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Rapport sexuel

Ce que risquent les adeptes du stealthing? Pas grand-chose

Tinder stealthing preservatif

En Suisse, retirer furtivement son préservatif sans en informer l’autre n’est pas expressément punissable par une disposition du Code pénal.

© Line Rime

Accepter de mettre un préservatif avant un rapport sexuel, mais l’enlever en pleine action à l’insu de son ou sa partenaire, est-ce une forme de viol? Oui, a statué la Californie, qui vient d’inscrire cette pratique, appelée stealthing, dans son Code pénal. Il y a quelques semaines, l’Australian Capital Territory, l’Etat australien comprenant Canberra, a également décidé de la criminaliser.

Des cas isolés, car aucune autre juridiction dans le monde ne reconnaît explicitement ce geste comme illégal, qu’une femme sur trois a pourtant subi au moins une fois dans sa vie, selon une étude australienne. Bien que ce genre d’acte soit de plus en plus dénoncé, il mène rarement devant la justice.

Surtout des acquittements

En Suisse, ainsi, retirer furtivement son préservatif sans en informer l’autre n’est pas expressément punissable par une disposition du Code pénal. Une recherche dans les archives nous apprend pourtant qu’une personne a déjà été condamnée pour un tel geste dans notre pays. C’était en 2017: le Tribunal cantonal vaudois avait alors reconnu un homme coupable d’avoir trompé sa partenaire en enlevant son préservatif sans lui demander sa permission.

«Le problème est que le jugement n’a pas retenu le qualificatif de viol, mais plutôt celui d’acte d’ordre sexuel sur une personne incapable de discernement, ce qui n’a pas la même gravité aux yeux de la justice», déplore la conseillère nationale Léonore Porchet.

Un verdict qui demeure une exception: toutes les autres affaires comparables portées devant un tribunal suisse se sont soldées par un acquittement. «La situation sur le sujet n’est actuellement pas très claire et tout dépend de l’appréciation du juge», nous confie un procureur romand.

Loi d’une autre époque

Ce flou juridique aurait, théoriquement, des chances de changer avec la prochaine révision du droit pénal en matière sexuelle. Le terme de stealthing est d’ailleurs évoqué noir sur blanc dans le rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats, publié début 2021. Mais patatras: cet été, le rapport sur les résultats de la consultation informait que le concept de stealthing ne figurera sans doute pas comme tel dans la loi fédérale.

«On peut en effet douter que ce geste soit inclus dans les infractions existantes», nous confirme le Département fédéral de justice et police (DFJP). «C’est quand même affligeant de se dire qu’on révise le Code pénal en 2021 et qu’on ne prévoit toujours aucune place pour ce type de pratique, s’énerve Léonore Porchet.

C’est vraiment ignorer complètement ce qu’est une agression sexuelle. Le droit actuel découle d’une époque où ce genre d’acte n’était pas envisagé, d’où la nécessité, aujourd’hui, d’apporter des révisions sur le sujet.»

Des impacts sanitaires et sociaux

D’autant plus que le stealthing n’est pas anodin, souligne la conseillère aux Etats Lisa Mazzone: «Il y a un tort moral certain puisqu’il y a la volonté de tromper l’autre. On passe outre son consentement. Les conséquences sur la santé peuvent également être sérieuses, car on expose la victime à une grossesse non désirée et à des maladies sexuellement transmissibles. Le fait d’ignorer que le préservatif a été retiré ne donne d’ailleurs pas la possibilité de recourir à la pilule du lendemain ou à un traitement préventif contre le VIH.»

Mais tout n’est peut-être pas perdu. Si la révision du droit pénal ne retient pas le terme de stealthing, elle pourrait donner des armes supplémentaires selon qu’elle intègre ou non le concept de le concept de consentement, l’un des piliers possibles de la future loi. Si le droit suisse le retient pour sa nouvelle mouture, «le stealthing pourrait devenir plus facilement attaquable par le biais d’articles condamnant les pratiques allant à l’encontre de la volonté», fait remarquer Lisa Mazzone.

Et même si, scénario du pire, la révision ne retenait ni stealthing ni consentement, «il demeure toujours la solution de la jurisprudence pour faire avancer les choses sur la question», positive la conseillère aux Etats.

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