porter de faux cils «parce que c’est beaucoup plus pratique»: pas besoin de mascara le matin et un gain de temps appréciable. On a l’impression que le serpent se mord la queue car, dans le fond, le but du mascara n’a-t-il pas toujours été de donner l’illusion de porter de faux cils? Chez Yves Saint Laurent comme chez L’Oréal Paris, les best-sellers cherchaient effectivement ce rendu extrême. Il est plus que jamais d’actualité, la preuve avec ces trois nouveautés.