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Octobre rose

Cancer du sein: le témoignage de 4 femmes sur la phase de rémission

Temoignages remission cancer du sein

«Même si l’on pestait de devoir se rendre fréquemment à l’hôpital, quand tout cela s’arrête, on se sent presque abandonnée», explique Carole.

© CLÉMENCE GOUY

«Le cancer s’apparente à un tsunami. Il détruit tout sur son passage et n’épargne aucun domaine de la vie. En rémission, on a l’impression que la vague vient de se retirer et qu’on doit tout reconstruire.» C’est ainsi que Mélanie, 40 ans, décrit la phase de l’après-cancer. Diagnostiquée en septembre 2020, la jeune femme a terminé les traitements en juin 2021 et s’est rendue à son dernier rendez-vous vêtue d’un costume de Wonder Woman. «En rentrant chez moi après la dernière de mes 25 séances de radiothérapie, je me suis sentie au bord d’un précipice, se souvient-elle. Je me demandais ce qui allait se passer ensuite.»

Car ce moment tant attendu, lorsque le médecin articule enfin le mot «rémission», provoque autant de soulagement que de difficultés. Les femmes concernées évoquent un raz-de-marée d’émotions, une fatigue accablante et la nécessité de s’écouter, pour réapprendre à conjuguer la vie au futur. Sans oublier la peur d’une rechute qui les hante à chaque contrôle médical. «La rémission complète est définie par l’absence de signes du cancer, précise la Dre Marie-Gabrielle Courtes, médecin cheffe de clinique à l’Unité d’oncogynécologie médicale des HUG. À partir de là, les contrôles comprennent les consultations cliniques régulières auprès du sénologue et de l’oncologue, ainsi qu’un suivi radiologique annuel par mammographie.» Ces derniers visent à détecter une possible récidive, dont le risque connaît son apogée durant les trois premières années. Or, notre experte souligne que les probabilités dépendent largement du type de cancer et de son stade initial.

Afin de diminuer ce risque, certaines patientes poursuivent des traitements durant la rémission. Parmi eux figure notamment l’hormonothérapie, administrée à la suite d’une tumeur hormonosensible (75% des cancers du sein) pour une durée de cinq à dix ans. Ses effets s’apparentent aux désagréments de la ménopause: «Elle se présente sous la forme d’un petit cachet qui passe presque inaperçu, raconte Carole, 49 ans, prononcée en rémission ce mois-ci. Mais elle implique des effets secondaires importants dont une grande fatigue, des douleurs musculaires, des problèmes de sommeil, des sautes d’humeur… Les gens ne s’en rendent pas forcément compte, car cela ne se voit pas.»

Pour cette maman de trois enfants, les bouleversements de l’après-cancer et les effets de l’hormonothérapie ont provoqué une dépression de deux mois: «J’ose dire que l’après-cancer est aussi difficile que le cancer, partage-t-elle. Je suis une personne très optimiste, je n’ai jamais rien lâché. Mais cela a été compliqué, même pour moi.» En plus de cette fatigue écrasante, Carole et Mélanie soulignent des troubles cognitifs liés à la chimiothérapie, pouvant perdurer durant la rémission. Pour toutes deux, ces effets ont énormément compliqué le retour à la «vie d’avant».

Une nouvelle version de soi

«Tous les traitements ne provoquent pas les mêmes effets secondaires et n’ont pas le même profil de toxicité, précise Marie-Gabrielle Courtes. La fatigue est le symptôme le plus fréquemment rencontré, et peut persister parfois plusieurs mois après l’arrêt des traitements.» Afin de limiter ces effets, la spécialiste recommande, lorsque cela est possible, de poursuivre une activité physique régulière ou de se tourner vers des approches de médecines complémentaires telles que l’acupuncture ou la réflexothérapie. L’écoute de soi, la patience et le lâcher-prise deviennent alors indispensables: «On a toujours envie de se comparer à la personne qu’on était auparavant, mais la maladie nous transforme, ajoute Mélanie. On devient une version 2.0 de celle ou celui qu’on était.

Je pense qu’il faut accepter cette nouvelle personne, que ce soit mentalement ou physiquement. On a peut-être pris du poids, notre poitrine a changé, notre corps est devenu vulnérable… mais il faut réapprendre à l’aimer pour avancer.»

Aimer son nouveau corps

En effet, le corps change également d’un point de vue visuel. Manon, diagnostiquée d’un cancer du sein alors qu’elle n’avait que 24 ans, a subi une double mastectomie avec reconstruction mammaire. Porteuse du gène BRCA1, lequel augmente fortement le risque de récidive, la jeune femme avait choisi d’éliminer l’épée de Damoclès qui menaçait son avenir. «Je me revois encore à la veille de l’opération, se souvient-elle. Je m’étais regardée nue dans le miroir de la salle de bains, en sachant que j’allais perdre mes seins.» Aujourd’hui âgée de 29 ans, la jeune femme est en rémission. Et son reflet dans le miroir lui convient: «Maintenant que j’ai mes deux seins, après toutes ces opérations, je les aime tellement! J’en suis tellement fière. Ils font partie de mon histoire, ce sont les miens, et représentent le témoignage de ce que j’ai vécu et enduré.»

Une soudaine solitude

De l’extérieur, il est difficile de se rendre compte à quel point les patientes et patients en rémission ont besoin de soutien, même lorsque l’épreuve semble remportée. L’entourage se dit alors que la personne est guérie et s’autorise à prendre du recul. Mais dans de nombreux cas, ainsi que le soulignent Carole et Mélanie, il reste encore beaucoup de combats à mener.

«D’un seul coup, les contrôles médicaux s’espacent, on ne voit plus le personnel soignant aussi souvent, explique Carole. Et même si l’on pestait de devoir se rendre fréquemment à l’hôpital, quand tout cela s’arrête, on se sent presque abandonnée.»

Loin de minimiser la difficulté de ces moments, les spécialistes soulignent l’importance du soutien des proches, pendant et après les traitements. «Nous avons la possibilité de proposer des médecines complémentaires aux patients, pour améliorer leur qualité de vie lorsqu’elle est altérée, ajoute Marie-Gabrielle Courtes. Un soutien psychologique et social leur est proposé tout au long de leur prise en soin.»

© CLÉMENCE GOUY

Préserver son projet d’enfant

Cependant, la rémission apporte aussi les promesses réjouissantes d’un avenir qu’on n’osait pas forcément contempler durant les traitements. Alexandra, 61 ans, diagnostiquée d’un cancer du mamelon en 2021, raconte son soulagement: «J’ai réalisé que la vie continue, malgré toutes les peurs engendrées par l’annonce de la maladie. J’ai eu l’impression que j’allais, grâce à cette épreuve, pouvoir vivre des expériences plus fortes.»

Pour Manon également, l’avenir se remplit de rêves: hors de question de faire une croix sur son projet d’enfant, qui reste largement réalisable malgré le cancer. «Les médecins ont longtemps été réticents à autoriser une grossesse après un cancer du sein, de peur de provoquer une récidive après le boost hormonal que représente la grossesse, nous rappelait le Dr Alexandre Bodmer, médecin responsable du Centre du sein aux HUG, dans un article publié sur femina.ch en octobre 2021. Or, plusieurs grandes études ont montré que la survenue d’une grossesse après le traitement d’un cancer du sein ne semblait pas augmenter le risque de récidive. On peut donc considérer que faire un bébé après un cancer du sein n’est pas du tout contre-indiqué.» Le spécialiste insiste toutefois sur la nécessité d’en parler avec l’oncologue et le ou la gynécologue.

Les choses sont toutefois un peu plus compliquées pour Manon: «Le gène BRCA1 provoque aussi les cancers de l’ovaire, qui sont très difficiles à détecter, explique-t-elle. Mon médecin m’a tout de suite préparée au fait qu’il faudra peut-être les retirer aux alentours de mes 40 ans, afin de prévenir la maladie. Il m’a expliqué que mon projet d’enfant devait donc être réalisé, dans l’idéal, entre 28 et 35 ans.»

Une découverte de soi

Le tsunami est passé, mais les fleurs repoussent sur la terre balayée. Les quatre femmes courageuses que nous avons rencontrées nous ont toutes parlé de renaissance, de découverte et d’écoute de soi, sans oublier les forces intérieures révélées sur le chemin. «Je me suis trouvée moi-même, déclare Carole. Bien sûr, j’ai vécu énormément de belles choses avant de tomber malade! Mais cette épreuve m’a appris à me faire passer avant, à m’écouter, à m’accepter. Je me suis découverte.» Et Alexandra de conclure: «Quand on est malade, on vit un peu en suspens. On est étonnée de voir les minutes passer quand même, malgré ce lourd défi qui nous est tombé dessus. Il faut bien vivre, alors on continue à avancer. Et tout d’un coup, on s’aperçoit qu’on a traversé cette période, que tout est derrière. Et qu’on a survécu.»

Quelques ressources Pour les patient-e-s et leurs proches

L’association Ose Thérapies, basée à Lausanne, propose des activités physiques ou créatives aux personnes en traitement ou en rémission. Les proches peuvent également y trouver du soutien.

À Genève, le Centre Otium aide les patient-e-s à prendre soin de leur corps et de leur mental, après ou pendant les traitements, via 40 prestations différentes dont la relaxation et le sport.

L’association française À chacun son Everest (dont les HUG sont partenaires) met en place des séjours bien-être, afin d’aider les femmes à mieux vivre l’après-cancer.

Organisés dans toute la Suisse, les ateliers bien-être et beauté de la Fondation Look Good Feel Better boostent le moral et la confiance des personnes touchées par un cancer.

Des informations et autres liens utiles sont disponibles auprès de la Ligue suisse contre le cancer, qui propose également du soutien pour l’entourage des personnes malades.

Sur la plateforme Parlons Cancer, il est possible d’échanger, de se soutenir et de partager des idées d’activités.

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