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Plage en péril: Ohama Beach, menacée par la montée des eaux

Ohama beach plage du debarquement assiegee par les eaux

Depuis 1944, sur les plages normandes du Débarquement, deux tiers du littoral s’érodent, 20 à 25 centimètres de falaises meurent annuellement.

© UNSPLASH/JONAS DENIL

Du 5 au 7 juin 2024, en fanfare, trompettes et bain de foule électoral, les 80 ans du Débarquement ont réuni le gratin des présidents et les derniers survivants. Ces quasi-centenaires, avec leurs multiples médailles et leur déambulateur, étaient presque plus en santé que la plage d’Omaha Beach qui les accueillait. Ces lieux de mémoire sont désormais piégés par la montée des eaux et la multiplication des tempêtes.

Le 6 juin 1944, à 6 heures du matin, sous un ciel encombré de nuages, 156’000 soldats américains, anglais et canadiens s’avancent difficilement au milieu de la houle pour atteindre la centaine de kilomètres du littoral normand. Les cinq plages qui composent la bande de terre voient tomber ces jeunes gens pris sous un déluge de feu allemand. Les vagues sont violentes, leurs bardas les empêchent d’avancer.

Dans le sable, il s’agit d’éviter les «hérissons tchèques», ces sortes de croix antichars, les mines, les barbelés. Mais surtout, planqués dans les blockhaus, les Allemands tirent comme des forcenés. Deux cent vingt-cinq rangers américains escaladent alors la Pointe du Hoc, et s’emparent des installations. Au soir du 6 juin tout est terminé, les plages sont conquises, le monde libre est sauvé, mais pas l’environnement.

Aujourd’hui, les vestiges de la guerre qui témoignent de la bravoure des hommes jetés au combat disparaissent peu à peu. Car inexorablement la mer monte. Depuis 1944, deux tiers du littoral s’érodent, 20 à 25 centimètres de falaises meurent annuellement. Les bunkers sont renversés, les traces du débarquement s’effacent plus vite que la mémoire des sociétés et la vie de combattants.

Au moment où les 225 rangers escaladent la Pointe du Hoc, la roche forme un seul bloc. Aujourd’hui, l’eau a fait reculer la falaise de deux mètres, le rocher se donne des airs d’Étretat en plus pointu. Et d’ici cinq à sept ans, la pointe risque de disparaître.

L’Amérique au secours des bunkers

Pour les pays qui ont sacrifié des hommes, la disparition de ces lieux de mémoire est un drame. En 2015, ils ont dépensé 5 millions pour renforcer la falaise de la Pointe du Hoc, 6 millions en 2022. De nouveaux travaux sont prévus en 2025, de 14,7 millions d’euros, pour réaménager le parcours, actuellement dangereux, et déplacer la stèle.

Autre mémorial, le bunker du colonel Rudder, du nom de celui qui a donné l’assaut, est fermé en raison de l’avancée des eaux et du recul de la côte. On pense à le délocaliser dans les terres, mais sûr que ce n’a pas le même «charme». À 40 kilomètres de là, le Musée du Débarquement, situé dans la petite ville d’Arromanches, attend de pied ferme les visiteurs du monde entier.

Les 500 habitant-e-s comptent sur les 300’000 touristes annuels qui viennent admirer depuis les fenêtres du musée l’ancien port artificiel qui était là pour approvisionner les troupes. D’ici trente ans, plus rien de ces installations n’existera. Le musée lui-même résiste difficilement à l’assaut des vagues quand bien même on recharge 7000 mètres cubes de sable tous les deux ans, comme si on allait sauver l’histoire avec une cuillère.

© SEAN GALLUP/GETTY IMAGES

La menace de la montée des eaux

Alors, finies les plages du Débarquement? À terme, comptons en 2100, elles ne devraient plus exister, en dépit du fait que la Normandie tente, depuis 2008, de les inscrire au Patrimoine de l’Unesco. Mais l’Unesco ne peut rien contre la montée des eaux.

Bonne nouvelle cependant: la nature reprend ses droits sur les bunkers. En quelques années, la végétation s’est reconstituée, les milieux dunaires sont revitalisés, faune et flore remplacent les ruines métalliques, héritage de la folie des hommes.

Parce que rappelons que les effets les plus dévastateurs sur la longévité du littoral normand ont été provoqués par des infrastructures construites après le Débarquement, tel le port artificiel d’Arromanches, justement, qui a modifié les courants et conduit à la formation de monticules de sable bloquant le flux et le reflux du courant marin.

Un jour, il ne restera ni hommes, ni traces du 6 juin 1944. Sauf les mouettes, les fleurs sauvages, et le vent.

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