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Comment parler de «Squid Game» à nos enfants?

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«Cette série a pour effet troublant et déroutant de mettre en scène une violence difficilement imaginable pour des enfants, par le biais des jeux inoffensifs de l'enfance, voire de la petite enfance. La réalité de la vie adulte et celle de l'enfance appartiennent à deux mondes différents et ce n'est pas pour rien.» - Jon Schmidt, psychologue et thérapeute de famille.

© YOUNGKYU PARK

Le thriller dystopique sud-coréen continue de pulvériser les records. Depuis sa sortie, le 17 septembre 2021, plus de 111 millions de foyers ont visionné Squid Game, via la plateforme Netflix. Mélange troublant de Hunger Games, Battle Royale et Black Mirror, le scénario présente un jeu à taille réelle, dont les participants espèrent gagner une somme gargantuesque en s'adonnant à des jeux d'enfants. Seul problème: le moindre échec leur coûte la vie.

Dire que la série fascine serait un euphémisme: sur TikTok, des milliers de vidéos s'inspirent des défis aperçus dans les neuf épisodes de la production, du Candy Challenge au fameux «un, deux, trois, soleil». Or, ce buzz international suscite également des effets moins inoffensifs, notamment dans les cours d'école. Depuis quelques semaines, les médias font état, dans plusieurs pays, d'élèves reprenant certains jeux violents, après avoir visionné ou entendu parler de Squid Game. C'est le cas, par exemple, d'un établissement belge: ainsi que le rapporte le journal La Libre, une petite fille de 11 ans a notamment été fouettée au visage après avoir perdu une manche d'«un, deux, trois, soleil».

Et le phénomène n'épargne pas la Suisse: le mercredi 13 octobre 2021, la police cantonale vaudoise publiait un message d'alerte sur les réseaux sociaux: «Ces images sont très impressionnantes et peuvent choquer adolescents et enfants. Certains élèves miment ces scènes à la récréation, d'autres manifestent leur inquiétude auprès des adultes.» Aussi la police rappelle-t-elle aux parents qu'une limite d'âge (16 ans) s'applique à Squid Game. La plateforme Netflix permet effectivement de restreindre l'accès des plus jeunes à certaines productions.

Quand la violence s'immisce dans les codes de l'enfance

Or, face à un tel buzz international, il est difficile de protéger complètement nos enfants de certains contenus, surtout lorsque ceux-ci s'invitent dans les conversations et s'affichent sur tous les réseaux sociaux. Squid Game éveille en effet un grand engouement, qui n'échappe pas aux jeunes adolescents. Mais pourquoi le concept les intrigue-t-il autant, alors qu'ils ne comprennent pas forcément la philosophie sous-jacente du scénario?

«Cette série a pour effet troublant et déroutant de mettre en scène une violence difficilement imaginable pour des enfants, par le biais des jeux inoffensifs de l'enfance, voire de la petite enfance, explique Jon Schmidt, psychologue et thérapeute de famille. La réalité de la vie adulte et celle de l'enfance appartiennent à deux mondes différents et ce n'est pas pour rien. L'adulte protège l'enfant dans son innocence et son insouciance, car il n'est pas encore capable d'assimiler les principes de réalité propres à la vie adulte. Cet apprentissage, il le fera progressivement et tout au long de sa vie jusqu'à sa majorité.» Ainsi, Squid Game fusionne brusquement ces deux univers, basant la violence et le suspense de son récit sur les codes innocents et ludiques, rattachés à l'enfance.

Il semble toutefois difficile de juger les effets que peuvent avoir ces contenus, ou de prévoir la manière par laquelle nos enfants réagiront. «Petit, qui n'a pas vu un film qu'il n'était pas censé voir ou n'a pas joué à un jeux vidéo qui n'était pas de son âge? relève notre expert. Pour moi c'était Les Dents de la Mer, dont je craignais de faire des cauchemars jusqu'à l'adolescence.» Aussi Jon Schmidt rappelle-t-il que la différence entre un film d'adulte et un film pour enfant se situe dans le réalisme qu'il présente:

«Ce qui permet à l'enfant de supporter le contenu qu'il regarde tient de sa capacité à pouvoir se dire: "ça, ce n'est pas pour de vrai", même s'il a peur. C'est tout le principe du conte, lequel contient des éléments de réalité qui restent néanmoins enrobés, pour permettre à l'enfant de se dire que "ça n'existe pas dans la vraie vie". Cela lui permet d'appréhender un sentiment d'excitation, de peur et d'y survivre.» Une ligne plutôt subtile, surtout dans le cas d'une dystopie comme Squid Game.

Comment les protéger?

Ainsi que le notait le site L'ADN, les plus jeunes peuvent entendre parler de Squid Game sans avoir regardé la série, que ce soit via les réseaux sociaux ou les jeux vidéo. «On ne peut protéger les enfants de tout, observe Jon Schmidt. Ils verront des choses qui vont les perturber et les choquer. C'est la réalité de la vie». En revanche, le spécialiste souligne l'importance de rester ouvert-e au dialogue: «Il faut savoir se tenir à l'écoute de son enfant et lui laisser la liberté d'en parler ou pas. Parfois nos enfants gardent leurs peurs pour eux car ils veulent évaluer leurs capacités à les surmonter tout seul, ce qui est particulièrement le cas à l'adolescence.»

En outre, il convient de prendre au sérieux les limites d'âge (fixée à 16 ans pour Squid Game) appliquées aux contenus ou aux jeux qui nous semblent inadéquats, violents ou trop explicites. Il s'agit d'un élément concret que les parents peuvent exposer à leurs enfants, afin de leur expliquer pourquoi quelque chose ne leur est pas (encore) destiné: «A mon sens le dialogue est toujours bénéfique, dans la mesure où il ne vire pas à l'interminable négociation, conclut le psychologue. Dans le cas d'une série interdite aux moins de 16 ans, il y a déjà un indicateur clair sur lequel les parents peuvent s'appuyer. La plupart de celles et ceux qui me consultent regardent seul-e-s les séries pour lesquelles ils ou elles ont un doute et peuvent ensuite faire part de leur décision en toute connaissance de cause.»

Dans le cas où une production nous semble inadaptée ou choquante, peu importe sa popularité, le fait de limiter les accès aux plateformes de streaming peut constituer une solution. Sans oublier l'échange, bien sûr, afin de rappeler les différences entre le monde réel et le monde fictif; quitte à regarder ensemble, pour mieux comprendre et en discuter.

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