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«Malgré les multiples épreuves de la vie, je ne cesse d'aller de l’avant»

Celimene AVC hemiplegie vecu temoignage recadre MAGALI DOUGADOS

«J’ai compris que la normalité n’est pas réelle et j’ai enfin accepté les limites que m’impose mon corps.»

© Magali Dougados

Tout a commencé lorsque j’avais 4 ans. Alors que je jouais dans un parc, je me suis soudain effondrée. Ma mère m’a prise dans ses bras et a couru jusqu’à l’hôpital le plus proche. J’étais inconsciente. Pourtant, personne ne prenait soin de moi. Un interne a déclaré que je faisais une crise d’hystérie, qu’il fallait qu’on rentre chez nous. Par chance, un des amis de notre voisine, neurologue, est venu à mon chevet à la maison.

«C’est très grave, partez immédiatement pour l’hôpital», a-t-il déclaré, alarmé.

Verdict, j’étais dans le coma, j’avais fait un AVC. J’ai dû réapprendre à parler, à marcher, à devenir gauchère. Le côté droit de mon corps est paralysé, je suis hémiplégique. Dès le début, j’avais en moi une force de vie qui me poussait à me surpasser pour redevenir normale. Ma famille, hyper- active, n’a pas tout arrêté suite au diagnostic, au contraire. Mes deux grandes sœurs et mes parents m’ont embarquée partout. Et c’était la meilleure rééducation possible. J’ai même appris à skier!

Pédaler pour être libre

Après 3 mois passés à l’hôpital, ma vie quotidienne était rythmée par les rendez-vous chez le physiothérapeute, l’ergothérapeute et le logopédiste. Je tenais absolument à faire tout ce que faisaient les enfants de mon âge. Mon rêve? Le vélo. Pourtant, mon corps n’est pas idéal pour tenir en équilibre, mais je le voulais plus que tout, je ne cessais de m’exercer. Finalement, ça a payé.

J’ai enfin pu pédaler, seule, libre. J’étais si heureuse. Sur mon vélo, on ne voyait plus le handicap.

L’école m’a toujours fatiguée énormément. J’étais perfectionniste, je donnais tout ce que j’avais pour atteindre les objectifs, pour faire comme les autres. J’ai toujours eu un énorme besoin de récupération. Toute la journée, mon côté gauche compense et ça demande énormément d’énergie. Par chance, je suis tombée sur des camarades géniaux. Bien sûr, il est arrivé que certains enfants se moquent de moi. Étant d’un naturel très gai, je rigolais aux blagues sur mon physique. Ça désamorçait la situation, tout comme rire de moi-même. Être transparente sur mon handicap était le meilleur moyen de me faire accepter.

Après le gymnase, j’ai effectué un bachelor, puis un master en chimie. Le tout dans la douleur, car la fatigue était de plus en plus présente. Ça s’est aggravé lorsque, à 25 ans, j’ai commencé à souffrir terriblement durant mes règles. J’ai toujours eu mal ces jours-là, mais les douleurs étaient devenues des supplices.

J’étais terrassée par la souffrance, je n’arrivais plus à me lever.

Un diplôme vide de sens

On me répétait sans cesse que c’était dans ma tête, qu’on ne voyait rien physiquement. En burn-out, j’ai alors décidé de partir, seule, pour un séjour linguistique à Hawaii. Je n’ai pas eu de règles durant les 3 mois que j’ai passés sur l’île, je revivais! Ça me faisait du bien d’être loin de la pression et du culte de la performance qui m’entouraient en Suisse. Je suis ensuite partie pour le Canada, travailler dans l’entreprise de mon oncle, dans un laboratoire. Ça m’a redonné la motivation nécessaire pour terminer mon master de chimie.

Je m’attendais à ressentir une forme de libération en obtenant ce diplôme qui m’avait tant fait souffrir. Mais non, rien n’a changé. Je savais que cette voie n’était pas la mienne.

L’assurance invalidité (AI) m’a ensuite organisé deux stages en entreprise. j’ai senti le burn-out refaire surface. De plus, les douleurs dans mon bas-ventre étaient toujours bien présentes. J’ai dû voir cinq gynécologues différents avant que l’un d’entre eux m’écoute et me prenne au sérieux. J’étais atteinte d’endométriose.

Je me suis fait opérer en février 2016. La période post-opératoire a été horrible. Les brûlures se sont accentuées et, par-dessus le marché, je n’arrivais plus à digérer. Par chance, je me suis tournée vers un spécialiste zurichois. Il m’a opéré du colon et a enlevé de nouveaux foyers d’endométriose. Deux mois plus tard, mon système digestif était fonctionnel. Par contre, les douleurs cycliques, elles, n’avaient pas disparu. J’ai découvert que j’étais atteinte d’adénomyose, une forme d’endométriose qui colonise les parois internes de l’utérus. La solution m’est alors apparue: il fallait qu’on m’enlève l’utérus. J’ai toujours voulu le faire. Je l’avais déjà demandé par le passé, mais j’avais été confrontée à un sexisme médical révoltant.

On ne cessait de me dire que je changerais d’avis lorsque j’aurais rencontré l’homme de ma vie, qu’une femme sans enfants n’était pas une femme. Bref, on décidait à ma place de ce que je devais faire de mon corps.

Finalement, après plusieurs demandes de ma part, le chirurgien zurichois a accepté de m’opérer. L’intervention est agendée pour le 28 octobre. Je suis si heureuse! C’est une nouvelle vie qui commence, d’autant plus que l’AI a enfin tranché, et m’a assuré une invalidité à 100%. C’est très important pour moi, car je le vois comme une reconnaissance de mon handicap par la société.

Savoir accepter ses limites

Je fourmille de projets. J’ai commencé un blog en 2018, La Tête dans les Étoiles, où je parle de résilience. Je songe à me lancer dans l’écriture d’un livre. Via Instagram, je reçois beaucoup de demandes, des filles qui m’écrivent au sujet de l’endométriose ou du handicap. J’aimerais m’investir davantage, trouver un moyen d’aider les autres, de leur faire accepter la différence.

J’ai appris à ralentir et à vivre à mon rythme; à ne plus trop en demander à mon corps. J’ai compris que la normalité et la perfection ne sont pas réelles et j’ai enfin accepté les limites que m’impose mon corps. Par contre, impossible de me projeter dans 5 ou 10 ans. Je n’aime pas ça. J’ai appris à arrêter de me focaliser sur des objectifs pour avancer. Lorsqu’on souffre d’une maladie chronique, on vit au jour le jour. C’est une philosophie que j’applique au quotidien.

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