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Ma passion du voyage m’a délivrée de l’agoraphobie

Ma passion du voyage m’a délivrée de l’agoraphobie

J’ai compris que mes crises de panique n’étaient que… des crises de panique.

© Pierre Vogel

Enfant, je voulais être hôtesse de l’air

Je rêvais de partir à la découverte du monde. Un besoin de légèreté, de liberté aussi, en lien – je l’ai compris bien plus tard – avec une situation familiale difficile: j’ai grandi dans un climat lourd, avec un père tyrannique, alcoolique, et une maman malheureuse. Portée par cette quête d’ailleurs, j’ai effectué mon apprentissage dans une agence de voyages. J’étais loin de me douter de ce que j’allais traverser.

Les premiers symptômes sont apparus à mes 20 ans. J’étais en train de faire les courses dans un supermarché quand j’ai commencé à avoir des sueurs, des étourdissements et un fort mal de tête. Après un premier instant de panique, j’ai mis ce malaise sur le compte de la fatigue. L’agence dans laquelle je travaillais se trouvant dans un centre commercial, j’avais depuis quelque temps l’impression de vivre dans un aquarium au milieu de la foule. Je venais en outre de passer une année émaillée par une série de petits chocs successifs: j’avais été témoin de deux violents accidents de la route et je terminais une histoire d’amour.

A partir de cet incident, mes angoisses ont empiré, allant de la tachycardie aux vertiges violents. Dès que je quittais mon domicile pour un endroit où il y avait du monde et une source potentielle d’attente, une peur panique se déclenchait. J’avais le sentiment de devenir cinglée. Au fil des mois, j’ai commencé à éviter de nombreux lieux: les restaurants, les grands centres, les transports en commun, le bruit en général… C’était devenu invivable!

J’ai pratiqué l’évitement

Au terme d’une année éprouvante, je me suis enfin décidée à aller consulter. Le verdict est tombé: j’étais agoraphobe. Devant mon ignorance, le psychothérapeute m’a expliqué qu’il s’agissait d’un dérèglement émotionnel exagéré provoqué par le stress. Même si ça ne résolvait rien, j’étais soulagée: mon mal avait un nom.

N’arrivant ni à réagir ni à trouver de solutions, j’ai continué à pratiquer l’évitement, faisant le vide autour de moi. Pour ne pas sortir, je donnais de fausses excuses. Les moments sans crise se réduisaient à ceux où j’étais dans un environnement rassurant ou accompagnée de mes proches, ma maman ou mon compagnon par exemple. Au début, mon ami m’a beaucoup aidée. Mais mon état ne s’est pas amélioré: il a beaucoup pesé sur notre relation. Côté professionnel, en revanche, j’ai réussi à prendre sur moi, même quand, à l’intérieur, ça bouillonnait: je passais mon temps à trouver des subterfuges pour ne pas me trouver dans une situation qui aurait permis à mes collègues de détecter mon mal.

Des mots sur mes maux

Sept années se sont ainsi écoulées, durant lesquelles j’ai consulté de nombreux psychothérapeutes, des réflexologues, des chamans… En vain. Mon histoire d’amour a pris fin. En 2005, me retrouvant seule à près de 30 ans, j’en ai eu vraiment marre. Alors, même si je n’avais aucune idée de comment m’y prendre, j’ai décidé de me sortir de ce truc qui me gâchait la vie depuis trop d’années.

Après quelques tentatives, que freinait chaque fois un décès dans ma famille, j’ai entamé une thérapie comportementale. Elle a été salvatrice. J’ai commencé à mettre des mots sur mes maux, sur ce que je ressentais, en tenant un carnet de notes au quotidien. J’ai appris à faire face à mes attaques de panique, grâce à des exercices. A la même époque, j’ai trouvé sur Internet le site d’un ex-agoraphobe qui donnait des conseils. C’est la première fois qu’on me proposait du concret.

J’étais terrorisée à l’idée de partir

Comme je commençais à aller mieux, un nouveau décès a failli tout réduire à néant. Mais j’avais perdu trop de temps. Je ne voulais plus vivre comme ça. C’était en 2010. Je suis allée voir un autre de mes psys – mon «psy de choc», comme j’aime l’appeler – qui m’a dit: «Vous avez envie de partir, pourquoi ne le faites-vous pas? Vous êtes entre deux jobs, c’est le moment!» Trois jours plus tard, j’avais mon billet d’avion pour la Thaïlande.

A l’heure du départ, à l’aéroport, j’ai pleuré dans les bras de ma mère. J’étais terrorisée. J’allais voyager trois semaines et demi, seule dans un pays que je connaissais peu, alors que j’étais agoraphobe: j’étais complètement dingue! Une fois dans l’avion, tout s’est calmé. Ce jour-là, j’ai pris conscience que mes crises de panique n’étaient rien d’autre que… des crises de panique. Je n’allais pas en mourir – j’aurais été morte depuis longtemps sinon. C’était en apparence une réflexion toute bête, mais cette réalité qui se remet dans le bon ordre a été le début de ma guérison.

J’ai passé des vacances incroyables, rencontré des gens merveilleux, profité comme jamais de cette liberté. Je n’étais pas guérie, mais ces semaines m’ont fait énormément de bien. Au point que j’ai craint, au retour, de voir tout recommencer une fois chez moi. Et puis je suis rentrée, épuisée et heureuse. Avec une certitude: j’allais renouveler l’expérience, c’était sûr. Oui, 2010 a marqué un tournant. J’avais compris le mécanisme de mes angoisses.

Le monde s’ouvre à moi

Depuis, je suis devenue addict au voyage. USA, Martinique, Grèce… Seule ou accompagnée, je pars dès que je peux. Ma «guérison» a d’ailleurs eu un impact sur ma vie professionnelle. J’ai quitté mon dernier job dans la cosmétique de luxe pour mettre sur pied, l’an dernier, à 38 ans, mon projet de voyages zen. Dans la foulée, j’ai créé deux blogs. Par besoin soudain de faire quelque chose qui me fasse plaisir, qui ait du sens pour moi. Mon premier site est consacré aux voyages. Une façon de concilier toutes mes passions – la découverte, la photo, l’écriture – et d’encourager les autres à aller au bout de leurs rêves. Le deuxième, «vertigesdemavie.com», est dédié à mes quinze années d’agoraphobie. Je suis la preuve que l’on peut en guérir. A condition de dédramatiser et, surtout, d’agir. Sur mon blog, je propose une méthode qui réunit tout ce que j’ai compris, j’offre des clés pour aller mieux. J’ai même sorti un minilivre au format Kindle.

Après tant d’années passées à côté de ma vie, j’ai la tête pleine de projets. Je me verrais bien travailler un temps en Grèce, ou m’installer au Québec, région pour laquelle j’ai eu un véritable coup de cœur en 2014. Oui, j’ai mis du temps. Le monde s’ouvre enfin à moi. Il n’y a plus une minute à perdre!

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