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Eternelle ado un brin déconnectée ou maman rock’n’roll au bord de la crise de nerfs, la dessinatrice est tout ça à la fois.

Décalées, ses héroïnes le sont tout autant qu’elle. Qu’il s’agisse de Lina, ado pas vraiment en phase avec ses congénères boutonneux, ou d’Angry Mum qui ne déteste rien tant que les cafés avec ses copines divorcées et ses ex-copains punks devenus bobos, elles ont toutes en elles quelque chose de leur auteure. Car la dessinatrice lausannoise Hélène Becquelin a un grain. Et c’est elle qui le dit: «Je suis dingo, mais je m’en fous des autres, les gens me prennent comme je suis.»

A bientôt 50 ans, Hélène ne se fond pas dans la masse. Mère d’un garçon de 19 ans étudiant en physique et d’une fille de 16 ans gymnasienne, elle a uni son destin, voilà plus de vingt ans, à celui d’Yves, alias Momo, mathématicien de son état avec lequel elle entretient une relation très fusionnelle: «On est toujours ensemble. Même si l’on n’est à l’abri de rien, on a tendance à penser que nous sommes «intouchables», explique-t-elle pour exprimer tout l’amour qu’elle porte à son homme.

Ici s’arrête le portrait classique d’une famille très ordinaire. Car, le soir, à l’heure où la plupart de leurs contemporains optent pour série télé et canapé, Hélène et Momo sont souvent par monts et par vaux: «On a une très grande curiosité intellectuelle, on sort beaucoup sur Lausanne, on voit des concerts, des expos. On a beaucoup d’amis créatifs qui organisent pas mal d’événements.» Et souvent, la fête se prolonge jusqu’au bout de la nuit. Ce qui oblige à une certaine autodiscipline non dénuée de logique: «On essaie de ne pas sortir trop en semaine, car on ne sait pas rentrer.» Dont acte.

La cinquantaine, c’est avec ravissement qu’Hélène l’aborde: «Je ne pensais pas que ce serait si cool d’avoir 50 ans. Les enfants sont grands, on n’a pas de contrainte d’horaires. C’est juste merveilleux.» Bien dans sa tête, la dessinatrice l’est aussi dans son corps. Et fait partie de ces femmes qui affichent sans complexes leurs cheveux couleur ivoire: «J’ai commencé à me les teindre très tôt, je ne trouvais pas joli le côté poivre et sel. J’ai arrêté les teintures quand ils ont été tous bien gris.»

Punk pour la vie

Petite coupe courte – «indispensable avec les cheveux blancs», dit-elle – lunettes noires rectangulaires… Hélène, graphiste de formation, s’est copiée trait pour trait pour donner vie à Angry Mum, dont les aventures sont à découvrir sur le blog du même nom qu’elle anime depuis six ans. Et dans ses BD, éditées chez Glénat, dont la dernière, Angry Mum voit rouge, vient tout juste de paraître. Dans ses chroniques, on retrouve son univers: Momo, ses enfants Boris et Lucie, les trois chats de la maison, les copines, mais aussi pas mal de rockeurs sur le retour dont elle se moque gentiment.

Dans ses bulles, les allusions aux Ramones et à la culture punk sont nombreuses: «A la fin des années septante, cette musique a été une vraie soupape pour moi. J’étais une ado décalée, je ne me reconnaissais pas dans Dalida et Patrick Juvet. En 1979, le London Calling des Clash m’a fait comprendre qu’il y avait des gens comme moi!» commente-t-elle.

Née en Valais, élevée à Saint-Maurice par un papa mécanicien et une maman femme au foyer, Hélène grandit entre un grand frère, Philippe, alias l’hilarant dessinateur de presse Mix & Remix, et une petite sœur. Maladivement timide, elle déteste l’école et les autres enfants: «Je passais mon temps dans ma chambre, je lisais, je dessinais. J’étais à la masse, gothique avant l’heure, je me passionnais pour le vieux français. Je ne mangeais que des chips et des yaourts moka.»

De cette époque, Hélène garde des séquelles qu’elle dévoile avec humour et sans aucun complexe: «Je ne sais toujours pas aller à vélo. Et je n’ai jamais forcé mes enfants à manger ce qu’ils n’aimaient pas.» Entourée par une famille très aimante et une maman dotée d’une grande curiosité intellectuelle, Hélène opte pour les Beaux-Arts, tout comme son frère: «Là aussi, nos parents ont été extraordinaires. Dans un Valais ouvrier, laisser deux de ses enfants partir à Lausanne pour suivre ce genre d’études, c’était pas évident.»

A cette époque, Hélène, qui arbore un look gothique (ndlr.: elle court nous chercher sa carte d’étudiant pour appuyer ses dires), fréquente le milieu alternatif sans jamais en emprunter ses travers et traîne pas mal à la Dolce Vita, haut lieu des nuits de la capitale lausannoise, où elle rencontre son Momo. Elle, une Becquelin famille radicale de Saint-Maurice, épouse alors un Mottet courant PDC d’Evionnaz: «C’était carrément Roméo et Juliette», rigole-t-elle. Pour son canton d’origine, Hélène a les yeux de Chimène: «Je m’en moque souvent car c’est dans mes gènes mais je défendrai toujours un Valaisan», tambourine-t-elle en s’amusant sur l’affaire Varone…

Rebelle, révoltée? Elle s’en défend: «Je ne suis pas militante et je n’ai aucune conscience politique. Je suis bien trop cynique!» Lorsqu’on l’interroge sur ses projets et ses envies, Hélène lève les bras au ciel: «J’en sais rien du tout, je suis incapable de me projeter, je ne sais même pas ce que je ferai à Noël.» Oups… j’avais failli oublier la devise des punks: No future!

«Lina», chaque semaine dans Femina. «Angry Mum voit rouge», Ed. Glénat. 64 pages. www.angrymum.ch

Le lieu

C’est la salle à manger de son appartement lausannois qu’Hélène a choisie pour cette photo. Calme, ensoleillée, elle lui sert aussi de bureau et y passe donc la plupart de son temps. Bien plus qu’à la cuisine, elle qui déteste cuisiner. Cette pièce lui sert aussi d’atelier pour créer ses ex-voto en laine cardée qu’elle vend sur la boutique en ligne Etsy. Son côté catholique-gothique!

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