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témoignages

J’ai voyagé un an en famille à travers trois continents

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Timo, Sophie, Yves et Arno, à Nyon.

© Mercedes Riedy

Départ l’année dernière, juste après le Paléo Festival

Retour, juste avant l’édition de cette année. Pour nous, ce sont des dates un peu mythiques, autour d’un rendez-vous qu’en bons Nyonnais, nous ne ratons sous aucun prétexte. Même pas pour cause de tour du monde! Ce voyage, ça n’était pas un but ultime dans notre vie. Même si personnellement, j’adore voyager. J’ai pas mal bourlingué avec mes parents quand j’étais petite. A 20 ans, je suis partie avec une copine faire le Costa Rica à pied pendant deux mois. Mais Yves, mon mari, n’est pas du genre trip sac à dos.

Cette envie, ce besoin devrais-je dire, de partir, il est venu soudainement un jour de novembre 2008 lorsque nous avons appris qu’Yves était atteint de la maladie de Parkinson. Il avait 39 ans, moi 36. En sortant de l’hôpital de Genève, on était abasourdis. En marchant, nous sommes passés à pied devant une librairie. En vitrine, il y avait une immense carte du monde. Ça a fait tilt. On est allé s’acheter des pâtisseries, on s’est assis et on s’est dit: «C’est la merde, on va se tirer!» L’idée, c’était de figer le temps. On a réalisé que notre vie actuelle, que ce que nous aimions allait foutre le camp. On avait envie de se faire de beaux souvenirs de famille. De pouvoir se dire, dans les moments difficiles, qu’on a fait un truc génial ensemble.

Ensuite, on a réfléchi...

J’avais un boulot où ça bougeait pas mal, j’allais commencer une formation. Yves, lui, démarrait un nouveau job. On a d’abord pensé que ça n’était pas le moment idéal. Puis on a réalisé que, pour entreprendre une telle aventure, ce n’était JAMAIS le bon jour.

Dans un deuxième temps, on s’est rendu compte que le moment n’était finalement pas si mal choisi. Nous venions de vendre notre maison dans la région nyonnaise pour vivre dans un appartement. Nous avions le budget, disponible immédiatement. Et puis, lorsqu’on vous annonce ce genre de maladie, la notion de temps devient plus immédiate… On a arrêté la date de départ à la fin de ma formation, en juillet 2010. Quand on l’a annoncé à Timo et Arno qui ont 13 et 7 ans aujourd’hui, ils n’étaient pas très emballés. Quitter leurs copains, leur maison, leurs habitudes… Timo, qui est le fruit de mon premier mariage, s’inquiétait aussi de quitter son papa. Ledit papa, lui, n’était pas contre l’idée, mais émettait juste des réserves par rapport à l’école. Avec raison, l’expérience nous l’a prouvé…

Nous avons choisi les destinations ensemble et pris les billets

Ce serait Canada, l’ouest des Etats-Unis, Singapour, Viêt Nam, Cambodge, Laos, Thaïlande, Australie, Bali pour finir par la Malaisie. Trois jours avant le départ, un peu «à l’arrache», on a fait nos bagages. Un sac à dos plus un petit sac chacun. Vêtements, guides, médicaments, ordinateur, appareil photos, montagnes de livres pour l’école… parés pour le décollage! Le 26 juillet 2010, dans l’avion, j’ai soudain réalisé. Je n’avais plus de natel, plus d’agendas, plus de rendez-vous. Plus aucune obligation. Ce sentiment s’est renforcé dès le premier matin au Canada. Une sensation de liberté extraordinaire, que je n’avais jamais connue. Nous avions un an pour faire ce que nous voulions!

Seule contrainte, l’école

Depuis le départ, c’était convenu que nous nous y mettions tous les matins de semaine. Très vite, on s’est rendu compte de la difficulté. Apprendre à un enfant, c’est très difficile. Et puis j’avoue que j’ai découvert les limites de ma patience. Les faire travailler aura été l’une des choses les plus délicates du voyage. D’ailleurs, les deux refont leur année, mais comme Timo avait de l’avance et qu’ils ont quand même acquis des choses l’année dernière, ça se passe très bien. Donc pas vraiment de regrets.

A part les grands trajets entre pays, nous ne nous déplacions qu’en trains ou en bus locaux. Guest-houses, petits hôtels, pensions, petit meublé en Thaïlande et petite maison à Bali, nous ont servis de points de chute.

Après quelques mois en Amérique, le vrai choc a été notre arrivée à Hanoï

Là, tous, nous avons du lâcher nos repères, nos références. C’était vraiment l’aventure, l’immersion totale dans une autre culture. On a alors vécu des moments magiques… Un bain dans une rivière avec des moines au Laos, un moment de connexion totale entre Timo et une vieille éléphante dans un parc en Thaïlande, un cours de cuisine thaï avec mon grand – chose que je n’aurais jamais faite ici –, Arno et les singes du Cambodge. En Australie, je nous revois, Yves et moi, parler des heures et des heures, refaire le monde à l’avant du camping-car sur d’interminables routes…

Des moments difficiles, il y en a eu aussi, comme ce «pétage de plombs» après le Cambodge. Toute cette misère, cette souffrance, cette histoire lourde qu’il faut tenter d’expliquer aux enfants ont fait remonter des choses. On a eu un coup de blues. En plus, on était crevés, on bougeait tout le temps. Au lieu de tout arrêter et de rentrer, on a décidé de poursuivre et de se poser un peu en louant un meublé pour un mois à Chiang Mai, dans le nord de la Thaïlande. On a même vécu le tremblement de terre qui a secoué cette ville en mars 2011. Mais ça a suffi pour recharger les batteries.

Aujourd’hui, notre façon de voir les choses a complètement changé

On ne dit plus «je dois» ou «il faut», mais «j’ai envie» ou «ça me fait plaisir de». Depuis notre retour, on allège notre vie. A la maison, on trie, on recycle, on donne. C’est fou ce qu’on peut amasser comme choses inutiles. On s’en rend compte quand on a vécu un an avec ce qui rentre dans un sac à dos. Les enfants ont acquis une grande ouverture d’esprit. Tout le monde remarque qu’ils sont beaucoup moins introvertis qu’avant. On consomme autrement, on juge mois les autres sur des a priori. Moi, j’ai retrouvé du plaisir à être avec mes enfants, à partager avec eux. Avec Yves, on était déjà très complices, maintenant, on est solidaires. Et puis on profite de chaque jour qui passe. Comme les Asiatiques, on se dit que la vie, c’est ici et maintenant!»

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