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L'édito de Géraldine Savary: «Quand les oisillonnes quittent le nid»

Géraldine Savary rédactrice en chef Femina éditorial

«Pendant que mes filles prennent leur envol dans des endroits excitants, je me balade dans un appartement vide qui paraît immensément grand, je passe d’une chambre à l’autre, à me prendre les pieds dans le cordon ombilical.»

© ANOUSH ABRAR

Voilà que mes deux filles ont désormais quitté la maison. L’aînée depuis un moment pour suivre des études à l’autre bout du pays, la deuxième, depuis quelques semaines et officiellement pour une durée limitée, pour apprendre la langue des autochtones dans une capitale pluvieuse. Et le pire, c’est qu’elles sont contentes, indépendantes, fières de leur choix. Rien de la maison ne semble leur manquer, et encore moins leurs parents. Une fois par semaine on s’appelle, j’espère une petite note triste dans la voix qui dirait que c’est dur de vivre sans papa et maman et ô combien elles chérissent les soirées familiales sur le canapé du salon. Je me contenterais même d’une nostalgie du risotto maison, du frigo plein, des armoires rangées, de l’animal de compagnie qui ronronne sur son lit. Mais non, il faut s’y faire, un jour, nos enfants vivent très bien sans nous.

Pendant que mes filles prennent leur envol dans des endroits excitants, je me balade dans un appartement vide qui paraît immensément grand, je passe d’une chambre à l’autre, à me prendre les pieds dans le cordon ombilical.

J’y croise un conjoint tout aussi désorienté, on se dit, «ah mais vous aussi vous vivez ici»? Il faut réinvestir les espaces auparavant zones de non-droit pour les plus de vingt ans sans en faire des autels du souvenir, laisser les lieux en attente d’un retour et les réhabiter en même temps, imaginer chaque soirée en tête à tête comme une pluie d’étincelles, et s’élancer vers le week-end avec des idées d’activités pour adultes plein la tête. On invite des gens comme nous, les abandonnés, on bouge les meubles, on installe des bougies parfumées.

Se réapproprier sa vie

Plus besoin de rentrer pour faire les devoirs, de courir sous la pluie avant la fermeture de la garderie, fini les nuits sans sommeil à attendre que l’oiselle rentre dans son lit. Impossible d’invoquer l’excuse des obligations maternelles pour éviter de commencer le sport, plus de stress à devoir tout concilier, vie professionnelle et vie familiale, on peut désormais bosser sans limite. La liberté est à portée de main, on ne sait plus comment la saisir. Il s’agit de tout réinventer, de se réapproprier sa vie.

J’ai lu que nous sommes 35% de mères dans le monde à souffrir quand nos enfants abandonnent le nid. Et les pères le cachent un peu plus mais leur petit cœur pleure aussi. J’ai appris aussi que cette période étrange passe, et qu’un jour, on dit «chic, les enfants arrivent», et «ouf ils sont repartis».

À lire sur le sujet: Le nid vide, récit d’un mal de mère, Marie-José Astre-Démoulin, Éd. Favre, 2022

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