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Les Lionnes espèrent rugir aussi fort que leurs homologues masculins

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Dynamiques et véloces, à l’image du sport qu’elles pratiquent, les Lionnes du LHC se racontent avec passion et s’entraînent sans relâche. Elles nous ont ouvert la porte de leur vestiaire et entraîné sur la glace, ce début juin 2021.

© Corinne Sporrer

L’une après l’autre, les créatures casquées entrent sur la glace, prenant de la vitesse pour faire le tour de la patinoire. Le bruit de la lame, celui de la canne, du puck qui frappe les bandes, tout donne le frisson. Avec ce petit détail, insolite, des queues-de-cheval qui dépassent de l’attirail. Ce jeudi soir à la Vaudoise aréna, les hockeyeurs sont des hockeyeuses. Elles s’entraînent avec passion. Pour elles, simplement, le combat n’est pas seulement sur la glace. Il est aussi symbolique, comme elles l’ont raconté, un peu plus tôt, avant de chausser leurs patins.

Elles ne se plaignent pas d’être en Ligue C, ce n’est pas leur genre. Mais elles rêvent d’atteindre de nouveaux sommets. Surtout, elles pensent à la relève. Elles veulent faire évoluer le hockey féminin à Lausanne pour que les petites filles qui commencent à jouer puissent un jour atteindre la lettre A, jouer dans l’élite féminine suisse. Il y a encore du travail, mais elles ont des pistes.

Evolution de carrière

D’abord, l’égalité des chances passerait par une solidité accrue dans le cheminement de l’athlète dès le départ.

«Il est urgent de faciliter l’entrée des hockeyeuses en sport-études. Quitter l’idée qu’une fille prenne potentiellement la place d’un garçon qui pourrait se développer professionnellement», explique Jenna Layat, 26 ans, étudiante en 4e année de médecine.

Aujourd’hui, Lausanne n’a pas encore d’équipe en Ligue A. «Les joueuses de bon niveau qui veulent accéder à l’élite n’ont pas beaucoup de choix en Suisse romande: Ligue A à Neuchâtel, Ligue B à Fribourg ou dans le Jura bernois», explique Annick Berchtold, 50 ans, informaticienne. Celle qui pratique le hockey depuis 10 ans est aussi présidente et coach de la Girls Ice Hockey Association qui promeut le hockey auprès des jeunes filles afin qu’elles puissent intégrer les équipes féminines actives dès 12 ans – soit en licence A, espoir ou B. «On leur donne l’opportunité de jouer ensemble, tout en continuant d’évoluer avec les garçons.»

Silène Guy, 32 ans, capitaine et vice-présidente des trois équipes du groupement Hockey Clubs Féminins Lausannois, ambitionne une promotion en Ligue B avec le LHC Féminin. «Mais il faudrait au moins obtenir un deuxième entraînement par semaine, comme la plupart des clubs féminins.» Elle mène cette bataille depuis le mois de janvier et va la gagner: «La planificatrice des surfaces de glace me l’a confirmé à 90%.»


Pas d’argent, pas d’évolution

L’argent joue également un rôle. Etre payées à titre de joueuses professionnelles, comme les hommes. Avoir, comme les hommes, la liberté de consacrer toute leur énergie au hockey. Parce qu’actuellement, elles sont à des années-lumière de la Ligue A masculine et de ses icônes aux contrats à six chiffres.

Sans l’économie générée par des championnats professionnels, le hockey féminin est réduit à redoubler d’imagination pour financer son existence. Alors des initiatives en tous genres fleurissent. Action gobelet, où les spectateurs d’un match de National League (la première division suisse masculine) offrent la consigne de leur gobelet (2 fr./gobelet) à l’équipe féminine; Action vente de porte-clés, au Pop-up store du LHC, installé l’hiver dernier au Flon. La dernière remonte à deux semaines: une vente aux enchères des casques des joueurs professionnels de la première équipe du LHC. Les bénéfices ont été répartis entre les trois équipes féminines. La capitaine, optimiste, n’y voit rien de dégradant: «C’était une super initiative prise par le club qui a renfloué notre budget de la saison. Cette action nous a aussi donné une belle visibilité. C’est important de montrer qu’il y a des équipes féminines.»

La capitaine décrit son rêve: «Ça serait génial que nos maillots et nos casques, mis aux enchères, puissent rapporter les mêmes sommes! Qu’on cesse de promouvoir les filles par les garçons…»

Indéniablement, l’aspect financier semble le défi majeur à surmonter pour guider le hockey féminin vers de nouveaux sommets. «Il est temps que le hockey féminin bouge! Il nous faut une équipe de Ligue A et une de Ligue B. Maintenant que le HC Féminin Lausanne (ndlr: le deuxième club féminin à avoir vu le jour en Suisse en 1981) fait partie de la grande famille du Lausanne Hockey Club (depuis octobre 2019), on espère que ça facilitera la recherche de sponsors et la visibilité dans les médias», déclare Jasmine Fedulov, 22 ans, qui vient d’enfiler le chandail des Lionnes après deux saisons en Ligue A à Lugano et une à Neuchâtel.

Un jeu en finesse

L’égalité est-elle plus difficile à atteindre dans ce sport réputé rude et viril? Chez les hockeyeuses, le choc physique n’est pas admis. La capitaine commente: «Ce sport est connoté masculin, c’est vrai. On ne verra jamais une joueuse défensive projeter le haut de son corps dans un mouvement délibéré pour frapper le porteur de rondelle en étant huée par un groupe de fanatiques du camp adverse.»

Jenna Layat, sur la glace depuis l’âge de 6 ans, complète avec enthousiasme: «Si on me dit qu’on intègre le body check, je dis: cool.» Elle reconnaît toutefois: «Ce n’est peut-être pas très féministe de dire ça, mais on ne peut pas demander à une femme de faire la même chose qu’un homme. Il y a des différences physiologiques. Une femme ne sera jamais aussi rapide qu’un homme. Le hockey féminin est simplement différent, mais cela n’enlève en rien la beauté de ce sport.»

Au contraire, «le jeu féminin est plus fin, technique et stratégique», estime Jasmine Fedulov, qui pratique le hockey depuis sa plus tendre enfance.

La fille d’Igor Fedulov – figure du hockey russe puis suisse, passé par le LHC – tient à souligner: «La mise en échec est dangereuse. L’interdire, c’est prévenir les commotions.»

Pandémie et égalité des sexes

Privées de championnat de SWHLC, la Swiss Women’s Hockey League C, mis à l’arrêt à cause de la pandémie du coronavirus, les Lionnes ont aussi dû renoncer à une autre composante importante: l’entraînement. Ce qui n’était pas le cas de tout le monde. Depuis octobre 2020, seules la Ligue A féminine, la National League et la Swiss League masculines, ainsi que les U-21 (juniors élites de moins de 21 ans) ont pu jouer. Depuis avril, le Conseil fédéral et Swiss Olympic ont autorisé le redémarrage de la MySports League, la 3e division masculine. Les délégués au sport féminin ont obtenu par égalité de traitement que les trois premières divisions féminines soient logées à la même enseigne. Alors, l’équipe de Silène Guy a pu recommencer les entraînements, contrairement aux équipes de ligues inférieures. «C’est un joli pas pour l’égalité des sexes. Dommage qu’il ait fallu une pandémie pour y arriver», conclut la capitaine.

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