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«Directeur de zoo, je vis parmi les animaux»

Directeur zoo

Etant depuis l’enfance un grand ami des animaux, j’ai rapidement pris le rythme. Je dirais même que les animaux sont plus faciles à gérer que les humains. Ils ne trichent pas et ne se montrent pas lunatiques ou manipulateurs, comme certains d’entre nous. On sait ce qu’ils aiment et leurs réactions sont logiques. Ils sont tout simplement naturels et sincères.

© Corinne Sporrer

Le sentiment de ras-le-bol est arrivé progressivement. Ça faisait près de treize ans que je travaillais dans le milieu des assurances sociales et j’en avais plus qu’assez d’évoluer dans le système classique. Le rythme métro-boulot-dodo ne me convenait plus. Il me fallait absolument changer d’air.
J’avais toujours rêvé d’être indépendant et de gérer ma propre activité.

Un jour, en discutant avec mon père et mon frère, nous avons eu une idée un peu folle: originaires de la région de Martigny, nous savions que le propriétaire du Zoo des Marécottes cherchait à vendre son domaine depuis des années.

Et là, on s’est dits: «Pourquoi ne reprendrions-nous pas ce complexe?» Nous sommes allés le voir directement, et ça s’est fait comme ça.

La réouverture a eu lieu en mai 2015, après des mois de travail et de préparatifs. Nous en avons fait un business familial: mon frère gère la partie restauration, ma sœur l’aide en cuisine et mon papa œuvre en tant que superviseur à tout faire. Moi, je suis responsable du parc zoologique, du secteur piscine et du côté administratif. Je porte plusieurs casquettes, aucune journée ne se ressemble et ça me convient à merveille!

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L’ami des animaux

Le changement de vie a été radical et rien n’aurait pu me préparer totalement à ce qui m’attendait. J’ai tout appris sur le terrain. Mon CFC de commerce ne me servait pas à grand-chose lorsqu’il s’agissait de gérer des créatures vivantes. Bien qu’on finisse par connaître leur caractère, ils restent imprévisibles.

L’arrivée d’un nouveau pensionnaire peut notamment être très délicate, dans la mesure où il nous faut essayer d’anticiper au maximum les réactions de l’animal stressé. Les cas où nous devons les faire soigner peuvent aussi être compliqués. Le hibou grand-duc, par exemple, peut vous arracher un doigt pendant que vous lui appliquez de la pommade. S’il vous mord, il ne vous reste plus qu’à l’emmener aux urgences avec vous; car il ne vous lâchera pour rien au monde!

Etant depuis l’enfance un grand ami des animaux, j’ai rapidement pris le rythme. Je dirais même que les animaux sont plus faciles à gérer que les humains.

Ils ne trichent pas et ne se montrent pas lunatiques ou manipulateurs, comme certains d’entre nous. On sait ce qu’ils aiment et leurs réactions sont logiques. Ils sont tout simplement naturels et sincères. Sauf les chats; eux, ils peuvent être lunatiques.

Aujourd’hui, je vois que les pensionnaires me reconnaissent. Lorsque je tends une cuillère à l’un des ours, il la croque. Par contre, quand je lui présente mes doigts, il n’y plante pas ses dents. Alex, le lynx, et Apollo, le loup, réagissent aussi quand je les appelle. Il peut y avoir vingt personnes devant l’enclos, quand je passe ils ne regardent que moi.


© Corinne Sporrer

Danse avec les loups

Avant de reprendre le zoo, nous connaissions déjà très bien l’endroit. Plus jeune, je travaillais dans le parc pendant mes vacances d’été, sous l’œil vigilant du papa de celui qui est aujourd’hui notre chef animalier. La première fois, j’avais 14 ans. Je n’étais pas franchement rassuré, surtout avec les loups! Mais j’en garde des souvenirs extraordinaires. Je me souviens par exemple qu’au moment où les loups adultes mangeaient, les petits s’approchaient de nous et s’installaient sur nos genoux pour se laisser caresser. Je m’en rappellerai toute ma vie.

D’ailleurs, le loup n’est pas l’animal le plus dangereux du parc, c’est le cerf. S’il se sent menacé et charge, vous êtes certain de passer un très mauvais quart d’heure! D’ailleurs, la seule fois où j’ai eu vraiment eu peur, je me trouvais dans l’enclos des daims. Nous devions capturer deux petites femelles parmi le groupe. A ce moment-là, l’un des mâles a décidé de charger. J’ai eu le réflexe de me plaquer contre le grillage afin d’éviter qu’il ne plante ses dagues dans ma poitrine. Je m’en suis tiré avec un petit coup de bois et un beau bleu qui a persisté durant des semaines.

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Frère des ours

Afin d’éviter la consanguinité parmi les animaux, il arrive que des pensionnaires soient transférés dans d’autres zoos. C’est toujours étrange lorsqu’ils s’en vont, car au fil du temps, on apprend à les connaître. Bien qu’on ne puisse les approcher tous, on s’y attache facilement, comme à n’importe quel animal de compagnie.

Je pense surtout à Baloo, le plus vieil ours noir, qui nous a quittés durant l’été 2016. Il avait la cataracte, commençait à perdre ses dents et souffrait d’arthrose. En le voyant si malade, j’ai décidé de téléphoner au vétérinaire pour qu’il vienne l’endormir. J’en ai encore des frissons. Ce jour-là, nous nous sommes approchés de l’ours alors qu’il était encore conscient et je suis persuadé qu’il avait compris qu’il allait être soulagé.

On lui a rasé la patte, avant d’installer l’intraveineuse et de lui dire au revoir. Le vétérinaire a injecté le produit, Baloo a pris trois respirations… et c’était fini. Nous l’avons réellement senti partir, c’était très impressionnant. J’ai rêvé de lui pendant plusieurs jours.

La belle surprise

Avant de s’en aller, il nous a fait un cadeau très inattendu. En mars, quelques mois après son décès, nous avons entendu des cris étranges émaner de la grotte des ours. Incrédules, nous nous sommes approchés, et y avons trouvé une petite boule de poils: c’était un minuscule ourson, doté de grands yeux bleus. Le fils de Baloo. Nous étions fous de joie! On ne s’y attendait pas, car les ourses vivant dans la nature mettent bas uniquement au printemps, lorsque la neige a fondu. C’est comme si on nous avait rendu une part de Baloo, via son fils. Je l’ai appelé Mirus, ce qui signifie belle surprise, en latin.

La vie continue et elle me convient. Je ne retournerais en arrière pour rien au monde.

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