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L'inégalité salariale entre les sexes ne cesse de se creuser

Linegalite salariale entre les sexes ne cesse de se creuser

Pour Regula Bühlmann, secrétaire centrale de l'USS, «une série de mesures doivt urgemment être mise en place pour endiguer le phénomène des disparités salariales».

© Getty Images

Si le principe de l'égalité salariale figure concrètement depuis 25 ans dans la loi sur l'égalité (LEg), la réalité est tout autre. Les chiffres de l'«analyse des différences salariales entre femmes et hommes sur la base de l’enquête suisse sur la structure des salaires» de l'Office fédéral de la statistique (OFS), dévoilée le 21 juin 2021, sont éloquents.

Sur l’ensemble de l’économie en 2018, le salaire mensuel moyen brut des hommes, standardisé sur un plein temps, atteignait 7968 francs. Les femmes, elles, ont gagné 19,0% de moins, soit 6456 francs.

Cette disparité n'a fait qu'augmenter ces dernières années. Effectivement, en 2014 et 2016, le salaire des femmes était inférieur respectivement de 18,1% et 18,3% à celui des hommes.

Le rapport montre aussi que dans le secteur privé, les salaires moyens sont plus bas que dans le secteur public (Confédération, cantons, communes, districts et collectivités publiques), pour les femmes comme pour les hommes. L’écart salarial relatif dans le secteur privé est toutefois supérieur (19,6%) à celui du secteur public (18,1%). A noter que les femmes sont plus nombreuses à occuper des postes dans le public (55%) que dans le privé (43%).

L'enquête révèle également que la répartition des paiements spéciaux (bonus, versements exceptionnels, etc.) diffère «très clairement» entre les genres. Ils sont nettement plus élevés pour les hommes que pour les femmes (415 contre 155 francs) si l’on prend la moyenne sur l’ensemble de l’économie. Par ailleurs, sur le marché du travail, les hommes sont plus nombreux dans l’industrie et les activités manufacturières, alors que les femmes sont très présentes notamment dans les activités sanitaires et sociales (77%), ainsi que dans le commerce de détail (67%).

Part «expliquée» et «inexpliquée»

Les 19%, caractérisant l'inégalité salariale entre les femmes et les hommes, ont été obtenus en ne considérant aucun autre élément que le salaire brut moyen. En prenant en compte les variables d’influence - comme le degré de formation, l'expérience professionnelle, la position hiérarchique, la branche économique, la taille de l’entreprise, le taux d’occupation et d'autres -, le rapport de 140 pages conclut que l’écart salarial moyen atteint 17,8% en 2018.

L'enquête rappelle que cet écart de salaire a une part «expliquée» (par les variables citées précédemment) et une part «inexpliquée» (qui représente près de la moitié de la totalité cet écart et qui est liée probablement à un manque de données). Autrement dit, les femmes, compte tenu de ces variables observables, gagnent en moyenne 8,1% de moins que les hommes. Cet écart salarial «inexpliqué» n’a cessé de se creuser: 7,4% en 2014, 7,7% en 2016. La disparité des salaires s’explique notamment par le fait que les femmes sont massivement surreprésentées dans les emplois aux salaires nets inférieurs à 5000 francs.

Dès lors, on est en droit de se demander dans quelle mesure l’écart salarial «inexpliqué» se recoupe avec une discrimination liée au sexe lors de la fixation du salaire? Selon les auteur.e.s, cette part «inexpliquée» ne peut pas être interprétée comme une discrimination en matière de rémunération, parce que trop de facteurs sont ignorés. Parmi eux: l’expérience professionnelle effective, les interruptions de carrière passées, les modèles de temps de travail, de cursus et de formation continue, les compétences personnelles (langues étrangères...) ou même des qualités comportementales telles que la disponibilité, la propension au risque, les spécificités psychologiques.

Autre fait relevant dans cette enquête: chez les femmes et les hommes célibataires, l’écart salarial «inexpliqué» est de 3%, mais nettement supérieur chez les employés mariés (10%). Par ailleurs, ces écarts salariaux entre femmes et hommes sont plus marqués dans les emplois à plein temps (9%) que dans les activités à temps partiel (près de 7%). Ils augmentent aussi avec le niveau de hiérarchie. Chez les cadres supérieurs, ils atteignent en moyenne 13%.

Lutter contre l'inégalité salariale

Dans la foulée de la publication du rapport, l’Union syndicale suisse (USS) n'a pas manqué de réagir. Pour le syndicat, il est intolérable que les femmes gagnent (salaire mensuel brut) en moyenne 19% de moins que les hommes. L'USS estime qu'une partie de cette disparité «relève de la discrimination pure et simple».

Quant à la part «inexpliquée» (8,1%) de l'écart salarial, après la prise en compte des différentes variables mentionnées précédemment, elle reste bien trop élevée pour l'USS et repose sur des structures discriminatoires dans le monde du travail et dans la société en général.

«Nous avons sévèrement critiqué les résultats de l’étude parce que la situation est intolérable. Les chiffres montrent très clairement que le travail des femmes est toujours sous-évalué en Suisse», fustige Regula Bühlmann, secrétaire centrale de l’USS.

Et de compléter: «La crise sanitaire du coronavirus n’a pas aidé à la situation, notamment pour les métiers dits plus féminins (dans le secteur de l’économie ménagère, de la santé ou du social... ). Le salaire des femmes dans ces secteurs ne correspond ni aux services qu’elles rendent à la société, ni à la grande responsabilité de ces travaux. Il faut urgemment des améliorations. Il faut lutter non seulement contre les discriminations salariales, mais également contre les bas salaires de ces professions dites féminines.»

Pour endiguer ce phénomène, l'USS «exige la mise en œuvre systématique et déterminée de la révision de la loi sur l’égalité (LEg)». Regula Bühlmann estime qu'«une série de mesures doit urgemment être mise en place. Des mesures comme des meilleurs salaires dans les branches dites féminines, une répartition équitable entre les mères et les pères du travail familial non rémunéré ainsi qu’un nombre suffisant de structures d’accueil financées par l’État, telles que les crèches et l’accueil extrascolaire».

Ces mesures sont-elles réalisables rapidement? «Elles sont parfaitement faisables, mais il faudra sans doute patienter encore. Je doute que le politique se mette rapidement à l'œuvre, surtout quand il s’agit des questions sur l’égalité des genres», conclut la secrétaire centrale de l’USS.

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