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L’enfant est-il un adulte comme un autre?

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Fanny Vella assure que sa démarche a parfois été mal comprise. «On a pu me reprocher que c’était faire preuve de laxisme, mais c’est faux. Je souhaite d’abord qu’on amène les choses à un enfant de manière aussi bienveillante qu’on le ferait avec un adulte. D’ailleurs, ce n’est pas parce que j’écoute les besoins et les envies de mon mari que j’en fais un mari roi.»

© Fanny Vella

Ce sont de petits dessins pour Instagram, mais un grand débat pour les internautes. En quelques planches postées sur ses comptes de réseaux sociaux, l’illustratrice Fanny Vella a en effet généré des discussions online passionnées autour de l’éducation des enfants. Ce qui a enflammé ainsi les esprits? Via le hashtag #etsionchangeaitd’angle, la Française dessine des scènes du quotidien où l’enfant est remplacé par un adulte. Selon elle, transposer ainsi un grand à la place d’un tout-petit permettrait de mieux faire ressortir le caractère absurde, rude, voire cruel de certaines demandes faites à notre progéniture. Obliger un enfant à partager ses jouets avec un jeune invité? Et si votre partenaire vous forçait à prêter votre voiture à un inconnu, rétorque graphiquement Fanny Vella, qui représente un amoureux des autos scandalisé à l’idée de céder Titine au premier venu.

Histoire de pincettes

Et si ce(tte) même partenaire vous interdisait également de sortir de table avant que vous, adulte, n’ayez fini votre assiette? Ou qu’on laissait un escadron de mamies vous attraper et vous couvrir de bisous parce que vous êtes mignon tout plein? Autant de situations en apparence anodines, mais qui seraient pour l’auteure autant d’exemples de violences éducatives ordinaires. «Avec ces dessins, je veux déconstruire tous les schémas très courants où l’enfant n’a pas d’autres choix que de juste suivre ce que ses parents attendent de lui, explique l’illustratrice. Il me semble qu’on prendrait bizarrement beaucoup plus de pincettes avec des adultes dans de telles situations. Alors pourquoi, avec des enfants qui ont les mêmes besoins, envies et sensibilités, et qui sont moins à même de saisir les enjeux du moment, va-t-on souvent être moins délicat?»

Ce postulat a fait fleurir de nombreux commentaires sceptiques autour des dessins en question. «Je trouve ça stupide de comparer ce qui n’est pas comparable. Votre nourrisson, puis enfant, n’a pas les mêmes besoins qu’un adulte et ce à tous les niveaux», s’insurge par exemple sur Instagram l’utilisatrice mlleelse. Fanny Vella maintient malgré tout sa position.

«Un enfant n’est pas un être qui nous appartient et pour qui on prend des décisions unilatérales concernant ses besoins. J’ai d’ailleurs aussi reçu pas mal de messages de soutien de professionnels, des psys, des profs, mais également de grands-parents enthousiasmés par ma vision des choses.»

Reste que tous les spécialistes de l’éducation ne la suivent pas dans ses tentatives de démonstrations. A l’instar de Philip Jaffé, psychologue et directeur du Centre interfacultaire en droits de l’enfant. «Entre la maltraitance et l’éducation, il y a de la marge. Hausser le ton de temps en temps envers son enfant n’est pas la même chose que lui crier dessus dix fois par jour. On ne va de toute façon pas parler de la même manière à un enfant qu’à un adulte, tant qu’on reste dans la raison et le respect.» Ce qui justifie ce double registre? «Les adultes ont une responsabilité de guidance et de structuration envers l’enfant, ils ont le devoir d’organiser son temps. Il y a alors des ordres de marche qui ne s’appliqueraient jamais à un adulte. L’enfant ne va par exemple pas décider seul de ne pas aller à l’école.»

Une violence non décelée

Et pour cause: les plus petits, même avec la meilleure volonté du monde, ne pourront pas fonctionner comme un grand, majeur et vacciné. «Il faudrait pouvoir transposer les compétences cognitives de l’adulte sur celles de l’enfant, et là, ça ne marche pas, relève Alessandra Duc Marwood, médecin adjoint aux Boréales, le centre de prise en charge de la maltraitance familiale du CHUV. Il faut parfois recourir à l’autorité, car l’enfant manque de certaines capacités de discernement. Jusqu’à 10 ans par exemple, il a du mal à évaluer la distance, ou sous-estime parfois les températures.»

Fanny Vella assure toutefois que sa démarche a parfois été mal comprise. «On a pu me reprocher que c’était faire preuve de laxisme, mais c’est faux. Je souhaite d’abord qu’on amène les choses à un enfant de manière aussi bienveillante qu’on le ferait avec un adulte. D’ailleurs, ce n’est pas parce que j’écoute les besoins et les envies de mon mari que j’en fais un mari roi.» Selon Alessandra Duc Marwood, ce type d’initiative incarnerait pourtant une dérive de ce qui a été découvert dans les années 60 et 70. «Oui, l’enfant est une personne, mais il y a ici confusion entre reconnaître des droits et dire qu’un enfant a le savoir et les facultés de réflexion d’un adulte. Penser cela, c’est finalement être violent, car l’enfant doit pouvoir se reposer sur l’adulte protecteur. La violence s’applique aussi quand on pense que l’enfant est un adulte comme les autres.»

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