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Le salon de tatouage Little Vinnies Tattoos ne paye pas de mine, au bord de la route qui mène à Finksburg, au nord-ouest de Baltimore (Maryland, est). Mais des centaines de femmes frappées par le cancer du sein en connaissent l'adresse, souvent grâce au chirurgien qui les a opérées au prestigieux hôpital voisin Johns Hopkins.

Vinnie Myers, 49 ans, silhouette longiligne, oeil clair et petit bibi noir vissé sur le crâne, est artiste tatoueur depuis 28 ans mais s'est complètement spécialisé depuis dix ans dans le tatouage des mamelons et aréoles sur les seins mutilés des anciennes malades du cancer. Il a déjà traité 3000 clientes, dit-il. "Faire ceci pour les femmes, c'est le travail le plus gratifiant que j'ai jamais réalisé", dit cet ancien infirmier dans l'armée, tout en examinant Susan, 58 ans, retraitée élégante qui fait ça "pour elle, pour paraître normale et plus jolie".

"Pas de complications? pas d'allergies?", demande le tatoueur en enfilant ses gants de latex, avant de mélanger des pigments dans de minuscules godets. "Voyons, on ne va pas prendre une couleur pêche, on va essayer quelque chose d'un peu taupe, avec du bleu", dit-il, en posant une touche de couleur sur la peau de sa cliente pour en apprécier la teinte.

"La plus belle reconstruction mammaire ne donne pas l'illusion d'un sein s'il n'y a pas de mamelons et d'aréoles", dit Vinnie, "et il est extrêmement important pour le moral de paraître aussi normale que possible quand on se regarde le matin dans un miroir". Les hôpitaux proposent des tatouages qui ne sont pas réalisés par de vrais professionnels, mais par un infirmier "formé en deux jours", dit-il.

Pendant deux heures, durée moyenne d'un traitement, le tatoueur va déterminer la teinte et la taille des aréoles qu'il va colorer en injectant les pigments dans la peau, comme un tatouage traditionnel. "On choisira une couleur plus sombre pour les mamelons, toujours plus foncés", dit-il. Avec des rehauts de teinte claire, cette technique en trompe-l'oeil donne l'impression, de manière saisissante, d'une profondeur alors que la surface de la peau est plane. Le tout pour un tarif s'échelonnant entre 350 et 1000 dollars, selon la difficulté.

Vincent "Vinnie" Myers est un maître dans sa partie. S'il reçoit toujours dans son salon du Maryland où il habite, il va régulièrement à New York, Philadelphie, Charleston et travaille même dans les locaux du St-Charles Surgical Hospital de la Nouvelle-Orléans. "C'est très demandé", dit l'artiste qui estime à deux ou trois le nombre de ses confrères spécialisés. Lui-même a commencé à la demande d'une cliente, qui a montré le résultat à son médecin, impressionné. Le tatoueur et Johns Hopkins travaillent depuis en partenariat.

Or, dit M. Myers qui envisage de former des apprentis, 200 000 cancers du sein sont diagnostiqués chaque année aux Etats-Unis. Et la moitié entraînent une reconstruction mammaire, même si les chirurgiens essayent maintenant, avec des nouvelles techniques, de conserver plus souvent les bouts des seins. Wendy, 72 ans, cheveux roux, a décidé de sauter le pas, plus de 40 ans après deux cancers, deux ablations, deux implants et deux tatouages "très primitifs". "Je vais essayer", dit cette ancienne psychologue, curieuse.

Entre deux piqûres d'aiguille électrique, Vinnie plaisante: "C'est un salon de tatouage ici, c'est plus décontracté qu'un hôpital", ajoute l'artiste qui blague autant qu'il est à l'écoute de la cliente. "Les femmes sont souvent émues à la fin. C'est la dernière étape, pour elle, c'est terminé, elles se sentent à nouveau entières", dit-il.

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