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Ces «ex» qui restent amis pour leurs enfants

Femina 16 Dossier Les Ex 00

Ben Affleck et Jennifer Garner.

© Getty Images

Avant, vous étiez un couple uni et heureux. Une vie sympa, des amis en commun, des loisirs ponctués de voyages, le tout affiché sur votre profil Facebook, histoire de partager ce bonheur avec votre petit monde. Et bing! La love story tourne court: le fieffé vient de vous quitter. Depuis, sa vie tout sourire s’expose toujours sur la toile, sans vous. Rude!

Pauline P. se rappelle très bien ces sales moments passés à contempler sur les réseaux sociaux la «nouvelle» de l’amoureux qui venait de la quitter. «Au début, c’était parce qu’il me manquait. Mais peu à peu Facebook, Twitter et LinkedIn sont devenus des ersatz me donnant l’impression que notre relation n’était pas complètement finie.» Un leurre, pour la Genevoise qui subissait cette situation et se rendait malheureuse. «J’avais besoin de savoir ce qu’il faisait, quelles personnes de notre entourage il voyait sans moi et, surtout, s’il avait rencontré quelqu’un d’autre.» Pour sortir de son marasme affectif, Pauline finit par effacer son ancien compagnon de ses listes de contacts. «Je me suis sentie mieux et, surtout, j’ai arrêté d’être inquisitrice.»

Vive le silence radio!

Une situation un peu extrême? Pas tant que ça. Car aujourd’hui, les ex font partie intégrante de notre paysage, visuel comme mental. Souvent accessibles d’un clic sur les plateformes sociales ou sur Google, ils témoignent d’une ère où nos amours passées cohabitent avec notre amour du moment.

Une étude de la psychologue Tara C. Marshall, publiée dans la revue «Cyberpsychology, Behavior, Networking», avance ainsi que 57% des utilisateurs de Facebook sont amis avec leurs anciens partenaires. Et, selon une autre enquête, parue dans le «Journal of Social and Personal Relationships», seuls 4% des internautes suppriment un ex de leur univers 2.0 après la séparation. «Avec les nouvelles technologies, les distances physiques et temporelles n’existent plus vraiment, souligne la sociologue Nicky Le Feuvre, professeur à l’Université de Lausanne (Unil). L’envie de rester impliqué dans la vie d’un ex existait avant les réseaux sociaux, mais les possibilités d’y parvenir étaient plus limitées.» Et compliquées. A moins de faire le pied de grue devant chez lui, les nouvelles d’un ex arrivaient par la bonne copine qui l’avait croisé par hasard dans une soirée au bras de sa nouvelle dulcinée. S’ensuivait une discussion interminable et salutaire où ledit ex était mis au pilori et verbalement crucifié. Basta! l’affaire était close. Mais en 2017, les codes ont changé: en plein milieu de notre propre fil d’actualité, les relations d’antan continuent parfois de vivre, d’aimer un ou une autre, voire de liker les publications sur nos pages. Des fantômes omniprésents. Et plutôt du genre malsain.

Suivre la vie d’un ex, s’informer de ce qu’il fait par des photos ou des commentaires sur les réseaux sociaux, empêche une rupture effective et définitive, dixit Robert Neuburger, psychiatre et thérapeute, auteur de «Le couple: le désirable et le périlleux» (Payot, 2014). «Lorsque deux personnes se quittent, chacun doit retrouver son espace et s’accorder du temps pour se reconstruire. Pendant un moment, quelques semaines à plusieurs mois, voire des années selon les cas, il faut couper toutes relations, même numériques.» Difficile, ce silence radio salvateur clarifierait la rupture et éviterait toute ambiguïté. Il permet aussi de tourner la page, de faire le deuil d’une relation en écartant le risque d’une certaine dépendance affective.

Mon ex à portée de clic

Dans son article de «Cyberpsychology», Tara C. Marshall abonde dans le sens du psychiatre français: garder ses ex dans sa liste d’amis est surtout la porte ouverte «à un sentiment de détresse, d’émotions négatives, de désir sexuel et d’attente envers l’ex-partenaire, ainsi qu’à un faible épanouissement personnel». L’avertissement est clair. Sauf qu’avec la vie de l’autre à portée de clic, la tentation de s’y connecter est grande.

Cette tentation, Olivier G. y a cédé. Après leur rupture, il visitait souvent le profil Facebook de son ex-femme. Constatant la présence de nouveaux amis plutôt masculins, il a fini par la repérer sur le réseau de rencontres Tinder. Scandale, puis douche écossaise: «Mon ex-femme m’a gentiment rappelé que nous nous étions connus grâce à ce site de rencontres, avant d’ajouter qu’elle était en droit de refaire sa vie comme bon lui semblait.» Plutôt extrêmes, ces cas ne sont cependant pas si rares. Car, à en croire l’article du «Journal of Social and Personal Relationships» cette fois, un utilisateur de réseaux sociaux sur dix scrute quotidiennement le profil de son ex!

Pourtant, passée la période où séparation rime avec souffrance, garder de bonnes rela tions avec un amour d’hier n’a rien de gênant, ni d’anormal. Cette situation, Barbara B. la gère parfaitement. «Je ne vois pas pourquoi je devrais détester des personnes qui ont compté dans ma vie.» Pour la Jurassienne, les choses sont claires. «Mes ex sont devenus des amis au même titre que les autres. Ils connaissent mon mari, je connais leur compagne et tout le monde s’apprécie. Certains d’entre eux sont même devenus de vrais amis.» Arriver à cette qualité de relation, sans quiproquo, a pris du temps. «Il a fallu que chacun soit heureux dans son histoire amoureuse et n’éprouve plus aucune rancœur ou attirance pour l’autre.» Heureux, l’exemple de Barbara est cependant loin de courir les rues. Selon Robert Neuburger, «pour un ex-couple, le passage d’une relation sexualisée à une autre forme de relation basée sur la fraternisation plutôt que l’érotisation n’est pas chose évidente».

Et, lorsqu’elle l’est pour les deux ex-partenaires, leur nouvel entourage affectif risque d’avoir du mal à accepter une situation ressentie comme ambiguë. «Dans une relation amoureuse qui débute, chacun doit trouver sa place et s’y sentir à l’aise, décrit le thérapeute. Les histoires passées ne peuvent faire ombrage au présent, si on veut laisser une chance d’épanouissement à une nouvelle relation.» Il se souvient de l’un de ses patients étonné de l’agacement de sa compagne lorsque l’une de ses ex appelait chez eux pour prendre des nouvelles. «Finalement, j’ai compris qu’elles étaient quatre à téléphoner chaque semaine, sans grande bienveillance pour celle qui leur succédait!»

Les ex trop présentes, Anaïs en a aussi souffert. Petites photos, messages sur le mur Facebook du profil de son copain, SMS suivi d’un café au bar du coin… Elle a fini par demander à son Jules de faire le ménage dans sa vie et sur ses réseaux sociaux. «J’avais l’impression qu’il restait coincé dans le passé et qu’il ne s’engageait pas vraiment dans notre relation. Il a accédé à ma demande lorsque je lui ai expliqué que, pour moi, c’était la preuve de son amour.»

Au nom des enfants

Trouver une médiation entre ses histoires passées et présente relève parfois du casse-tête. «Le couple est devenu l’amalgame de deux personnes individualistes qui négocient tous les pans de leur relation, estime Nicky Le Feuvre. Tout comme la répartition des tâches domestiques, la fréquentation ou pas de ses ex est discutée dans le cadre d’un contrat conjugal plus ou moins tacite.» Un comportement épuisant, où le doute et la négociation perpétuelle touchent toute la vie relationnelle.

Elle est loin l’époque où une séparation était totale, normée par un code social clair! Le temps où Madame gardait les enfants et ne revoyait plus Monsieur. Outre la toile des réseaux sociaux, l’implication grandissante des pères dans l’éducation des enfants a également complexifié la donne. «Malgré la séparation, le couple parental est une réalité qui perdure au-delà du couple conjugal», estime la sociologue. Garde alternée, régulation commune du quotidien des enfants, familles recomposées, ces nouvelles formes du vivre ensemble impliquent la poursuite de relations malgré la séparation. Et la situation est souvent difficile à encaisser pour la seconde épouse. Catherine a ainsi eu bien du mal à faire comprendre à son nouveau mari la gêne éprouvée lorsqu’elle croisait son ex-femme aux fêtes de famille. «J’ai explosé le jour où il m’a dit qu’elle restait la mère de ses enfants et avait, à ce titre, une place légitime dans sa famille. Je lui ai rétorqué que je l’avais épousé lui et pas son ex!» Dans ce cadre fraternel où l’on garde une grande considération pour l’autre, les rapports au sein du triangle peuvent être tendus, voire conflictuels.

Parfois aussi, cette fraternisation n’est pas voulue, mais subie. «Lorsque mon ex m’a quittée, je ne voulais plus le voir. Mais, avec nos enfants en garde partagée, c’était impossible», se souvient Aurélie D. Etre quasi voisins, se faire la bise et continuer de se fréquenter pour assumer le quotidien des petits, ce mode de vie a été très pesant pour la jeune maman blessée. Une situation qui peut aussi conduire à des abus. «Rester présent pour nos enfants a été le prétexte de mon ex-mari pour ne pas sortir vraiment de ma vie, se souvient Mireille S. Le soir, après ma journée de travail, je le trouvais chez moi à la place de la baby-sitter.» Pendant deux ans, cette quadra parisienne a toléré sa présence, jusqu’au jour où elle a demandé à l’indélicat de respecter sa vie privée et de voir leur progéniture chez lui.

Au fond, empêtrés dans la Toile ou en orbite toujours rapprochée à cause des enfants, les ex post-modernes déforment l’espace-temps amoureux. Tels des Einstein de la relation de couple, il va leur falloir rendre les choses plus limpides… Histoire que le droit d’aimer plusieurs fois ne débouche pas sur une équation insoluble.

Les ex, un sujet bankable

Drame ou comédie, film ou série, l’omniprésence d’un ex revient souvent dans les scénarios du petit comme du grand écran. Du côté des séries, la production sud-coréenne «Ex Girlfriend Club» évoque les relations rocambolesques d’un jeune homme avec trois de ses ex-petites amies.

Dans «Un enfant de toi», Lou Doillon se laisse séduire une seconde fois par le père de son enfant, après plusieurs années de séparation.

Version comédie romantique, Matthew McConaughey, photographe séducteur et tombeur, est «Hanté par ses ex», ou du moins par leurs fantômes.

En recontactant les ex de sa «(S)ex list», Anna Farris espère échapper à une vie amoureuse chaotique et retrouver l’ex de sa vie.

Pour éviter la paupérisation née d’un divorce, un couple séparé vit «Sous le même toit», en colocation avec leurs enfants.

Réussir da séparation numérique

Supprimer son ex de ses contacts. Au moins pour un temps, jusqu’à ce que la rupture soit reconnue et acceptée par les deux.

Bloquer son profil pour l’empêcher d’accéder à nos comptes. Réseaux sociaux, messagerie instantanée, boîte mail, cette pratique permet d’éviter d’être suivi ou de recevoir des messages d’une personne non désirée. Les smartphones permettent aussi de filtrer ou bloquer les appels.

Sur Facebook, en éliminant certains tags et noms de personne qui apparaissent sur les photos, il est possible de faire disparaître les clichés non désirés.

Applis au secours des ex en froid

Nombreux sont les couples séparés ou familles recomposées tenus de rester en contact pour gérer le quotidien de leurs enfants. Quand le dialogue est difficile et la rencontre impossible, des applications comme «Easy2Family» ou «2Houses» permettent d’éviter de se fréquenter. Elles aident les parents divorcés à s’organiser et à se synchroniser pour les gardes alternées, les vacances et la logistique de modèles familiaux nouveaux.


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