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Deuil périnatal: comment mieux soutenir les parents?

Deuil périnatal: comment survivre à la perte d’un enfant?

Immortalisés à Madrid en 2019, Cristiano Ronaldo et Georgina Rodriguez attendaient des jumeaux. Malheureusement, l'un d'entre eux n'a pas survécu.

© GETTY IMAGES/OSCAR DEL POZO

«C’est avec la plus profonde tristesse que nous devons annoncer que notre petit garçon est décédé», a écrit le footballeur Cristiano Ronaldo dans un texte poignant publié sur Instagram le 18 avril 2022 et co-signé avec sa compagne, Georgina Rodriguez. Alors qu’elle devait accoucher de jumeaux, la jeune maman a vécu le pire: seule la petite fille a survécu. Ce drame met tristement en lumière le quotidien de nombreuses familles: selon les statistiques, une grossesse sur quatre se solde par un décès (toutes pertes confondues, y compris les fausses-couches précoces et les IVG).

Comment expliquer qu’une expérience si fréquente soit pourtant encore taboue dans notre société? «La perte d’un bébé est quelque chose qu’on ne souhaite jamais vivre, note Marie Rosset, co-fondatrice de l’association neuchâteloise Notre petite parenthèse. Mourir avant de naître est totalement illogique. Beaucoup ne savent pas comment réagir, gérer cette douleur, reconnaître cet enfant qui n’a jamais vu le jour.» C’est en faisant l’expérience du deuil périnatal que Marie Rosset a décidé de créer son association il y a deux ans, en collaboration avec deux amies ayant le même vécu. «En sortant de l’hôpital, nous nous sommes toutes les trois senties extrêmement seules, se souvient-elle. Aujourd’hui encore, beaucoup de couples se retrouvent livrés à eux-mêmes.»

Combattre l'isolement et la solitude

Une fois par mois, les trois amies mettent ainsi en place un groupe de parole portant sur le deuil périnatal. «Nous ne sommes pas thérapeutes: nous avons des formations dans le deuil, mais nous sommes avant tout trois mamans qui avons vécu cela, prévient Marie Rosset. Nous suivions des thérapies, bien sûr, mais ce qui nous faisait le plus de bien, c’était de voir des gens qui avaient vécu cette expérience. On se sent souvent très seul-e et isolé-e dans ces moments si douloureux.»

Cristiano Ronaldo n’est pas le premier à prendre publiquement la parole pour partager son vécu. En 2020, le mannequin américain Chrissy Teigen publiait un cliché de son fils défunt, Jack, et partageait les différentes étapes menant à son interruption de grossesse. Pour Marie Rosset, les témoignages de célébrités sont précieux pour faire évoluer les mentalités: «Cela permet de libérer la parole de celles et ceux qui souffrent». En tant que proche, comment peut-on soutenir ces parents endeuillés? «Cela ne part jamais d’un mauvais sentiment, mais il faut éviter à tout prix les paroles du type "vous en aurez d’autres", "ce n’était qu’à 5 mois de grossesse" ou "la vie continue", ces phrases consolantes qui ne réconfortent pas du tout, au contraire. Envoyer des petits messages du type "Je pense à vous", "Je suis là pour vous", "De quoi as-tu besoin?" est souvent la meilleure façon d’agir.»

Pour l’experte neuchâteloise, le fait d’oser simplement toquer à la porte, prendre les parents dans ses bras, apporter des fleurs ou un repas est souvent synonyme de réconfort. «Je conseille également de nommer l’enfant décédé s’il a un prénom et de ne jamais minimiser cette perte, complète-t-elle. Enfin, il est à mon sens important de ne pas projeter ses propres croyances sur les histoires des autres, de ne pas tenter de trouver du sens à cette terrible épreuve. Le pire, ce serait de faire comme si ce bébé n’avait pas existé: il faut en parler, tout en restant à l’écoute des parents endeuillés. Certains jours, ils auront peut-être davantage envie de l’évoquer que d’autres.»

Il n'est jamais temps de «passer à autre chose»

Le pire, pour celles et ceux qui traversent cette épreuve, est souvent de devoir faire le deuil de l’avenir que l’on projetait avec cet enfant. Que fait-on de tout cet amour que l’on ne peut pas donner? Chacun-e fait son cheminement à son rythme et l’éventuelle naissance d’un nouvel enfant ne saura jamais remplacer le décès d’un bébé. «Ce qui ressort des groupes de paroles, c’est aussi le fait que l’on ne se sent plus libre d’en parler à partir d’un certain temps, de peur de lasser son entourage, note Marie Rosset. Certain-e-s entendent des phrases du type "Il est temps de passer à autre chose maintenant". C’est culpabilisant et totalement improductif.»

Se remet-on un jour d’une épreuve aussi douloureuse? «Cela laisse toujours une cicatrice, répond la spécialiste. Pour moi, c’est comme un accident de la route, il faut apprendre à vivre avec cet enfant qui n’est pas là, qui ne sera jamais là. Au début, c’est très compliqué, surtout pour la maman, car on sort de l’hôpital en étant physiquement enceinte. Le corps met du temps à assimiler, les symptômes de la grossesse ne se stoppent pas du jour au lendemain. Psychologiquement, c’est très violent.» Le parcours est ensuite jalonné de plusieurs étapes difficiles, comme le retour à la maison avec une chambre préparée pour un nouveau-né qui ne sera pas occupée, ou la reprise professionnelle entouré-e de collègues souvent gêné-e-s et mal à l’aise.

«Pour que nos étoiles brillent encore»

Au niveau médical, même si les choses évoluent, il reste beaucoup à faire pour soutenir les parents. «Nous militons notamment pour une professionnalisation du personnel: pour les infirmières et les infirmiers, la formation sur le deuil périnatal est bien trop minime, souligne Marie Rosset. De plus, il est essentiel de prévoir un secteur dédié à ces personnes dans les hôpitaux. Entendre le bébé pleurer dans la chambre d’à côté, c’est très difficile à vivre. Tout comme les salles d’attente dans les cabinets gynécologiques: on se retrouve souvent assise à quelques mètres d’une femme enceinte de 8 mois qui caresse son ventre… La maternité touche la vie, mais peut aussi toucher la mort. On en parle très peu, car on n’a pas envie d’y penser, mais c’est une réalité.»

L’association Notre petite parenthèse a produit un film documentaire regroupant une vingtaine de témoignages pour sensibiliser le public à la thématique du deuil périnatal. À disposition des soignant-e-s, Pour que nos étoiles brillent encore sera également diffusé le 15 octobre 2022, journée mondiale du deuil périnatal, dans un lieu qui reste à définir.

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