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Professeur de philosophie, de français et de théâtre dans un lycée neuchâtelois, et musicien et chanteur durant mon temps libre, j’ai débuté l’année 2016 en donnant un concert le 1er janvier. Pour la première fois, je ne chantais pas dans le cadre de mon groupe habituel mais en tant que Simon Frenkel, avec un répertoire plus personnel. Le bon accueil que j’ai reçu m’a donné envie de poursuivre en organisant une tournée de concerts en appartements. Le concept? Vivre de mes chansons en recevant gîte et couvert en échange d’un récital, cela dans les 26 cantons suisses. Une bonne occasion de poser le pied dans des coins où je n’étais jamais allé et de rencontrer des gens que je n’aurais jamais croisés!

La première étape a consisté à trouver des hôtes prêts à m’accueillir. En utilisant mon réseau d’amis et de collègues, le bouche à oreille et Facebook, j’ai pu commencer à mettre en place mon tour. Aux personnes qui se sont manifestées, j’ai envoyé un document qui expliquait mon projet. Si elles acceptaient d’y prendre part, elles devaient remplir un formulaire avec leur adresse, l’heure de mon arrivée et de mon départ, celle de ma prestation, et me confirmer s’il était possible de dormir chez eux et d’utiliser leur salle de bains.

Sur la route avec ma guitare

Si j’ai pu trouver assez facilement des particuliers prêts à jouer le jeu en Suisse romande et au Tessin, cela a été un peu plus compliqué en Suisse centrale, dans des cantons comme Uri, Schwytz et Nidwald. Et à quelques jours du début de mon périple, le 23 mars 2016, il me manquait encore des points de chute dans les deux cantons d’Appenzell. Ce qui s’est réglé par la suite grâce aux rencontres durant mon tour. Au final, j’ai décliné une seule offre: celle d’un nudiste suisse alémanique qui me proposait de venir chanter en tenue d’Adam dans son salon au milieu d’un public… nu évidemment!

Tel un troubadour des Temps modernes, j’ai pris la route – ou plutôt le train – avec comme seuls bagages ma guitare, quelques habits et ma brosse à dents. Mon premier concert d’appartement s’est déroulé dans une colocation d’étudiants à Berne, sous l’œil d’une caméra de la RTS qui faisait un reportage sur mon expérience. Le fait de jouer à quelques centimètres du public brise instantanément la distance qui peut exister dans une salle de spectacle. Ce contexte de proximité a créé un lien d’intimité avec ceux qui m’écoutaient, même s’ils ne parlaient pas la langue de Molière. Moi qui me demandais si le fait de chanter en français serait une barrière, j’ai été surpris en bien par la réaction de nos voisins alémaniques. Non seulement ils ont trouvé que c’était très musical, mais on m’a aussi dit que c’était la langue de l’amour!

Dans l’intimité des familles

Durant cette tournée de 26 dates d’affilée, j’ai vécu beaucoup de moments riches en émotions, comme cela a été le cas aux Grisons. Un couple de retraités m’a invité dans son chalet de vacances, un bien acheté 40 ans auparavant avec quatre couples d’amis. Deux d’entre eux étaient d’ailleurs présents avec leurs enfants et petits-enfants. Le temps d’une soirée, je me suis retrouvé au cœur d’un clan lié par une amitié indéfectible et de nombreux souvenirs en commun. Autant dire que ce fut un concert placé sous le signe des rires et des anecdotes savoureuses!


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Autre étape marquante, ma halte à Genève. Mes hôtes, des personnes engagées dans des projets de lutte contre la précarité, avaient convié des femmes roms à venir m’écouter. Quand celles-ci, que j’avais déjà aperçues dans la gare en train de mendier, se sont mises à chanter «Djelem djelem», l’hymne de leur communauté, ce fut bouleversant. Un vrai moment de partage, tout comme le second récital que j’ai improvisé ce soir-là, après l’arrivée d’un nouveau groupe d’invités.

Mon séjour le plus rocambolesque a sans aucun doute été celui au Tessin, dans une famille très exubérante. Après un véritable festin – dont la fameuse polenta maison accompagnée de viandes – le chef de clan, Herculo, a fait sa «grappa calda». Chaude ambiance! Je me croyais dans un film de Roberto Benigni. Mais quand il a fallu écrire quelques mots sur une carte postale à l’intention de mes hôtes du lendemain – un rituel que j’avais instauré pour faire le lien entre les différentes familles – l’instant est devenu solennel. Le plus souvent ces missives étaient très cordiales, mais elles pouvaient aussi prendre la forme d’un message détourné, comme cela a été le cas entre Bâle-Campagne et Bâle-Ville concernant une histoire de subventions – aïe!

Des lieux parfois insolites

La plupart de mes concerts en appartement se sont déroulés dans un salon, devant un public allant de 4 à 50 personnes. Mais j’ai également chanté dans des lieux plus insolites, comme la mairie d’Appenzell, en présence du président du canton, qui m’a offert un DVD et un livre sur son territoire. J’ai aussi donné de la voix dans un magasin de meubles et de fleurs à Schaffhouse. Et j’ai eu l’honneur d’inaugurer une salle de concerts dans une grange, en Argovie. Le propriétaire, un musicien amateur, avait passé des centaines d’heures à bricoler ce lieu. La dame qui avait vécu toute sa vie dans cette maison était aussi là. Elle a versé quelques larmes en me confiant que l’un de ses rêves était réalisé.

Partout, j’ai été accueilli à bras ouverts. On s’inquiétait toujours de savoir si j’avais assez mangé alors que j’étais repu. On m’a aussi beaucoup questionné sur les autres familles où j’avais été reçu. J’ai été surpris de constater à quel point les Suisses, de quelque région qu’ils soient, aspirent à un pays plus uni.

Outre le fait d’avoir pu dialoguer dans de nombreuses langues et dialectes, j’ai assisté à des scènes étonnantes durant mes récitals, comme ce grand-père figé, qui s’est soudainement animé au son de l’accordéon de mon ami Marc-Antoine, qui m’a accompagné sur certaines dates. Une ribambelle de souvenirs qui resteront à jamais gravés dans ma mémoire.

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