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Récit poignant

«Je souffre d’une maladie fatale et sans traitement»

«Je souffre d’une maladie fatale et sans traitement»

«Je me suis rendue aux pompes funèbres, j’ai tout choisi, tout anticipé. Je me suis aussi inscrite auprès d’Exit, car je refuse de finir tétraplégique.» - Céline Mercier

© GUILLAUME PERRET

Le premier symptôme de la maladie? Je l’ai ressenti il y a quatre ans, j’avais alors 23 ans. Du jour au lendemain, je ne suis plus parvenue à me mettre sur la pointe des pieds. J’ai tout de suite pressenti que cela était grave: lorsque j’avais 16 ans, la sclérose latérale amyotrophique, ou maladie de Charcot, a emporté ma maman. Puis ce fût le tour de mon grand-père maternel, quelques années plus tard. Le même schéma se répète: la maladie paralyse progressivement l’ensemble des muscles. Dans le cas de notre famille, elle commence par les extrémités. Le pronostic vital est de 3 à 5 ans.

Pour autant, je n’ai pas voulu voir l’évidence. Je suis passée par une phase de déni, puis de colère et de tristesse. Comment accepter, d’un seul coup, de faire une croix sur tous mes rêves: celui d’avoir un jour ma propre ferme, de fonder une famille, d’avoir des enfants… Ce qui m’a aidée, à ce moment-là, c’est d’anticiper toutes les démarches post-mortem. Au décès de ma maman, j’avais détesté que l’on nous demande de choisir le type de fleurs à déposer sur son cercueil. Des tulipes ou des roses, franchement, quelle différence ça faisait? Elle n’était plus là, c’était ça qui était terrible, qui prenait toute la place. Je me suis donc très vite rendue chez les pompes funèbres, pour régler les différents détails pratiques. J’ai tout choisi, tout anticipé. Je me suis également inscrite auprès d’Exit, car je refuse de finir tétraplégique. Et cela m’a apaisée et permis de débloquer pas mal de peurs.

La quête de la sérénité

Parler de la mort ne m’a jamais effrayée. Je le fais très naturellement. Dans le livre que j’ai rédigé sur mon parcours, c’est le chapitre que j’ai écrit le plus rapidement. Celui qui m’a pris le plus de temps? Celui consacré à la paix intérieure. J’ai vraiment galéré avec lui. J’avais envie que ce dernier parle à tout le monde, pas seulement aux personnes malades. Il y a des jours où j’ai encore de la peine à la trouver, cette sérénité. Il m’arrive bien sûr d’être en colère, de pleurer.

Je n’ai pas envie de mourir! Je souffre d’une maladie fatale pour laquelle il n’existe aucun traitement, affronter le quotidien n’est pas toujours aisé, malgré mon naturel positif.

Si je tiens le coup, c’est grâce à mon entourage exceptionnel. J’ai une famille et des amis incroyables qui me soutiennent chaque jour. Grâce à eux, j’ai pu visiter le Japon, me baigner en Guadeloupe, faire le tour de l’étang de la Gruère. Au début, ils refusaient de me parler de leurs malheurs ou de leurs grands bonheurs, craignant de me faire de la peine. Mais ce n’est pas parce que je suis malade que je ne peux pas me réjouir ou compatir, au contraire! J’ai pris le parti d’être heureuse pour ce qu’ils vivent, je veux être à leurs côtés, quelles que soient les épreuves et les joies qu’ils traversent.

Apprivoiser mon fauteuil roulant

Annoncer le diagnostic à mon papa a été très difficile. Il a déjà perdu sa femme de cette maladie, son beau-père également. Je suis fille unique: son monde s’est écroulé ce jour-là. Nous avons un lien extrêmement fort, nous avons décidé de ne jamais nous cacher les choses. Mais si j’ai besoin de ses bras, il est toujours là. Il y a quelques mois, j’ai dû accepter de me déplacer en fauteuil roulant: mes genoux commençaient à lâcher, marcher était devenu trop difficile pour moi. La première fois que mon père a fait avancer mon fauteuil, j’ai senti ses larmes couler sur mon épaule. «Il y a 27 ans, je te poussais aussi, mais c’était en poussette», m’a-t-il dit. Cela m’a bouleversée.

J’ai la chance de connaître une évolution lente de la maladie. Je suis actuellement un traitement expérimental qui pourrait encore la ralentir. C’est douloureux à vivre, car il s’agit de ponctions lombaires à effectuer chaque mois. Je ne mets pas trop d’espoir dans ce dernier, je préfère savourer le temps qui passe, que ce soit en faisant des balades avec Virgule, ma chienne adorée, ou en streamant sur Twitch. Car oui, je me suis mise aux jeux vidéo! Je passe beaucoup de temps à discuter online avec ma communauté, j’adore cela. Ça me nourrit.

«Je souffre d’une maladie fatale et sans traitement»
© GUILLAUME PERRET

Conter son histoire

La maladie n’est jamais très loin, et lorsqu’elle se fait oublier un peu, c’est pour revenir plus fort par la suite. J’ai soudain mes jambes qui flageolent, ou je me retrouve incapable de couper ma viande. C’est dur à encaisser, cela prouve que le mal progresse. Mais avant d’être malade, je suis une jeune femme de 27 ans, souriante, énergique et positive. Je suis fière d’avoir écrit Sur la pointe des pieds, le livre qui raconte mon histoire. Parler de la maladie, la faire connaître au plus grand nombre, est essentiel pour moi. Dans la foulée, j’ai ainsi donné une conférence devant 200 personnes, c’était incroyable. Je continue de faire des projets, d’avoir des envies de voyages et d’évasion, de réaliser des rêves.

J’ai, par exemple, eu la chance de pouvoir acheter une maison à Movelier, dans le Jura, mon petit coin de paradis. J’en suis la copropriétaire avec Louis, une personne centrale dans ma vie. Lorsque l’on a appris que j’étais malade, nous étions ensemble depuis trois mois. Notre couple a pris très cher: tous nos projets futurs se sont envolés en une fraction de seconde. Aujourd’hui, nous n’avons pas de vie intime ensemble, notre relation a évolué. Notre amour est si pur: Louis est mon âme sœur, mon ange gardien. Et nous vivons tous les trois dans notre maison, avec notre chienne Virgule. Même si, un jour, mes pieds refuseront de me porter, je sais que lui sera toujours là pour le faire.

Sur la pointe des pieds, Céline Mercier (Éd. Assa).

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