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Une belle aventure, contrariée par une météo exécrable, qui a contraint l’organisation a suspendre leur course. Voici le carnet de route de Joséphine et Fanny autour de cette course si particulière cette année. Entre motivation… et déception!

Joséphine Reitzel

«A se demander ce qu'on fait là-haut (comme l'a très bien dit Nicole lors de l'interview de la RTS à Tête Blanche: «C'est vraiment pas un temps à faire de la montagne!»).

Conditions assez venteuses (je pense que 80 km/h est une moyenne assez modeste et que la réalité était autre - plus violent que 80 km/h), un vent qui nous a rendu la tâche difficile. Je pense qu'on a eu la chance de vivre une première moitié assez intense et fantastique. On a réalisé que notre équipe fonctionne bien et que c'est de bon présage pour l'avenir. Je sais qu'on pourra compter sur Hugo Reitzel (Bernard Poupon, le PDG parle déjà de 2014… il est supercontent de nous). Donc on y pense déjà… Maintenant c'est aux filles de bien vouloir me supporter encore une fois;-), mais je crois que la aussi c'est OK… C'est la montagne qui décide et nous quand on décide de s'inscrire on accepte ce contrat… C’est-à-dire qu'on accepte que la montagne ne veuille pas que la patrouille se déroule…»

La course

«Magnifique ambiance au début, très chaud… Des ravitailleurs hautement motivés (3 heures du matin un ravitailleur nous donne du thé à Schönbiel… ça fait chaud au cœur!).»

Perso, je me sentais bien. J'avais la pêche et la motive. Le vent m'a fait souffrir au niveau des mains. J'ai les mains très sensibles au froid et du coup j'ai eu de la peine à me réchauffer. C'est un de mes points faibles mais les filles ont été très tolérantes et solidaires à ce niveau… Déçue de ne pas continuer forcément car je savais qu'on était bien partie pour faire cette patrouille en moins de 10 heures. Mes collègues quant à elles semblaient plus apprécier la nouvelle (course neutralisée). Nicole a dit à l'arrivée que c'était la meilleure nouvelle de la journée:-), Fanny était malade. Du coup bien qu'elle semblait reprendre le dessus à mesure qu'on avançait, elle était bien contente de finir à Arolla (10 h quand t'es mal c'est long…). Du coup je me dis que c'est pas plus mal et que dans 2 ans tout ira bien… Cela nous laisse le temps de bien peaufiner des détails qui peuvent nous faire gagner un temps précieux.»

Les projets

«Etant donné qu'on est équipée comme quasi des championnes grâce à La-Haut, le magasin de montagne à Sion et que Hugo Reitzel nous soutiendra pour l'édition 2014, on a plus trop le choix (et c'est aussi avec plaisir) que de s'entraîner d'ici là. Les prochaines courses sont agencées: Gastclosen 2013, Pierra Menta 2013… On sera donc à la patrouille en 2014 si tout va bien!»

Fanny Viret

«Une bonne entente au sein de l'équipe, solidarité et motivation entre coéquipière… et surtout la patience et le soutien de mes coéquipières.

Pour moi, un départ difficile, jambes et souffle pas au rdv de mon côté, grosse déception vis-à-vis de moi-même, je comprends pas, je donne tout ce que j’ai et je serre les dents pour ne pas décevoir mon équipe, elles sont patientes et compréhensives, elle m’entoure, une devant, une derrière moi, elle se relaye pour donner le rythme et me soutenir. Moi, je serre les dents, je parle à mon corps qui ne semble pas répondre, je l’encourage, je me dis qu'il faut juste que la machine se mette en route et que ça va donner le tour mais quand même, j'ai pas la forme des grands jours et je suis frustrée de moi-même. Le mental fera le reste, je me donne des coups de fouet mental pour avancer et tenir tant bien que mal le meilleur rythme possible. Les filles sont des anges. Je ne veux pas les décevoir, elles ont tant investi dans ce projet… je sais qu'on peut y arriver, j'y crois, il faut y aller, il faut avancer. Malheureusement, à cause de mon faux départ, on est larguée toute seule derrière, loin du peloton, bien qu’on voit leur lumière pas trop loin devant, c’est beau cette colonne lumineuse, en fait moi j’aime bien être seule et pas dans la foule du départ, mais c’est vrai que si on était avec les autres, le rythme serait différent, mais il semble que de toute façon, le rythme aujourd'hui je n’arrive pas a le suivre. Arrha, pourquoi aujourd’hui, c’est le grand jour, toute la saison, j'allais plutôt bien, alors pourquoi aujourd'hui mon corps est off… Grande leçon d'humilité.

Quand même, une fois la partie marche a pied terminée, on met les peaux, ça va, je me sens bien, ça donne le tour, youppie, c’est plat, mes longues jambes font de grandes enjambées du coup je me retrouve un peu devant, bon, j'attends l’équipe, On reste plus ou moins ensemble, on arrive a Schönbein avec 5 minutes d’avance sur notre timing, quel soulagement, je suis pas trop a la rue finalement. Puis la montée a Tête Blanche, les traces sont raides et difficiles, ça glisse, il faut être concentrée, le vent souffle par rafale de plus en plus fort, heureusement il ne fait pas trop froid mais avec nos petites combis on a quand même pas si chaud. Nicole est en milieu de corde, Joz et moi on se relaye pour leader l'équipe, moi j'arrive pas mal techniquement mais mon rythme est un peu lent, Joz a un bon rythme mais elle glisse un peu plus, Nicole nous encourage, on a l'impression de pas avancer contre ce vent et dans ces traces qui glissent, Nicole tente désespérément de donner le rythme, de nous faire accélérer. On doit s’arrêter mettre une couche, on le fait aussi vite que possible. Tête Blanche, enfin, rafale de vent, camera de la RTS, «Mais qu’est-ce qu'on fait la, dans ces conditions?» commente Nicole, on enlève les peaux et on descend a skis, prudemment, rafale de neige nous bloque la visibilité occasionnellement, Nicole tente de nous diriger, plus vite, doucement, a droite, a gauche, y a des grosses accumulations de neiges soufflées… attention de pas se prendre un ski dedans… plus vite, on remet les peaux au plan de Bertolt et on remonte vite fais le petit bout jusqu'au col ou l'ont apprend que la course sera arrêtée a Arolla… Bon, voila, je lâche, pas la peine de risquer se blesser sur un des multiples cailloux caches derrière une bosse dans la descente. Joz n’a pas compris que c’est fini, elle fonce, s’arrête, nous attend, Moi et Nicole, on la joue sécurité avant tout, pas de risques, je descends tranquille, on passe la ligne d'Arolle et sur le moment, je me dis Ouf… le destin aura bien fait les choses. On boucle quand même ce bout de chemin en moins de 5 heures, normalement on avait prévu d’être à Arolla en 4 h 30. On est donc 25 minutes derrière notre timing prévu qui nous aurait fait finir la PDG en 9 h 30. Aurait-on réussi à la finir en dessous de 10 h 00? Personne ne le saura, ni vous, ni nous, car il y a bien trop de facteurs d'imprévisibilité… cela restera un mystère mais une chose est sûre c’est que de boucler Zermatt-Arolla en moins de 5 h dans les conditions venteuses de Tête blanche, c’est déjà pas si mal, pas des amatrices comme nous et que le but pour 2014 sera de le faire en mieux.

Dans tous les cas, a part de maintenant devoir me concentrer sur mes études que j’ai pas mal du mettre de cote ces derniers temps à cause de l’organisation de cette PDG, je suis supermotivée a mettre a profit ce bel équipement que l'on a eu par Céline du magasin Là-haut et ces combinaisons magnifique de Hugo Reitzel… donc pour moi, c’est un chapitre qui se termine mais non pas la fin d’une histoire… des projets fixes… pas encore, mais la motive pour continuer quelques courses d'alpin de temps à autre, alors oui, et cette patrouille aura été une expérience bénéfique a tout niveau pour pouvoir s'améliorer et tirer profit des choses qu'on a expérimentées et que l'on peut faire mieux une prochaine fois. Mais maintenant, place à la montagne plaisir, au gros ski, aux beaux sommets hors des contraintes d'entraînement et compétitives… c’est-à-dire, la montagne pour de vrai!»

Nicole Berthod

Voilà, après plusieurs semaines d’entraînement et de préparatifs, le jour J approchait furieusement. Dans une semaine, le départ serait lancé. Le programme de ces derniers jours allait être assez simple: siesta, acqua et pasta, autrement dit, beaucoup de repos, plusieurs litres d’eau par jour et beaucoup de sucres lents, tout ça pour arriver en top forme le jour de la course! Mais cette dernière semaine allait aussi être jalonnée d’incertitudes et de doutes. En effet, cela faisait plusieurs semaines que la météo n’avait plus affiché franc beau, et le départ du jeudi avait dû être annulé pour cause de vent fort. Ça m’avait un peu ébranlée, et je commençais à envisager toutes les éventualités: Ne pas partir, partir et être interrompues, partir et finir la course…? A quelle sauce allions nous être mangé? En plus des conditions météo, il y avait tant de variables et tant d’inconnues qui pourraient nous barrer le chemin de Verbier. Dans une course comme celle-là, il faut quand même avoir un peu de chance.

Et la chance n’avait pas été au rendez-vous pour les coureurs du jeudi. Course interrompue pour certains, annulée pour d’autres, la météo avait stoppé tous les concurrents au départ de Zermatt. Et nous? Je me faisais donc gentiment à l’idée que tout ne se passerait pas comme prévu, que peut-être nous ne partirions pas, et que parfois, c’est bien aussi quand ça ne va pas comme on veut. J’ai toujours eu l’impression qu’il était important de savoir se laisser ébranler par la vie, de se faire déstabiliser dans nos certitudes. L’heure était donc aux remises en question. Pourquoi tous ces sacrifices, tout ce remue-ménage autour de cette course, était-ce bien fondé? À quoi bon, et dans quel but? Quelques semaines avant la course, tous les coureurs ont reçu un questionnaire psychologique de la part de l’Université de Genève. On parle beaucoup de dopage et autres problèmes de santé qui touchent les concurrents, mais pourquoi ne parle-t-on pas des problèmes familiaux, des problèmes psychologiques et des dépressions qu’entraînent ce genre de compétition ultramédiatisée et ultrapopulaire?

La fin de semaine s’écoula donc péniblement, entre excitation et remises en questions. De plus, le soutien de mes proches était mitigé. J’ai toujours beaucoup aimé ces ambiances de courses, mais dans la famille je vais un peu à contre-courant de ce qui se fait. Alors, en plus des préparatifs et de l’incertitude du départ, il fallait gérer cette incompréhension. Je me retrouvais donc tiraillée entre l’émulation populaire et le recul qu’avaient certains, ce qui était tout de même bénéfique pour moi dans un certain sens. Essayer d’avoir une vue d’ensemble et de ne pas se laisser aveugler, ça me semble superimportant.

Vendredi en fin de journée, nous embarquions dans le train pour Zermatt. On repérait les coureurs, équipés de petits skis légers, une bouteille d’eau à la main. Arrivés à la station, tout me paraissait trop calme. Était-ce vraiment d’ici qu’allaient s’élancer des centaines de concurrents? Il faut croire que tous avaient le même programme: siesta, acqua pasta, mais en cet après-midi, c’était surtout la siesta qui primait. Les premiers départs ont eu lieu à 21 h. Ce fut un gros soulagement, des patrouilles partaient, c’était donc plutôt bon signe pour nous!

1 h 00, c’était à notre tour de s’élancer dans cette folle aventure. Coup de feu, cris d’encouragements, c’est en trottant qu’on traversa Zermatt. Puis, le bain de foule terminé, on se retrouvait seules sur un petit sentier qui nous conduisait à Staffel, là où nous mettrions les skis. Fanny ne se sentait pas trop bien, j’essayais de la rassurer. C’est dur d’être dans le rouge dès les premières foulées d’une course de 4000 m de dénivelée, mais tout allait bien se passer pour nous, il fallait chauffer la machine. Et en effet, une fois les skis aux pieds, elle a donné le tour. Devant, avec ses longues jambes, elle glissait sur le plat au-dessus de Staffel à un superrythme.

Nous avons atteint le premier poste de Schönbiel dans les temps que nous nous étions fixés, soit 2 h depuis Zermatt. Encordées, nous poursuivions notre route vers Tête blanche. Mais plus nous montions, plus le vent forcissait. Cette fois-ci, un autre souci se présentait à nous. Il fallait se protéger, éviter à tout prix de se geler quelque chose, et être attentif à Joséphine qui souffre beaucoup du froid. On enfilait donc tout ce qu’on avait pris avec, mais autant dire que ce n’était pas grand-chose comparé à ce qu’on prendrait pour une journée pour soi en montagne. Pour moi, ce fut le gros défi de cette partie de la course: réussir à faire le mélange entre esprit montagne et esprit compétition. Tout avait été aseptisé, préparé pour nous, voilà des semaines que les militaires s’affairaient là, mais malgré tout, on était en altitude. On n’avait aucun matériel pour être réellement autonome, et aucune marge de manœuvre pour réfléchir à quoi que ce soit. Il y avait là des gens qui jugeaient à notre place de la situation et du bien-fondé de se trouver là-haut par ces conditions. Je m’en remettais donc à eux, tentant de stopper toute réflexion du genre.

Après le passage de tête blanche, on filait vers la cabane Bertol. J’ai souvent parcouru ce tracé magnifique, et j’apprécie bien cette région car j’ai passé de nombreuses saisons à travailler comme aide dans cette cabane. J’étais contente d’être là, et puis il y a eu cette petite voix dans la nuit: Aller Nicole! C’était Mélanie, une copine qui était aussi sur le parcours avec sa patrouille. J’avance avec le mental, et croiser des gens qui me sont proches me fait toujours tellement de bien, ça donne un coup de boost! Ils me transmettent de la joie et de l’énergie!

Mais à Bertol, le verdict tombait: la course était arrêtée à Arolla. C’est un copain qui m’a annoncé ça et au début j’ai cru qu’il me faisait une blague. Et puis non, c’était vraiment ça, tout allait s’arrêter quelque 1500 mètres plus bas.

On est donc descendu tout tranquille vers la vallée, histoire de ménager la monture. Voilà, le reste de l’histoire est connue: tente, car et retour à Verbier, tout cela était un peu irréel après une nuit blanche et une demi-course.

Donc pour conclure, la patrouille ça restera pour moi surtout des rencontres, elle est faite de gens, de sourires et d’émotions. Je suis épatée de l’émulation qu’elle entraîne, c’en est presque fou! Et puis c’est merveilleux tous ces gens qui étaient prêts à nous aider, qui se sont impliqués dans le projet malgré le peu qu’on avait à leur offrir en retour.

Et cette confrontation avec la nature, qui fait que tu as l’impression de te sentir vivre. Le vent, le froid, la neige… Tous ces éléments t’accueillent là-haut et te font sentir plus vivant!

Concernant notre équipe, je crois que c’était déjà une bonne expérience de pouvoir aller jusqu’à Arolla. Ça nous a permis d’avoir un point de repère et d’accumuler de l’expérience sur ce tracé. Mais j’ai aussi le sentiment qu’il nous faudra encore beaucoup apprendre et mûrir pour ce genre de course.

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