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Lubie? Défi? Besoin? Les raisons étaient nombreuses et personnelles. Toujours est-il que le 1er mars 2017, je me suis lancée pour la première fois depuis mon enfance dans l’expérience du Carême. Souvenirs de catéchisme: enfant, nous recevions une pochette en papier violet marquée du symbole rouge d’Action pour le Carême. Elle servait à récolter nos petits sous, économisés en s’abstenant de manger des bonbons, et à les donner ensuite aux pauvres.

Les origines de ce rituel ne sont pas claires. Le Carême est apparu bien après JC, au IVe siècle. Il ferait pourtant écho aux 40 jours que Jésus passe dans le désert sans nourriture. Plus globalement on peut l’assimiler à une période de détox nécessaire pour le corps au moment du printemps. Bref, je m’éloigne.

Pour ma part, j’avais un but plutôt égoïste (et pas très catholique pour le coup): perdre du poids! Je décide donc d’éliminer de mon quotidien la viande (classique du Carême, après le Mardi Gras où l’on fait ripaille, le Mercredi des Cendres est un jour de pénitence qui marque le début de quarante jours de diète, jusqu’à la Semaine Sainte de Pâques). J’ajoute l’alcool, mon péché mignon.

Première semaine

Je passe les vacances de Carnaval en famille au chalet. Après un dernier apéro au Cornalin qui me brûle l’estomac comme une mauvaise cuisine mexicaine, j’entre sereinement en sobriété. Je me lance carrément 5 jours avant le début officiel du Carême (le 1er mars cette année), car dans ce cadre rythmé par les repas des enfants et les balades au grand air, le thé est plus de rigueur que le mojito.

Lundi 6 mars, retour au bureau

C’est là que les choses sérieuses commencent. Question viande, pas de problème, le restaurant de l’entreprise propose tous les jours un plat végétarien et un alléchant buffet de salades. J’explique ma démarche à mes collègues. Leurs réactions hilares quand je parle de mes 40 jours d’abstinence me vexent et me font prendre conscience de l’image de grosse fêtarde que je trimballe. Il va falloir changer tout ça! Et je suis assez fière de moi. C’est la semaine de tous les dangers, et je la traverse sans faillir.

Lundi, sortie ciné avec une amie. On a l’habitude de prendre un petit cocktail avant. Ce sera le Starbucks. Mardi, concert rock avec mon meilleur ami grand amateur de bières. Je prends un Sinalco pour l’apéro, j’avais oublié comme c’était bon, et deux Cocas à la salle de concerts car j’ai quand même besoin d’un petit remontant. Etonnamment, je ne m’ennuie pas et je suis atterrée par l’état d’alcoolémie avancé de certains spectateurs. Mercredi, événement presse dans un salon de coiffure branché à Genève, le champagne coule à flots. Je réclame de l’eau avec des bulles. J’ai l’impression d’être une chieuse. Jeudi, épreuve ultime, apéro team building avec la rédaction au complet. Coca et eau pour moi. Je rentre deux heures plus tôt que d’habitude en ayant dépensé 3 fois moins. C’est tout bénéf’!

Vendredi, enfin un matin sans réveil. Je suis pourtant autant fatiguée que les autres semaines. Je n’ai pas trop le moral, et mal au dos comme d’habitude, je me colle donc un patch antidouleur. L’après-midi, j’ai un autre événement glamour avec champagne, je bois de l’eau avec des bulles dans une coupe, je l’instagramme tant c’est inhabituel. Je rentre chez moi et m’endors sur le canapé à 17h30. Hou hou, belle énergie, où es-tu?

Samedi, je sors manger avec une amie (oui, encore!). Je choisis un resto asiatique en me disant qu’il y aura au moins des bons thés. Je prends un Virgin Mojito pour l’apéro puis deux théières de Genmaïcha, délicieux avec mon chirashi. Vive le poisson! Et le dimanche sans gueule de bois.

Lundi 13 mars

J’attaque déjà ma troisième semaine. Me passer de viande est vraiment facile, mais il faut dire que je ne fais attention à rien d’autre. Pâtes, fromages, tartines, œufs, c’est le bonheur. Je me pèse en milieu de semaine. Déception, je n’ai rien perdu, au contraire, l'aiguille est à la hausse! La faute aux sodas me dit une amie, il faut boire DE L’EAU. Heu… j’en ai bu 5 en tout, faut pas exagérer. Quel ennui!

Je n’ai pas de sorties prévues cette semaine. En revanche, le retour des beaux jours a fait pousser les terrasses et quand je rentre après une journée de travail harassante, elles me tendent les bras. Tous ces gens qui décompressent autour d’une bière bien fraîche… et moi qui rentre sagement. Je m’achète un joli verre style Mason Jar avec une paille et un couvercle à pois pour me faire des boissons sympas sans alcool chez moi, thé froid et limonade maison. Ça passe.

Jeudi 16 mars

Souper à Genève avec mes chères copines de collège, des filles saines mais épicuriennes. Je bois un cocktail sans alcool délicieux, hyper photogénique qui finit bien sûr sur Instagram. Je vais pouvoir écrire un guide des “mocktails” de Suisse romande (de mock, factice). Au repas, on opte pour un nouveau resto surf & turf à la mode qui sert du homard sous toutes ses formes. Pour accompagner notre ami à pinces, on commande un bon Languedoc. “Tu n’en prends pas alors Valérie?”.... Aaaargh, c’est trop dur, je salive: “Si j’en bois un petit verre, personne ne le saura?...” “Si, JESUS”, me répondent-elles en chœur. Je ris et quelque chose cède en moi. Quelques verres plus tard, je suis dans le train du retour, heureuse de ma soirée, sans un gramme de culpabilité. Je reprendrai demain!

Vendredi 17 mars

Je me lève à 13h30. Ouille, mon corps n’a plus l’habitude. C’est là que je commence à m’en vouloir. Je passe le reste de la journée à l’eau citronnée, bien que ce soit la Saint-Patrick et que mon fil Instagram ne me montre que des amis en train de festoyer au pub. Pour détourner mon attention, je clique sur le hashtag #carême, et découvre tout un pan de la vie sur les réseaux sociaux. Je ne suis pas seule à faire le Carême, des milliers de gens partagent leur cliché avec des paroles d’évangile ou des recettes “maigres”. Je suis un peu secouée de tomber sur des comptes limite intégristes, des personnes fanatiques, des clichés de fières mères de famille nombreuse, notamment aux Etats-Unis. J’apprends au passage que Carême en anglais se dit Lent et que ce hashtag a 519’000 récurrences! Le compte catholic_imagery cumule 100k followers, on y voit même un selfie de Mark Wahlberg et sa femme arborant une croix sur leur front pour le Mercredi des Cendres. Voilà voilà… Je m’abonne quand même à un chouette concept store de bondieuseries pas trop kitsch.

Samedi 18 mars

Mon oncle et ma tante nous invitent à souper. Ils ont fait des lasagnes. A la viande. Je ne peux refuser, mais ce sera la seule exception sur mes 40 jours! Je ne crache pas non plus le verre de vin qui va avec. La boîte de Pandore est ouverte, je ne vois plus l’intérêt de m’infliger cette punition sans aucun bénéfice visible. Je n’ai pas perdu de poids, je n’ai pas moins de douleurs articulaires ni meilleure mine au réveil. Et je suis surtout extrêmement frustrée. La frustration, c’est ce qui fait que les régimes ne marchent pas. J’en ai la preuve encore une fois. Je tiens encore jusqu’au jeudi suivant, où une nouvelle soirée entre amies part en vrille. Je fais mon mea culpa sur Instagram avec un dessin humoristique et le hashtag #pardonjesus. Mes collègues postent des commentaires déçus… Tant pis.

Conclusion: J’aurais tenu plus ou moins la moitié de mon pari, question alcool, soit trois semaines. J’ai passé la deuxième partie du Carême à m’octroyer TOUS LES JOURS un verre parce qu’on ne vit qu’une fois et que la vie sans apéro est bien trop triste.

Côté viande en revanche, je continue sans même m’en apercevoir à ne plus en manger. J’ai pris l’habitude au resto de commander le plat végétarien et à cuisiner chez moi d’excellents menus variés et colorés, sans viande. Je pense même continuer au-delà de Pâques mais sans être trop stricte. Tout ce qui est extrême ne peut pas être bon, surtout s’il n’y pas de plaisir. Trop de discipline, c’est sûrement ça la définition de l’enfer.


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